Jacques Lamarre n'en fait pas un mystère. SNC-Lavalin (T.SNC) sautera sur l'occasion d'acquérir en tout ou en partie Énergie atomique du Canada, si le gouvernement fédéral décide de privatiser la société d'État.

Jacques Lamarre n'en fait pas un mystère. SNC-Lavalin [[|ticker sym='T.SNC'|]] sautera sur l'occasion d'acquérir en tout ou en partie Énergie atomique du Canada, si le gouvernement fédéral décide de privatiser la société d'État.

«C'est une excellente technologie et c'est une excellente société. On pense que c'est des techniciens très valables et on aurait un intérêt, a fait savoir le grand patron de la firme de génie-conseil lors d'une entrevue à La Presse. Mais on voudrait le faire dans un contexte où tout le monde serait heureux, on ne veut pas le faire contre les dirigeants d'EACL».

La filiale nucléaire de SNC-Lavalin, dirigée par son fils Patrick Lamarre, travaille déjà en étroite collaboration avec Énergie atomique du Canada Limitée (EACL), comme membre du consortium Team Candu, avec General Electric, Hitachi et Babcock&Wilcox.

Ce partenariat satisfait Jacques Lamarre, qui se dit prêt à le poursuivre en tant qu'actionnaire minoritaire d'EACL, si Ottawa choisit une privatisation partielle. Mais si le gouvernement veut tout vendre, il se dit prêt à tout acheter. «Nous autres, on est prêts aussi à acheter EACL au complet. On les aime. Mais ça dépend quel prix on paie.»

Une industrie d'avenir

Idéalement, SNC-Lavalin voudrait faire avec EACL ce que Bombardier a fait avec Canadair: l'acheter pas cher et lui donner un souffle nouveau. «Par contre, si le gouvernement veut une fortune pour ça, ça va être d'autres intérêts qui vont venir (l'acheter).»

Pour le président et chef de la direction de SNC-Lavalin, le nucléaire est une industrie d'avenir, qui a été abandonnée par le gouvernement. «C'est la forme d'énergie qui a le moins d'impact sur l'environnement», souligne-t-il.

Quoiqu'il arrive avec EACL, le gouvernement doit continuer d'investir dans le nucléaire, estime Jacques Lamarre, parce que c'est un secteur qui peut contribuer énormément à l'économie canadienne. «C'est bon que le gouvernement réinvestisse dans le nucléaire. C'est une industrie du futur et ce serait dommage si on perdait ça au Canada.»

Le Canada est peut-être un petit acteur, mais au moins il existe. «Sans faire d'effort, le Canada a construit 10 à 15% des centrales nucléaires dans le monde, illustre-t-il, alors s'il faisait un effort, c'est un secteur qui pourrait être un très gros contributeur sur le plan économique.»

Partout dans le monde, l'énergie nucléaire connaît une nouvelle popularité. En Ontario, où au moins deux autres centrales nucléaires seront construites et peut-être quatre, le gouvernement a choisi d'aller en appel d'offres. Ça veut dire que, pour la première fois, la technologie Candu et SNC-Lavalin devront faire face à la concurrence sur leur propre terrain. La société française Areva et l'américaine Westinghouse, entre autres, sont attirées par ce juteux contrat.

«Une vraie folie», s'exclame Jacques Lamarre, avant d'ajouter qu'il s'agit d'une boutade. Cela dit, l'ingénieur comprend difficilement pourquoi le Canada ne favorise pas sa propre technologie, comme le font tous les pays du monde.

«Je crois que la meilleure façon pour un gouvernement de développer son économie, c'est par sa politique d'achat et d'approvisionnement», dit-il. C'est comme ça partout dans le monde, selon lui, et SNC-Lavalin évite pour cette raison de faire des soumissions dans certains pays européens parce que l'entreprise sait qu'elle n'a aucune chance.

Jacques Lamarre ne s'en offusque pas. «C'est la vie», dit-il, philosophe. Au Québec, où Hydro-Québec s'apprête à revamper sa centrale nucléaire Gentilly-2 au coût de 2 milliards, SNC-Lavalin aura une bonne part du gâteau sans avoir à affronter la concurrence. C'est une réfection et non la construction d'une nouvelle centrale, explique Jacques Lamarre. «On aura probablement un mandat d'assistance technique.»

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