Naguère, le Forum économique mondial (FEM) de Davos était l'occasion rêvée de grandes festivités pour les magnats de Wall Street.

Naguère, le Forum économique mondial (FEM) de Davos était l'occasion rêvée de grandes festivités pour les magnats de Wall Street.

Mais aujourd'hui, dans les turbulences de la pire crise financière depuis la Grande Dépression, les dirigeants du FEM et les délégués soutiennent que nombre des PDG qui se sont réunis à Davos, en Suisse, au cours des cinq dernières années n'ont pas prêté l'oreille aux avertissements de leurs pairs.

Les organisateurs de Davos avouent aussi qu'ils n'ont pas su faire preuve de fermeté avec les patrons de l'industrie financière; ils ont préféré accepter leur argent et transformer Davos en party rave pour les excès de Wall Street.

«La fête s'est glissée dans le Forum», dit Klaus Schwab, 70 ans, fondateur et président du FEM. «Nous avons laissé l'affaire échapper à notre attention, qui a été détournée de la vitesse et de la complexité avec lesquelles les défis se sont accumulés dans le monde», ajoute-t-il.

Moult remords

Les retombées de la crise suscitent moult remords chez les dirigeants du FEM. Tous se demandent ce qu'ils ont provoqué et, tout comme à Wall Street, s'ils n'ont pas offert trop de ce qui est bon.

M. Schwab explique que les délégués l'ont traité comme une «Cassandre» chaque fois qu'il remettait en question la logique de leur approche en ce qui concerne la bulle des prix des actifs dans l'immobilier, les actions et d'autres instruments financiers.

De son côté, Kevin Steinberg, chef de l'exploitation du FEM, indique que les fortes sommes dépensées par les célébrités de Wall Street à Davos ont contribué à la complaisance manifestée par les organisateurs du forum et les ont souvent obligés à endosser publiquement leurs points de vue, leurs souhaits et leur statut de superstars invitées.

Satisfaction des désirs

«Nous avons satisfait aux désirs des leaders financiers: des tranches horaires pour qu'ils puissent s'exprimer en solo, des hôtels de luxe et un traitement d'hôtes de marque que nous ne pourrions réserver à ersonne d'autre, dit M. Steinberg, 38 ans. Nous leur avons fourni une tribune. Ce n'était que de la politique. Nous tentons d'éviter la politique, mais nous ne réussissons pas.»

Dans son bureau hors de Genève, à environ trois heures de route de Davos, M. Schwab indique que le FEM a commencé à émettre des avertissements en 2003 aux banques d'affaires, aux compagnies d'assurances et aux fonds spéculatifs quant au risque systémique qui rongeait les fondements de l'économie mondiale.

«Mais la communauté financière n'a pas écouté», dit M.Schwab.

«On leur a dit, poursuit-il, que tout examen sérieux des éléments économiques fondamentaux démontrait que nous étions dans une situation instable. Ce n'était que du déni, du déni psychologique total.»

En ce qui concerne l'an prochain, M. Schwab dit qu'il veut transformer Davos en «Bretton Woods du nouveau millénaire», une rencontre destinée à mettre en place un nouvel ensemble de règles mondiales pour les relations commerciales et financières, tout comme la conférence originale de Bretton Woods, au New Hampshire, l'avait fait au cours de l'été 1944.