Diagnocure, AEterna-Zentaris, Anapharm sont des fleurons de l'industrie biopharmaceutique à Québec. Toutes trois sont d'ailleurs inscrites en Bourse. Mais aurait-il été possible de démarrer ces entreprises en 2006 ?

Diagnocure, AEterna-Zentaris, Anapharm sont des fleurons de l'industrie biopharmaceutique à Québec. Toutes trois sont d'ailleurs inscrites en Bourse. Mais aurait-il été possible de démarrer ces entreprises en 2006 ?

"Pour parler franchement, je pense que non, déclare le président de BioContact, Martin Godbout, pour la simple et bonne raison que les capitaux de démarrage ne sont plus là. Et quand les investisseurs décident de mettre des sous, avance M. Godbout, ils exigent d'avoir des rendements au bout de cinq ans alors qu'une compagnie du secteur des biopharms a besoin d'au minimum 10 ans pour produire quelque chose. Par contre, si vous savez être patients, ce sont des entreprises qui peuvent devenir extrêmement payantes."

Or l'annonce faite hier par le ministre du Développement économique Raymond Bachand de créer un fonds d'investissement de 100 millions $ pour l'industrie des sciences de la vie peut-elle changer la donne ? Même si Martin Godbout juge que c'est une excellente nouvelle, il ajoute du même souffle que ce n'est pas assez. Imaginez un peu qu'il en coûte au minimum 900 millions $US pour produire un médicament et l'amener jusque dans les officines de pharmacies. Des sommes colossales qui, selon lui, exigent énormément de patience de la part des investisseurs. Ce que la plupart n'ont pas, dit-il. À partir de ce constat, les PME qui veulent progresser n'ont donc d'autre choix que de négocier des partenariats, des alliances ou encore de vendre leurs brevets. Même les multinationales ont adopté cette stratégie, poursuit M. Godbout, parce qu'elles ne peuvent faire autrement. Souvent, il est plus rentable pour une grosse compagnie comme Shire, Merck ou Glaxo d'acheter un brevet de plusieurs millions que de créer elle-même un produit. Et c'est un modèle d'affaire qui, après tout n'est pas si mal, lance-t-il.

Symposium BioContact

D'où l'intérêt que présente, à ses yeux, le symposium BioContact de Québec qui met en présence chercheurs et investisseurs dans le seul but de leur faire brasser des affaires. Ici les compagnies qui présentent des produits ayant effectué des études cliniques de phase deux et trois sont presque assurées de nouer des alliances, avance M. Godbout, parce que les multinationales de la biopharmaceutique sont ici et recherchent des produits matures prêts à être commercialisés.

Devant les 1000 participants de BioContact, le vice-président des laboratoires de recherches Merck, le Dr Robert J. Gould, a d'ailleurs confirmé que la stratégie des multinationales était maintenant de s'associer à de bons partenaires. Mais encore faut-il que l'association soit réussie, a-t-il ajouté. Selon lui, le défi se révèle de plus en plus grand parce que les petites compagnies ont des exigences et imposent de multiples conditions. Pour lui, c'est une évidence que les bons partenariats nécessitent beaucoup de respect, sinon oubliez toute possibilité de collaboration et de partage.

Martin Godbout mentionne pour sa part que les biotechs de Québec qui ont réussi ont à peu près toutes des partenaires d'affaires. Mais l'exemple le plus spectaculaire à ses yeux est celui de Biochem Vaccin. Alors qu'il était président d'Innovatech au début des années 90, Martin Godbout avec d'autres investisseurs a pris le risque d'injecter 15 millions $ dans un projet d'usine de vaccins. Quelques années plus tard, l'entreprise Biochem et l'usine étaient rachetées par Shire, puis par ID Biomedical. L'an passé, Glaxo a fait l'acquisition d'ID Biomedical pour une somme dépassant le milliard de dollars. Mais le beau de l'histoire, insiste M. Godbout c'est que l'usine de vaccins est toujours à Québec, qu'on y a investi quelque 100 millions $ pour sa modernisation et qu'elle emploie maintenant près de 200 personnes.

lfournier@lesoleil.com

© 2006 Le Soleil. Tous droits réservés.