Autorité des marchés financiers 6, Vincent Lacroix 0. C'est la marque finale qui aurait été inscrite si l'appel du verdict de culpabilité de l'ancien PDG de Norbourg était un match de hockey.

Autorité des marchés financiers 6, Vincent Lacroix 0. C'est la marque finale qui aurait été inscrite si l'appel du verdict de culpabilité de l'ancien PDG de Norbourg était un match de hockey.

En effet, tous motifs invoqués par M. Lacroix pour contester an appel le jugement prononcé le 28 janvier sur 51 chefs d'accusation ont été rejetés du revers de la main par le juge Réjean Paul.

Ce magistrat de la Cour supérieure du Québec a, dans sa décision, a confirmé la validité du verdict de Claude Leblond, de la Cour du Québec.

D'entrée de jeu, le juge Paul n'a pas affiché de sympathie envers le prisonnier.

«Bien évidemment, dit Réjean Paul, l'appelant qui n'est pas dépourvu intellectuellement, loin de là, a tenté de jouer à l'avocat dans le secret espoir, il me semble, que cette façon de procéder attirerait la sympathie du tribunal de première instance ou serait, dans le cas contraire, génératrice de délais.»

«Le tribunal, ajoute le juge, n'est aucunement enclin à jouer à l'autruche dans ce dossier: l'appelant a manifestement privé des milliers de petits investisseurs de 115 M$, grâce à ses magouilles incroyables aboutissant à des retraits irréguliers révélées lors de son procès et il n'est pas question qu'il obtienne des délais additionnels à cause de sa conduite adoptée lors de son procès.»

En premier lieu, Vincent Lacroix estimait dans son avis d'appel qu'il aurait dû disposer d'un avocat payé par l'État afin de se défendre.

«Avec la prodigalité dont a fait preuve l'appelant à l'égard de plusieurs membres de sa famille grâce à l'argent des investisseurs, lance le juge Paul, Vincent Lacroix n'avait qu'à se tourner vers ses proches pour retenir les services d'un avocat.»

Le motif selon lequel l'Autorité des marchés financiers était en conflit d'intérêts dans l'affaire Norbourg n'a pas convaincu le juge non plus. Il se réfère au verdict de culpabilité prononcé le 11 décembre par le juge Leblond sur cet aspect pour dire que son rôle de défenderesse dans un recours collectif ne l'empêchait pas d'intenter des poursuites.

Réjean Paul a aussi rejeté le motif selon lequel Claude Leblond aurait erré en n'accordant pas au PDG déchu un procès devant juge et jury.

Quant à l'idée que la publicité et la couverture médiatique ayant précédé le procès pénal aient pu influencer le juge Leblond, Réjean Paul rétorque que «le 26 février, j'ai indiqué à l'appelant que devant juge seul, la publicité, même tapageuse, n'a aucun impact et que ce motif d'appel ne tient pas la route.»

Vincent Lacroix alléguait de plus que les questions posées par le juge Leblond à l'étape des plaidoiries sur la preuve l'ont privé de son droit au silence, minant sa cause.

À cela, le juge Paul répond qu'«il a été dûment avertit que, s'il le désirait, il n'avait aucunement à répondre aux questions du juge Leblond. L'on ne peut pas d'une part accepter de répondre aux questions du juge lorsque l'on n'y est pas forcé et d'autre part lui reprocher de s'être livré à cet exercice, si l'on y a consenti.»

«Le tribunal, ajoute le magistrat, ne voit rien d'irrégulier ou d'anormal dans cette façon de procéder. Si le juge de première instance avait sommé l'intimé de répondre à ses questions, il en aurait été tout autrement.»

Le refus d'entendre les témoins de l'AMF assignés par Vincent Lacroix au procès n'a été un enjeu mardi car M. Lacroix a lancé la serviette sur ce point. Il a fait parvenir au juge une lettre par l'entremise de sa soeur Stéphanie Lacroix, affirmant qu'il ne reformulerait pas ce motif d'appel.

Enfin, Réjean Paul note que Vincent Lacroix a indiqué son intention de contester la constitutionnalité de certains articles de la Loi sur les valeurs mobilières. Rappelons que quelques jours avant le jugement du 28 janvier, il avait demandé un report de sa sentence car il voulait s'en prendre à la législation pénale qui entraînait «des peines de nature criminelle».

À cela, le juge Paul réplique que «dans un jugement d'excellente facture rendu le 28 janvier, le juge Leblond rejetait une demande de remise déguisée. Il est tout de même étrange qu'après avoir consulté un avocat en début de procès pour les requêtes préliminaires, l'intimé attende d'avoir été trouvé coupable pour tenter un ultime recours afin de repousser l'imposition des peines.»

Il indique aussi que l'on ne peut soulever la question pour la première fois au stade de l'appel. Le juge refuse toutefois de se prononcer sur la sentence, estimant qu'il faut s'en remettre au processus d'appel déjà enclenché.

Le juge a fixé au 28 mars l'audience pro forma (pour la forme) qui permettra de fixer un échéancier pour l'examen de l'avis d'appel sur la sentence de 12 ans moins un jour.