Ni la chute des prix de l'énergie ni la crise financière ne mettent en danger le projet de terminal de gaz naturel liquéfié que Gaz Métro (T.GZM.UN) et ses partenaires veulent construire à Lévis.

Ni la chute des prix de l'énergie ni la crise financière ne mettent en danger le projet de terminal de gaz naturel liquéfié que Gaz Métro [[|ticker sym='T.GZM.UN'|]] et ses partenaires veulent construire à Lévis.

«Rabaska est un projet qui va voir le jour», assure Sophie Brochu, présidente-directrice générale de Gaz Métro, en entrevue avec La Presse Affaires.

«Il s'en trouve pour dire que la conjoncture actuelle prouve que Rabaska n'est pas nécessaire. Justement pas. Des infrastructures comme Rabaska, comme des projets éoliens ou des lignes électriques, ça ne se raisonne pas à court terme», dit-elle.

À court terme, la conjoncture a eu pour effet de stopper brutalement plusieurs grands projets énergétiques, dont Rabaska. Mais à long terme, le projet est logique et il se réalisera, soutient Sophie Brochu.

La signature définitive de l'entente d'approvisionnement en gaz naturel avec le géant russe Gazprom, qui devait avoir lieu à la fin de 2008, a été reportée indéfiniment. Le coeur du projet, soit la mise en valeur par Gazprom du gisement de gaz Chtokman dans la mer de Barentz, est encore une fois retardé parce que les gigantesques capitaux nécessaires sont impossibles à réunir en ce moment.

Sophie Brochu reconnaît que l'échéancier original ne tient plus. «Aujourd'hui, je suis incapable de vous dire si le projet sera reporté de plusieurs années, je ne le sais pas.»

Selon elle, il faut laisser retomber la poussière et réévaluer le projet de terminal méthanier à la lumière des nouvelles données sur les prix du pétrole et du gaz et les coûts de construction. La chute brutale du prix de l'acier fait en sorte que le coût du projet est certainement moins élevé aujourd'hui, illustre-t-elle.

Si les principaux paramètres du projet ont changé de façon brutale et imprévisible, la raison d'être de Rabaska, elle, n'a pas changé. «Il y a une réalité dure, c'est que l'Amérique du Nord détient 4% des réserves de gaz naturel du monde et consomme 30% de tout le gaz qui se consomme dans le monde.»

C'est la raison pour laquelle la présidente de Gaz Métro a la certitude que le gisement de Chtokma sera mis en valeur et que Rabaska se réalisera.

Gaz Métro, Enbridge et Gaz de France, les partenaires de Rabaska, sont prêts à accueillir Gazprom comme actionnaire du projet en échange d'un approvisionnement à long terme de gaz naturel liquéfié qui sera regazéifié au terminal de Lévis.

Le choix de Gazprom n'est pas remis en question, malgré le comportement du géant russe, qui n'a pas hésité à couper l'approvisionnement à ses clients européens pour régler son différend avec l'Ukraine.

Il n'est pas question de chercher ailleurs un autre fournisseur, assure la présidente de Gaz Métro. D'abord, parce que les Russes sont les plus importants détenteurs de gaz naturel au monde et, ensuite, parce que leurs navires qui transporteront ce gaz jusqu'à Lévis sont déjà équipés pour naviguer dans les eaux glacées.

«Si tu fais affaire avec d'autres fournisseurs qui viennent des mers chaudes, il y a un coût additionnel (les navires). L'autre avantage, c'est que la distance (vers le Canada) est plus courte pour les Russes», explique-t-elle.

Gaz Métro ne s'inquiète pas de la fiabilité de Gazprom, malgré l'expérience malheureuse vécue par les clients européens de l'entreprise qui appartient au Kremlin. «On a toujours dit qu'avec Rabaska, on cherche à diversifier notre approvisionnement. On ne sera pas à la merci d'une seule source d'approvisionnement.»

Gazprom a créé une filiale, Gazprom Marketing&Trading USA Inc., pour investir dans Rabaska. Le gaz naturel russe qui arrivera à Lévis n'est pas destiné au marché américain pour autant, jure Sophie Brochu. «Je le répète à tous ceux qui veulent bien m'entendre, si Gazprom veut aller sur le marché du nord-est des États-Unis, ce n'est pas en passant par Rabaska qu'ils peuvent le faire de façon économique.»

Le scénario le plus plausible pour Gazprom, selon elle, c'est que l'entreprise russe prenne pied à la fois au Québec, pour desservir les marchés du Québec et de l'Ontario, et dans le golfe du Mexique, pour desservir le marché américain. «Ce qu'on discute avec Gazprom, c'est du marché du Québec et du marché de l'Ontario. Pas du marché américain. Zéro.»

Le projet de terminal gazier Rabaska, dont le coût est estimé à 840 millions de dollars, est un des rares encore en vie dans l'est du pays, avec celui de Canaport au Nouveau-Brunswick qui doit commencer ses activités au deuxième trimestre de 2009.