Jeune, Gérald Tremblay rêvait de laisser sa trace quelque part dans l'histoire des avocats du Québec. Comme nouveau bâtonnier, il a l'occasion de réaliser son rêve.

Jeune, Gérald Tremblay rêvait de laisser sa trace quelque part dans l'histoire des avocats du Québec. Comme nouveau bâtonnier, il a l'occasion de réaliser son rêve.

L'avocat Gérald Tremblay ne fait jamais les choses à moitié. Il y a cinq ans, alors qu'il aurait pu se prélasser au soleil durant quelques mois de sabbatique, il a plutôt décidé de s'envoler pour l'Europe. Direction? Le pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle. Seul, durant 21 jours, il a parcouru 470 kilomètres. À pied!

"J'y ai trouvé la paix intérieure" explique le nouveau bâtonnier du Québec, 64 ans, en recevant La Presse dans une salle de conférence de la Maison du Barreau, à Montréal.

C'est peut-être pour retrouver cette "paix intérieure" que cet associé de McCarthy Tétrault, reconnu comme l'un des meilleurs plaideurs au Canada, a accepté la direction du Barreau. Après une carrière en pratique privée de près 40 ans, il avait envie d'apporter sa contribution au service public, rendre un peu à cette profession qui lui a tant donné. Surtout, il avait le goût de défendre des causes plus larges que celles qui impliquent des clients.

"Lorsqu'on travaille dans un grand cabinet, on n'a pas le temps de s'élever au-dessus de la mêlée pour penser à de plus grands enjeux", dit-il.

Ceux qui le connaissent sont ravis de sa nomination. "Ça fait longtemps qu'on attendait un bâtonnier de ce calibre", dit Michel Décary, associé de Stikeman Elliott, qui a eu l'occasion de croiser le fer avec lui dans plusieurs dossiers. Il soutient que le nouveau bâtonnier a un très grand sens de la justice et qu'il sera capable de mettre l'intérêt public au-dessus de celui des avocats.

"Gérald est un avocat d'envergure qui ne passe pas inaperçu", ajoute l'associé Simon Potter, son collègue chez McCarthy Tétrault. Il fait remarquer que le nouveau bâtonnier a l'avantage d'être très connu partout au Canada et même aux États-Unis. "Ce qui est bon pour le Barreau du Québec, qui a parfois tendance à s'isoler."

Pour Gérald Tremblay, accepter la direction du Barreau, c'est un peu comme un deuxième pèlerinage, comme partir à la recherche de quelque chose qui lui a longtemps manqué. Car il explique qu'il a toujours eu la hantise de ne pas réaliser ses rêves, dont celui de laisser sa trace dans la profession, d'une façon ou d'une autre.

"Au Barreau, j'ai l'occasion de réaliser une partie de mes rêves d'enfance."

Le plan Tremblay

Cela dit, le nouveau bâtonnier a les pieds sur terre. Et il a des objectifs et un plan d'action pour les réaliser. Un de ses chevaux de bataille sera de s'attaquer à l'épineux et récurrent problème des délais et des coûts de la justice, encore beaucoup trop longs et onéreux au dire d'à peu près tout le monde.

Selon lui, une partie de la solution réside dans la concertation entre le gouvernement, la magistrature et le Barreau. "Rien ne pourra fonctionner sans l'adhésion de tout le monde", dit-il. Il explique que, comme bâtonnier, il aura justement pour rôle de servir d'interface entre les avocats et le gouvernement, entre les avocats et la magistrature.

Mais pourra-t-il le faire? Ceux qui le connaissent et l'ont vu plaider n'en doutent aucunement.

"Gérald est un rassembleur", dit l'ancien juge en chef de la Cour d'appel du Québec, Pierre Michaud, aujourd'hui avocat-conseil chez Ogilvy Renault. Il soutient que le nouveau bâtonnier est à l'écoute des autres et a cette capacité de rassembler les gens aux intérêts disparates.

Gérald Tremblay est d'avis que le système de justice permet présentement trop d'experts, et qu'une façon de réduire les coûts et les délais serait justement d'en réduire le nombre. Il suggère, par exemple, qu'au lieu d'avoir trois experts lors d'une cause, les parties pourraient s'entendre pour choisir ensemble un seul expert. "Ça écourterait le débat et réduirait les coûts."

Deux projets-pilotes sont d'ailleurs en cours à Laval et à Québec, et si cela s'avérait concluant, on pourrait signer sous peu un accord entre le Barreau et la magistrature pour étendre le concept partout au Québec.

Gérald Tremblay veut aussi promouvoir l'utilisation de la technologie au service de la justice. Beaucoup de choses, dit-il, peuvent être faites au téléphone et par vidéoconférence afin d'éviter le déplacement des avocats et des parties. Encore là, des efforts de concertation entre avocats, juges et ministère de la Justice devront être faits.

Un autre dossier chaud pour le bâtonnier est la formation continue. Car dès avril 2009, tous les avocats du Québec devront suivre des cours de mise à jour, cours approuvés par le Barreau. Gérald Tremblay a bien l'intention de suivre cela de près, notamment en s'assurant que les budgets soient débloqués pour le recrutement des profs et que les programmes de formation soient adéquats.

"Dans le fond, mon rôle ressemble à celui de PDG d'une entreprise", dit-il.

L'histoire ne dit pas si plus jeune il rêvait aussi de devenir PDG...

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