L'État français, qui s'apprête à renflouer les grands manufacturiers automobiles après avoir secouru les banques, n'entend pas distribuer les largesses sans peser sur la gestion des entreprises concernées.

L'État français, qui s'apprête à renflouer les grands manufacturiers automobiles après avoir secouru les banques, n'entend pas distribuer les largesses sans peser sur la gestion des entreprises concernées.

Le quotidien Les Échos rapportait jeudi que le gouvernement fait pression sur les dirigeants de Renault pour les convaincre de ne pas verser de dividendes aux actionnaires pour 2008.

«L'État estime qu'il serait particulièrement malvenu d'apporter des milliards d'euros qui seraient en partie reversés aux actionnaires, au beau milieu de la crise économique et financière», rapporte le journal économique.

Le président de l'entreprise, Carlos Ghosn, avait fait grand cas de son désir de verser un dividende substantiellement en hausse pour 2008. Mais l'effondrement du marché automobile, en recul de près de 20% en décembre par rapport à l'année précédente à l'échelle européenne, avait déjà considérablement refroidi les ardeurs de l'entreprise.

Les pressions gouvernementales surviennent à quelques jours de la tenue d'un sommet sur le secteur automobile français. Diverses mesures d'aide sont envisagées, notamment pour permettre à Renault et le géant rival, Peugeot, d'obtenir les milliards de crédit dont elles ont besoin pour favoriser leurs ventes.

Le président français Nicolas Sarkozy, dans un discours aux «forces économiques» du pays jeudi, a également fait pression sur les banques en relevant qu'il n'était pas question de leur avancer de nouveaux milliards si elles ne respectaient pas certains critères.

Il a souligné que ces entreprises devraient s'engager à financer un certain nombre de projets plutôt que d'engranger les aides pour améliorer leur capitalisation, s'abstenir à court terme de verser des dividendes et revoir la rémunération des dirigeants pour éliminer les «parachutes dorés».

Exigences timorées

Les élus socialistes font valoir depuis des semaines que les exigences du gouvernement français face aux entreprises réclamant une aide financière sont trop timorées et ne reflètent pas l'approche prise par les autres grands États européens.

Le gel des dividendes a été exigé notamment par les autorités allemandes et anglaises dans le cadre de leur plan d'aide aux banques. Washington a imposé des exigences similaires aux trois géants américains de l'automobile.

Un gestionnaire de portefeuille parisien interrogé hier par La Presse affirme que les pressions exercées par le gouvernement sur la question des dividendes constituent essentiellement «de la com» à l'intention du public.

Les actionnaires, a-t-il souligné, sont déjà largement pénalisés par la chute généralisée des actions. Et les piètres résultats enregistrés en 2008 par des entreprises comme Renault ont pratiquement rendu impossible le versement d'un dividende.

Le gouvernement, a indiqué le gestionnaire, peut mettre de l'avant ses exigences pour l'heure parce qu'il assure un important apport de capital. Mais il ne sera pas en mesure de dicter la gouverne des entreprises à long terme, ne disposant, dans le meilleur des cas, que d'une part secondaire de leurs actions.