«Nous sommes aujourd'hui au milieu d'une récession dont l'envergure et les effets foudroyants sont du jamais vu dans l'histoire de Transcontinental.»

Le fondateur du plus grand imprimeur canadien, Rémi Marcoux, a beau avoir vécu les récessions de 1981 et 1991, jamais il n'a dû procéder à de pareilles compressions de son personnel: 1500 licenciements, 10% de l'effectif. Au Québec, ça se traduit par environ 300 pertes d'emplois, autant dans le reste du Canada, environ 150 au Mexique et le reste, aux États-Unis, dont les 460 annoncées l'automne dernier.

 

Tous les secteurs sont touchés: les publications du groupe (dont le journal Les Affaires) et les services de marketing, mais c'est l'imprimerie qui doit encaisser le gros des pertes.

Une raison: ceux qui achètent de la publicité ne sont pas au rendez-vous après une période des Fêtes difficile, explique M. Marcoux, qui cite des chiffres de l'industrie. Au Canada anglais, la publicité dans les magazines a diminué de 17% en janvier par rapport à la même période l'an dernier. Dans les magazines francophones, la baisse est de 22%. «Ce sont des coupes drastiques.»

Il ajoute que la baisse est dans cet ordre de grandeur chez Transcontinental [[|ticker sym='T.TCL.A'|]] ... même s'il doit faire face à des coûts fixes. «Entre imprimer un magazine de 96 pages ou de 80 pages (parce qu'il contient moins de publicité), c'est le même nombre de personnes sur la presse, mais ce n'est pas les mêmes revenus», explique-t-il.

Dans ce contexte, le président et chef de la direction, François Olivier, a indiqué qu'il y aura «d'autres fermetures de titres (des publications) et d'usines», sans vouloir donner de détails. D'ailleurs, seulement la moitié des employés licenciés ont été avisés, les autres le seront «dans les prochaines semaines et les prochains mois», a-t-il indiqué avant l'assemblée annuelle des actionnaires.

Les banques américaines

La crise financière américaine a eu un impact direct sur les revenus de l'imprimeur, explique M. Olivier en entrevue. Des 250 millions de dollars de revenus en publipostage aux États-Unis, 60% viennent du secteur financier. Au dernier trimestre, avec la crise, ces revenus de la finance ont baissé de 30%. «Ça a fait très mal, dit-il. Ça demeure très volatil.»

En plus des licenciements, les investissements sont réduits «de façon importante». Seuls ceux qui permettent d'obtenir des contrats d'impression de journaux (The Globe and Mail et le San Francisco Chronicle, les derniers en lice) sont maintenus intégralement.

Outre ces deux derniers contrats, les affaires tournent au ralenti pour l'impression des journaux, surtout aux États-Unis, a convenu Rémi Marcoux. «On fait une pause, on va regarder où ça va, puis on verra... il y a un changement de stratégie à court terme.»

Avant de parapher de nouvelles ententes avec des quotidiens, a-t-il ajouté, il voudra s'assurer d'avoir plus d'un client avant de construire une imprimerie pour le servir, le secteur des quotidiens étant «perturbé».

Avec cette réduction de personnel, Transcontinental espère réaliser des économies annuelles de 75 millions, dont 50 millions en 2009, avant les coûts liés aux licenciements et fermetures. Les cadres supérieurs de l'entreprise sont aussi mis à contribution: ils devront prendre deux semaines de congé sans solde... mais se présenter quand même au bureau.

Pour les autres, il y a un gel d'embauches. Des congés sans solde seront aussi offerts.

Le titre souffre

L'annonce de ces mesures a eu un impact direct sur le titre de Transcontinental. À l'annonce de la nouvelle, il a clairement creusé sa perte pour finir la journée à 8,60$ à Toronto, en baisse de 4,3%. Dans la dernière année, il s'est échangé entre 20,20$ et 7,06$.

Qu'adviendra-t-il du dividende de 32 cents compte tenu de ce marché déprimé? «Mon opinion personnelle, on ne le réduira pas», a indiqué M. Marcoux, sans pouvoir s'engager au nom du conseil qu'il préside.