La hausse du prix du pétrole a parfois de curieux effets. Vélos, métro, autobus et scooters ont connu un nouveau souffle avec un litre d'essence frisant les 1,50$. Voici maintenant qu'on tente de faire revivre le transport à voile.

La hausse du prix du pétrole a parfois de curieux effets. Vélos, métro, autobus et scooters ont connu un nouveau souffle avec un litre d'essence frisant les 1,50$. Voici maintenant qu'on tente de faire revivre le transport à voile.

Amarré dans le Vieux-Port de Montréal ces jours-ci, le voilier Belem a fait le trajet de la France au Québec avec à son bord une cargaison de vin, une façon de faire moins romantique qu'il n'y paraît au premier abord.

«Au départ, nous le faisions pour des raisons strictement écologiques, mais plus le prix du pétrole augmente, plus la logique économique de l'affaire devient évidente», explique le PDG de la Compagnie de transport à la voile (CTMV), Frédéric Albert.

CTMV a profité du passage du Belem au Québec pour se faire connaître. L'entreprise affiche pour l'heure un chiffre d'affaires de 4 millions d'euros et emploie quatre personnes. Encore seule dans son créneau, elle exploite une flotte de sept voiliers affrétés d'une cinquantaine de mètres de longueur.

Ses liaisons se limitent pour l'instant à la France et aux îles britanniques, mais ce ne pourrait être qu'un début.

De plus en plus concurrentiel

Alors qu'il en coûtait 30% plus cher il y a un an pour transporter des marchandises par bateau à voile, cette surprime s'est réduite à 15% cette année et pourrait bien se transformer en rabais avec le baril de light sweet crude à 200$US évoqué par certains analystes.

«Chaque nouvelle hausse du prix du pétrole est une très bonne nouvelle pour nous», reconnaît M. Albert.

Signe que l'intérêt pour le transport à voile dépasse le cercle des mordus de l'environnement, sa petite entreprise a conclu récemment une entente avec le groupe Pernod-Ricard pour transporter 10% des whiskies Jamieson et Chivas entre l'Irlande et la France.

Le géant mondial du transport de vin JF Hillbrand se serait aussi montré intéressé par le moyen de transport propre de CTMV.

Explosion des coûts de transport

La hausse des coûts du transport par cargo est réelle et force les armateurs à explorer des solutions de rechange au navire fonctionnant seulement au pétrole.

Depuis décembre 2005, le coût du fret par cargo a plus que quadruplé, selon l'indice de référence Baltic Dry.

Pour réaliser des économies, on a vu récemment des navires cargos bi-énergie faire leur apparition, propulsés à la fois par une voile et par un moteur.

Les autorités portuaires du monde entier étaient d'ailleurs réunies hier à Amsterdam pour tenter de trouver des moyens de réduire leur dépendance au pétrole. Réduction de vitesse, hélices aérodynamiques plus performantes et meilleur entretien des navires étaient à l'ordre du jour.

Délais plus longs

Reste évidemment les délais de transport plus longs avec le transport à voile, qui ne peuvent convenir à toutes les marchandises.

Le Belem a mis trois semaines à traverser l'Atlantique. Un cargo met sept jours à parcourir la même distance.

«Nous voulons nous concentrer sur les produits fins, comme le café, le thé, l'alcool», dit M. Albert.

«Pour le vin, c'est même mieux, plaide-t-il. Un mois en mer équivaut à un an de vieillissement en cave, sans que le vin change de couleur.»

À la Société des alcools du Québec, on se dit intéressé par l'initiative de CTMV.

«Le transport à la voile est appelé à croître. Nous devons rencontrer les dirigeants de CTMV pour voir comment nous pourrions travailler ensemble dans l'avenir», confirme Linda Rouleau, porte-parole à la SAQ.

«Nous sommes sensibles à tout moyen de transport écologique», rappelle-t-elle.