L'imbroglio du papier commercial vient de rattraper la Banque Nationale. Vendredi, une première poursuite a été déposée contre l'institution en Cour supérieure par le groupe Ace Mortgage.

L'imbroglio du papier commercial vient de rattraper la Banque Nationale. Vendredi, une première poursuite a été déposée contre l'institution en Cour supérieure par le groupe Ace Mortgage.

Ce groupe de Montréal, qui oeuvre dans le financement hypothécaire, réclame 12,5 millions de dollars à la Banque, soit la somme investie par son entremise dans divers papiers commerciaux.

Cette somme a été investie quelques jours avant la crise qui a secouée le marché le 15 août dernier.

À l'époque, rappelons-le, l'ensemble du marché du papier commercial non bancaire a été gelé au Canada, empêchant les investisseurs de liquider leurs titres.

Globalement, les investisseurs en détenaient pour quelque 35 milliards de dollars, avec la Caisse de dépôt comme plus important investisseur (13,2 milliards).

Peu après le début de la crise, la Banque Nationale a rassuré ses clients, promettant de les rembourser.

De fait, le 20 août, elle s'est engagée à rembourser tous les particuliers, de même que toutes les entreprises détenant moins de 2 millions de dollars de papier commercial vendus par son entremise. Au total, l'opération a coûté 2,1 milliards de dollars à l'institution.

La Banque ne s'est toutefois pas engagée à rembourser ses plus gros clients, comme Jean Coutu et Air Transat, soutenant notamment que de tels clients étaient en mesure de connaître le risque. Ace Mortgage fait partie de ce groupe.

Récemment, un comité d'investisseurs, avec l'appui de la Caisse de dépôt, a réussi à conclure une entente pour dégeler ce marché. L'entente doit toutefois être approuvée par un vote, prochainement.

La poursuite contre la Banque Nationale a plus précisément été intentée par Hy Bloom inc. et Carcadian Mortgage Services, deux firmes qui font partie d'un groupe connu sous le nom de Ace Mortgage Corporation.

Dans sa poursuite, le groupe soutient que la Banque lui a vendu ce produit comme étant sûr et liquide, ce qui ne fut pas le cas. Au moment de la crise, l'institution aurait promis de le rembourser à plusieurs reprises, mais sans y donner suite. Le papier est échu depuis le début septembre.

En octobre, le groupe apprend avec «consternation» de la Banque que ce papier avait une échéance extensible, contrairement à ce qu'on lui avait dit. Plus encore: l'aspect extensible de l'échéance - jusqu'à un an - avait soi-disant été réclamé par Ace.

Ces propos sont une «grossière déformation de la réalité. La Nationale tentait ainsi de surseoir à ses propres responsabilités et d'excuser son incompétence et son manque de bonne foi», affirme le poursuivant.

ACE trouve d'autant plus inadmissible le comportement de la Banque qu'elle a d'étroites relations avec les intermédiaires qui ont émis le papier.

Qui plus est, la Banque aurait dû savoir qu'une crise était imminente. À cet égard, la requête reprend un reportage d'un quotidien torontois selon lequel la Caisse de dépôt aurait cherché à réduire sa position avant la crise.

«La Nationale a décidé de s'en laver les mains», est-il écrit dans la requête.

À la Banque Nationale, on ne veut pas commenter le dossier, compte tenu des démarches devant les tribunaux. Le porte-parole, Denis Dubé, confirme qu'il s'agit d'une première poursuite.

Par contre, il ne nie pas avoir reçu des mises en demeure de la part de deux autres clients, nommément Air Transat et le Groupe Jean Coutu.

«Nous travaillons avec eux pour trouver des solutions», dit-il.

Le groupe ACE est essentiellement détenu par les familles juives Bloom et Dubrovsky. Dans le milieu du financement, Ace est réputée pour être l'une des firmes les plus aguerries dans l'immobilier à Montréal, notamment dans le financement hypothécaire de second rang.

L'entreprise a gagné ses gallons dans les années 60 en finançant les automobiles, avant même que les grandes banques ne s'engagent dans ce marché.