Les travailleurs de l'aluminium du Saguenay ont reçu comme un coup de masse les propos des dirigeants de Rio Tinto Alcan, qui ont confirmé jeudi ne pas s'attendre à développer le secteur de la deuxième et de la troisième transformation dans la région.

Les travailleurs de l'aluminium du Saguenay ont reçu comme un coup de masse les propos des dirigeants de Rio Tinto Alcan, qui ont confirmé jeudi ne pas s'attendre à développer le secteur de la deuxième et de la troisième transformation dans la région.

Dick Evans et Tom Albanese, respectivement patrons de Rio Tinto Alcan et de Rio Tinto, ont rappelé que les succès dans ce domaine avaient été jusqu'à maintenant «limités».

Ils ont cité les problèmes rencontrés dans la fabrication de pare-chocs, un marché qui s'est développé «plutôt lentement» à cause de la distance qui sépare le Saguenay de l'industrie automobile.

Jean-Marc Crevier, conseiller de la FTQ dans la région, avait la mine basse après avoir lu leurs propos dans La Presse d'hier.

«Je dois vous avouer que pour quelqu'un qui travaille pour la Vallée de l'aluminium depuis plusieurs années, c'est décourageant; je trouve ça tout de même assez écoeurant», a-t-il confié.

«On est extrêmement préoccupés, je ne vois pas comment on pourrait être rassurés», a de son côté lancé Alain Proulx, directeur régional des TCA au Saguenay.

Les engagements

Alcan s'est engagée en décembre dernier à investir 2,1 milliards à Saguenay pour développer une aluminerie ultramoderne utilisant la technologie AP50.

L'entreprise a alors conclu une «entente de continuité» avec le gouvernement du Québec, qui a prolongé ses contrats d'approvisionnements en électricité.

Alcan a offert en échange des garanties quant à ses investissements dans la région (que son nouveau propriétaire, Rio Tinto, s'est engagé à respecter).

Or, les syndiqués auraient voulu que Québec exige aussi d'Alcan la création d'un nombre minimum d'emplois en deuxième et troisième transformation, un secteur à forte valeur ajoutée. Ce qui n'a pas été fait.

«On est persuadé que politiquement, c'est vraiment baisser les bras», a lancé Alain Proulx.

Selon le syndicaliste, l'État aurait pu conclure avec Alcan une entente similaire à celle qu'il a signée en 2002 avec le consortium Alouette (dont Alcan est actionnaires à 40%).

Cette entente a octroyé au consortium un bloc d'énergie de 500 mégawatts à bas tarif pour lui permettre d'agrandir son aluminerie de Sept-Îles, en contrepartie d'un engagement à créer 1010 emplois en deuxième et troisième transformation d'ici 2012. Des pénalités de 100 000$ par emploi non créé sont prévues.

Le ministre du Développement économique et de l'Innovation, Raymond Bachand, n'a pu se libérer pour parler à La Presse Affaires vendredi.

Québec s'attend toutefois à ce que des jobs en deuxième et troisième transformation soient créés au Saguenay, même si aucun objectif chiffré n'apparaît au contrat, a souligné son attachée de presse, Isabelle Mignault.

«Évidemment, on s'attend qu'avec un certain nombre d'investissements prévus, il y ait forcément un certain niveau d'emploi», a-t-elle dit.

Le pôle mondial

Le découragement n'était pas généralisé vendredi au Saguenay.

Luc Roby, directeur général de la Vallée de l'Aluminium (une organisation qui vise à positionner la région comme un pôle mondial de l'industrie), rappelle que c'est aux PME, et non à Rio Tinto Alcan, qu'il incombe désormais de développer le secteur de la deuxième et troisième transformation.

«À nous maintenant de continuer les efforts et de la développer, cette Vallée de l'aluminium, qui existe et qui ne s'arrêtera pas», a-t-il dit, confiant.

Depuis 2000, 23 PME ont été créées dans les secteurs de la deuxième et troisième transformation et du recyclage de l'aluminium, a souligné M. Roby.

En tout, la région compte quelque 2000 emplois liés à cette industrie, a-t-il dit.