Henri-Paul Rousseau a carrément volé la vedette à l'ancien président de la Réserve fédérale américaine Alan Greenspan.

Henri-Paul Rousseau a carrément volé la vedette à l'ancien président de la Réserve fédérale américaine Alan Greenspan.

Le tout Québec Inc. s'était réuni au Palais des congrès de Montréal hier midi pour entendre l'influent Américain. Mais avant et après le discours, les discussions ont plutôt porté sur le départ inopiné du président et chef de la direction de la Caisse de dépôt et placement du Québec.

«Je suis très surpris, a commenté le président-directeur général du Fonds de solidarité FTQ, Yvon Bolduc. C'est un homme extrêmement intelligent qui comprend les enjeux rapidement et qui a fait preuve d'un leadership assez extraordinaire dans la question du papier commercial. C'est une perte pour la caisse et l'économie du Québec, mais c'est un gain pour Power Corporation.»

Jean Coutu, le fondateur et président du conseil d'administration du groupe du même nom, a affirmé que si M. Rousseau représentait une «bonne prise» pour Power Corporation, la société de la famille Desmarais constituait également un bon choix pour M. Rousseau.

«Il ne sera plus dans le parapublic, il ne travaillera plus avec le politique en arrière-plan et sera à l'abri des changements associés aux changements de gouvernement», a déclaré «le vrai» Jean Coutu.

Le président du conseil d'administration de BMO Nesbitt Burns, Jacques Ménard, a soutenu que M. Rousseau aura été un des grands présidents de la caisse.

«Le travail incroyable qu'il a fait pour recentrer la caisse sur ses missions de base va faire partie de son patrimoine, a-t-il déclaré. À cet égard, il est une fierté pour tout le Québec.»

L'économiste en chef de la Banque Nationale, Clément Gignac, n'a pas voulu commenter le départ de M. Rousseau parce que celui-ci a dirigé sa thèse à l'Université Laval et l'a embauché à la Banque Nationale.

«Partout où M. Rousseau est passé, il a fait sa marque, a-t-il toutefois remarqué. C'est un colosse, tant au plan physique qu'intellectuel.»

L'art de surprendre

Le président et chef de la direction d'Investissement Québec, Jacques Daoust, a également côtoyé M. Rousseau de près.

«Il a toujours eu l'art de me surprendre», a-t-il déclaré.

Il a raconté que M. Rousseau et lui avaient commencé à travailler à la Banque Nationale en même temps, en 1986.

«Il a quitté à la surprise de tout le monde, a-t-il raconté. Et pourtant, j'étais son voisin de porte.»

La même chose est arrivée lorsque M. Rousseau a quitté la présidence de la Banque Laurentienne, une institution où M. Daoust l'avait suivi.

«Nous étions quatre à relever directement de lui, a-t-il raconté. Et nous l'avons appris par les médias.»

Le nouveau départ de M. Rousseau n'est donc pas si surprenant que cela.

«Quand on regarde le pattern de carrière de ce bonhomme-là, on voit qu'après cinq à huit ans, il va relever des défis ailleurs, peut-être parce qu'ils considère qu'il a apporté tout ce qu'il pouvait au poste.»

M. Daoust a soutenu qu'en dépit des difficultés avec le papier commercial, M. Rousseau avait amené la caisse à battre les indices du marché tout en contribuant au développement de l'économie du Québec.

Le grand gestionnaire de fonds Stephen Jarislowsky a toutefois émis l'hypothèse que M. Rousseau a perdu la confiance du conseil d'administration de la caisse justement à cause de la question du papier commercial adossé à des actifs. Il a toutefois affirmé que M. Rousseau avait effectué un ménage salutaire à la caisse pendant son règne.

«Il a nettoyé les écuries, n'est-ce pas? Peut-être pas de la même façon qu'Hercule, mais une assez bonne job.»

Politisé

M. Jarislowsky a soutenu que M. Rousseau avait toujours été assez politisé, s'alignant facilement avec la politique nationale du Québec.

«Pour des raisons politiques et pour une divergence de vue sur les actions subalternes, il ne s'est pas joint à la coalition pour la bonne gouvernance du Canada que Claude Lamoureux (l'ancien patron du fonds ontarien Teachers) et moi-même avons organisée, a déclaré M. Jarislowsky. C'est amusant de voir qu'il se joigne à une société qui a des actions subalternes.»