Près d'une dizaine de travailleurs de l'ancienne usine du Saguenay-Lac-Saint-Jean ont revu le même mauvais film le 29 novembre dernier.

Près d'une dizaine de travailleurs de l'ancienne usine du Saguenay-Lac-Saint-Jean ont revu le même mauvais film le 29 novembre dernier.

Ils doivent reprendre leurs esprits, refaire leur baluchon et repartir à la recherche d'un emploi.

«Personnellement, j'ai trouvé ça moins pire que la première fois», mentionne M. Carrier.

«Le gros coup, je l'ai mangé à Port-Alfred. Je pensais y passer ma vie! Quand ça t'arrive à 43 ans, tu te sens un peu déboussolé. Tu te poses plein de questions. Maintenant, je sais que je pourrai me replacer ailleurs», mentionne-t-il. «Je sais qu'il y a autre chose après, parce que je suis passé par là.»

Les anciens de Port-Alfred n'ont pas tous adopté la même stratégie lorsqu'ils ont été transférés à Shawinigan. Un groupe de trois travailleurs, soit M. Carrier, Richard Gobeil et Guy Boudreault, se sont loué un appartement pour avoir un pied-à-terre en ville. D'autres ont déménagé à Shawinigan ou dans les environs.

Fini la stabilité

M. Carrier a connu l'enviable stabilité de la grande entreprise avant d'être déjoué par Abitibi-Consolidated en 2003. Depuis ce temps, les emplois et les kilomètres s'accumulent au compteur.

«Après 24 ans à Port-Alfred, j'ai suivi mon DEP en pâtes et papiers», explique-t-il.

«J'ai ensuite obtenu un emploi pour Cascades, à Saint-Jérôme. J'y suis resté un an, puis j'ai été mis à pied en raison de la fermeture d'une machine. Mais au même moment, Belgo m'a téléphoné. Ça tombait bien, puisque nous avions trois ans pour nous replacer dans une autre usine pour garder notre fonds de pension et nos avantages sociaux.»

M. Carrier est entré à la Belgo en novembre 2005 et deux ans plus tard, il apprenait qu'il devait tout recommencer. Il se félicite aujourd'hui de ne pas avoir demandé à sa famille de déménager à Shawinigan.

«Ma femme avait son travail à La Baie», explique-t-il.

«Il y a bien du monde qui me demandait si je déménagerais un jour, mais je n'étais pas encore prêt. Tant que je ne me tannerais pas de me promener, j'étais prêt à continuer.»

«C'est sûr que je suis content de ma décision», poursuit-il. «Aujourd'hui, ce serait plus difficile! Je vais essayer de me trouver autre chose dans ma région. Je me suis aussi inscrit à un cours de routier.»

Malgré ses multiples déveines, M. Carrier ne dirait pas non à un nouvel emploi dans le secteur des pâtes et papiers... au Saguenay-Lac-Saint-Jean.

«Je n'irais plus à l'extérieur pour faire du papier», assure-t-il.

«À 15 minutes de chez moi, ça vaudrait la peine d'essayer parce que ça reste un travail payant. Mais en général, les pâtes et papiers, ça représente un gros danger.»

M. Carrier assure qu'il ne regrette rien de sa courte expérience à Shawinigan, bien qu'elle se termine en queue de poisson. Il s'était présenté à la Belgo plein de bonnes intentions... bien qu'il n'avait pas été très impressionné par les installations.

«Quand je suis arrivé à l'usine la première fois, je trouvais ça assez vieux!», se remémore-t-il.

«Mais il y avait de l'ouvrage en masse, on faisait des heures supplémentaires. On me disait que ça avait toujours fonctionné comme ça. Je pensais au moins me rendre à ma retraite. Les gens de la Mauricie sont très sympathiques», assure-t-il.

«Les gars de Port-Alfred avaient été reçus à l'usine les bras ouverts. Nous étions acceptés tout de suite dans la famille. Quand on sortait dans les bars, nous étions toujours bien accueillis. Les gens étaient gentils; je me suis fait des amis.»

La nostalgie passée, l'homme de 47 ans doit regarder en avant.

«Il y a des gens qui vont me manquer, mais la vie continue», termine-t-il. «J'ai deux ados chez nous. Il faut que l'argent rentre.»