Licenciements massifs, chômage partiel, suppression d'avantages sociaux, gel voire baisse des salaires: les salariés des médias américains font les frais de la crise de la publicité, qui s'est accentuée ces dernières semaines et menace la survie même de plusieurs groupes.

Media General Inc. a ainsi ordonné mercredi à 5600 de ses salariés de prendre 10 jours de congés non payés d'ici la fin de l'année, dont quatre jours avant la fin mars. Objectif: une économie d'environ 9 millions de dollars US, selon son porte-parole Ray Kozakewicz.Ce grand groupe de journaux (24 quotidiens) et télévision (19 chaînes) coté en bourse avait déjà réduit ses dépenses de 19 millions en suspendant les dividendes aux actionnaires et sa contribution au plan de retraite des salariés. Il a aussi réduit ses effectifs de 17% depuis le début 2007.

Le groupe de journaux Tribune Co., propriétaire notamment du Los Angeles Times, du Chicago Tribune et de plusieurs chaînes de télévision, s'est pour sa part placé sous la protection de la loi sur les faillites en décembre. Croulant sous une dette de 13 milliards, il a annoncé cette semaine le gel des salaires des employés non syndiqués et veut négocier l'élargissement de cette mesure à tout le personnel, soit 14 600 plein temps à la fin de 2008, afin d'«éviter des mesures futures plus sévères», explique son directeur administratif, Gerry Spector.

Cela faisait déjà plusieurs années que les médias voyaient leur principale source de recettes, la publicité, s'envoler vers des sites Web de petites annonces comme Craigslist ou des supports comme le moteur de recherche Google [[|ticker sym='GOOG'|]]. La récession a accéléré et renforcé cette tendance.

La presse papier américaine dans son ensemble devrait voir ses recettes publicitaires plonger de 40% cette année, à 28 milliards, selon une analyse de la banque d'investissement Barclays Capital.

Les télévisions s'en sortent mieux mais en cette année non-olympique elles devraient voir leurs recettes publicitaires reculer de 13 pour cent, à 38 milliards.

Dans cette situation, McClatchy Co. opte pour de nouveaux licenciements. Le groupe d'une trentaine de titres, dont le Miami Herald, entend réduire ses effectifs de 10% en deux fois pour économiser 100 à 110 millions, après avoir déjà sabré 200 millions dans ses dépenses annuelles en 2008. Baisses de salaire et congés sans solde sont également envisagés.

Pour répartir l'effort plus équitablement, le syndicat California Media Guild demande au directeur général de McClatchy, Gary Pruitt, de se contenter d'un salaire de 500 000 $ en 2009, au lieu de 1,1 million en 2007 (le montant 2008 n'est pas connu). L'intéressé n'a pas encore répondu. Gary Pruitt, qui a endetté le groupe par le rachat de journaux en 2006, a en revanche renoncé à sa prime pour 2008 et 2009, après en avoir tiré 800 000 $ en 2007.

Le prestigieux Wall Street Journal, propriété de News Corp [[|ticker sym='NWS'|]], a pour sa part récemment biffé une vingtaine de postes de sa rédaction et décrété le gel des salaires des non-syndiqués pour toute l'année.

Quant au premier groupe de presse des États-Unis, Gannett, qui publie notamment USA Today, il a supprimé 10% de ses effectifs dans la plupart de ses titres et 5% de la rédaction de USA Today en 2008 et oblige ses salariés à prendre une semaine de congé sans solde au premier trimestre de cette année.

Dans l'État de Washington, les patrons de presse demandent au Parlement régional de les exonérer temporairement de taxe professionnelle pour sauver l'emploi. «Certains d'entre nous, comme le Seattle Times, sont sur le fil du rasoir», affirme l'éditeur de ce grand quotidien, Frank Blethen.