L'économiste Benoit Durocher a beau prédire d'autres pertes d'emplois au Canada, il jure être un optimiste dans l'âme.

L'économiste Benoit Durocher a beau prédire d'autres pertes d'emplois au Canada, il jure être un optimiste dans l'âme.

«Nous pensons que le Canada est en récession et, quand on est en récession, il ne faut pas se leurrer: il y a des pertes d'emplois», explique-t-il.

L'économiste au Mouvement Desjardins n'a pas tort -autant sur son raisonnement économique que sur son état d'esprit. En effet, sa prédiction de 5000 pertes d'emplois en décembre est l'une des plus optimistes au pays. Certains de ses collègues parlent de 50 000 pertes d'emplois. Les chiffres officiels du marché du travail pour le dernier mois de 2008 seront dévoilés ce matin par Statistique Canada. En moyenne, les économistes s'attendent à 20 000 nouvelles pertes d'emplois, ce qui ferait passer le taux de chômage au pays de 6,3% à 6,5%.

Carlos Leitao, lui, n'est pas dans le camp des «optimistes». L'économiste en chef de la Banque Laurentienne s'attend à des pertes d'emplois variant entre 20 000 et 40 000 au pays en décembre. «La récession est en train de s'installer et le Québec n'est pas immunisé, dit-il. On va bientôt se rendre compte que les pertes d'emplois affecteront aussi l'économie québécoise. Au premier trimestre de 2009, ce sont surtout le Québec et l'Ontario qui vont souffrir.»

Les économistes s'entendent pour dire que l'économie canadienne ne connaîtra pas de sitôt un mois aussi désastreux qu'en novembre, alors qu'elle avait perdu 71 000 emplois. En 2009, la situation du marché du travail risque plutôt de se détériorer de façon continue. Selon le Mouvement Desjardins, le taux de chômage au Canada atteindrait 7,6% à la fin de l'année. Au Québec, il pourrait grimper jusqu'à 8,6% à l'automne. Ce serait encore pire en Ontario (8,7%).

Les mêmes économistes prédisent pourtant une lente reprise à l'économie canadienne au cours de la deuxième moitié de 2009. «Le marché du travail est toujours un peu en retard sur l'état général de l'économie, explique Benoit Durocher. Au cours des derniers mois de ralentissement économique, on s'étonnait de la vitalité du marché du travail. Le marché du travail subit maintenant les conséquences du ralentissement des derniers mois. Ce sera la même chose lors de la reprise économique: le marché du travail sera un peu en retard.»

Entre-temps, que peuvent faire les gouvernements pour enrayer les pertes d'emplois par dizaines de milliers chaque mois? Pas grand-chose, répond Benoit Durocher. Au contraire d'une crise qui secoue une industrie en particulier, une récession s'attaque presque également à toutes les sphères de l'économie.

«Comme les pertes d'emplois sont généralisées, c'est difficile pour les gouvernements de prendre des actions ciblées, dit l'économiste du Mouvement Desjardins. Le mieux que les gouvernements peuvent faire, c'est d'atténuer la récession en investissant dans les infrastructures. Les gouvernements peuvent aussi atténuer l'impact de la récession sur les gens qui perdent leur emploi, notamment en bonifiant le régime d'assurance emploi.»

États-Unis et Europe frappés sévèrement

Mince consolation, la récession mondiale frappe plus sévèrement le marché du travail aux États-Unis et en Europe. Le taux de chômage est actuellement de 6,5% aux États-Unis et 7,8% dans l'Union européenne, comparativement à 6,3% au Canada.

Hier, les mauvaises nouvelles sur le marché du travail provenaient de partout sur la planète. Au Japon, le fabricant de matériel électronique TDK supprimait 8000 emplois et le constructeur automobile Mitsubishi, 2000 emplois. L'Espagne a franchi le cap des trois millions de chômeurs pour la première fois depuis 1996. En Irlande, Dell -deuxième employeur du pays- a annoncé 1900 mises à pied ainsi que son intention de transférer sa production d'ordinateurs vers d'autres pays à moindre coût comme la Pologne.

Même le fleuron américain Google a contribué à cette vague de mauvaises nouvelles. Selon des documents de la Securities and Exchange Commission (SEC), l'entreprise réputée pour son moteur de recherche internet aurait discrètement remercié 5500 employés contractuels depuis octobre.

Google n'a pas voulu commenter cette nouvelle mise à jour par l'Agence France-Presse.

TAUX DE CHÔMAGE

Novembre 2008

Canada 6,30%

Québec 7,10%

Ontario 7,10%

États-Unis 10%

Union européenne 7,80%

Sources : Statistique Canada, U.S. Labor Department, Union européenne