La maison de production Zone 3 a lancé une vaste offensive de charme au Canada anglais il y a quelques mois dans l'espoir d'exporter plusieurs de ses concepts 100% québécois.

Entre octobre et janvier, les représentants de la boîte ont participé à 10 rencontres avec des diffuseurs de Toronto, a confié Michel Bissonnette, nouveau président de Zone 3, en entrevue avec La Presse Affaires. C'est la première fois que l'entreprise tente une telle percée hors Québec.

 

«La réalité des chaînes n'est pas différente, qu'elles soient anglophones ou francophones: si on a un bon concept, on peut l'exporter», a fait valoir M. Bissonnette, qui a fondé la maison de production avec trois partenaires en 2000.

Le marché de Toronto

À Toronto, Zone 3 a tenté de vendre tant des concepts originaux que des émissions déjà diffusées au Québec, qui pourraient être adaptées en anglais.

Des séries comme Décore ta vie, dont la longue feuille de route constitue un argument de vente majeur auprès des diffuseurs, croit M. Bissonnette.

«Il y a une différence entre se présenter à Women Network et dire qu'on a un nouveau magazine de décoration, et arriver en disant: on a le succès no 1 du Canal Vie, qui roule depuis huit ans au Québec, et voici la formule», a-t-il expliqué.

Zone 3 a aussi présenté deux projets en France l'automne dernier, en plus d'entamer des discussions avec des producteurs britanniques en vue d'une possible coproduction.

Pour l'heure, malgré quelques émissions anglophones à son actif, Zone 3 réalise l'essentiel de son chiffre d'affaires de 70 millions au Québec. Depuis sa création, la boîte a produit plus de 6000 heures de télé, dont 500 l'an dernier. Plusieurs de ses créations comptent parmi les plus appréciées du petit écran québécois, comme À la di Stasio, Infoman et Ma maison Rona.

L'entreprise vient tout juste de réorganiser sa haute direction, avec l'accession de Michel Bissonnette à la présidence - il était vice-président à la création - et le remplacement de Charles Sirois par André Larin (aussi cofondateur) à la tête du conseil d'administration.

Zone 3 appartient à Télésystème et à la Caisse de dépôt et placement du Québec.

Le grand patron refuse de révéler l'ampleur du bénéfice net de Zone 3, mais il affirme que la boîte a toujours été profitable - parfois de justesse - depuis sa création. Environ 30% du chiffre d'affaires provient du Fonds canadien de la télévision et de divers crédits d'impôt.

Crise économique

La multiplication des chaînes spécialisées a créé plusieurs occasions d'affaires pour les boîtes comme Zone 3, dit M. Bissonnette.

Mais au même moment, la crise économique fait fondre les revenus publicitaires et, du coup, les budgets des diffuseurs. Il faut donc s'adapter, et vite. Par exemple en offrant plus de magazines et d'émissions de variétés que de séries dramatiques.

Zone 3 estime être bien positionnée dans le contexte actuel, avec son portefeuille diversifié.

En 2008, l'entreprise a réalisé 40% de son chiffre d'affaires avec des émissions de type magazine, 20% avec des variétés, 12% avec des fictions, 11% avec des produits jeunesse et 6% avec des documentaires. Le reste, soit 11%, a été généré par la production de spectacles et de disques.

Même si les ventes de musique décroissent année après année et que la production de spectacles comporte des risques financiers majeurs, Zone 3 tient à poursuivre ces activités. La maison a deux spectacles en préparation.

Par ailleurs, Zone 3 n'a pas encore de projets concrets qui seraient diffusés exclusivement sur le web ou les appareils sans fil comme le iPhone. L'intérêt y est, «mais le modèle économique n'est pas encore démontré», selon Bissonnette.

Télé et politique

Et qu'en est-il de l'engagement politique du nouveau président de Zone 3? Rappelons qu'il a dirigé la dernière campagne électorale du premier ministre Jean Charest, ce qui l'avait amené à prendre un congé sans solde de quelques semaines.

«L'essentiel de mon mandat, quand je l'ai fait, c'était de présider la campagne électorale, a-t-il dit. Ça n'empêche pas que, si on me demande un conseil, je vais le donner.»

Michel Bissonnette dit vouloir se consacrer à sa «première passion», la télé. «Si je voulais faire de la politique à temps plein, je me présenterais, je pourrais devenir staff.»

André Larin, le nouveau président du conseil (qui conserve aussi son poste de producteur délégué), soutient que l'engagement de M. Bissonnette n'a jamais nui à son dévouement envers Zone 3.

«S'il fait de la politique, je ne m'en aperçois pas.»

Charles Sirois, président de Télésystème, gardera un siège au CA de Zone 3 même s'il en quitte la présidence.