La création du plus imposant transporteur aérien de la planète, résultat de la fusion annoncée entre Delta et Northwest Airlines, n'est pas de nature à inquiéter Air Canada et WestJet.

La création du plus imposant transporteur aérien de la planète, résultat de la fusion annoncée entre Delta et Northwest Airlines, n'est pas de nature à inquiéter Air Canada et WestJet.

La transaction pourrait même avoir un impact positif sur les deux grands transporteurs du pays, qui demeurent dans une bien meilleure posture que les compagnies américaines.

La position d'Air Canada en tant que numéro un des vols transfrontaliers (avec 50% de l'offre totale) ne sera pas affectée par la fusion de Delta et Northwest, qui n'offrent que 10% des vols transfrontaliers.

La fusion n'en fera pas de plus gros concurrents. La nouvelle entité risque bien plus de diminuer son offre de vols transfrontaliers que de l'augmenter.

«Je crois que nous verrons une rationalisation du service canadien», soutient le consultant Rick Erickson, de la firme RP Erickson and Associates.

Selon M. Erickson, tout dépendra de l'importance que conservera la plaque tournante de Northwest à Minneapolis-Saint-Paul. Si beaucoup de vols sont détournés vers Atlanta, siège de Delta, les compagnies canadiennes pourraient en profiter.

Quoi qu'il en soit, les routes les plus lucratives restent les routes intérieures, tant pour Air Canada que pour WestJet, «L'environnement compétitif canadien est beaucoup moins féroce qu'aux États-Unis», rappelle Greg Pau, analyste pour Air Canada et pour le transport au bureau torontois de Standard&Poor's.

Marché en santé

Si les transporteurs américains baignent en eau trouble, les compagnies canadiennes sont dans une bien meilleure situation.

Aux États-Unis, les capacités d'occupation sont trop élevées, les hausses du prix du carburant font mal, et le ralentissement économique inquiète.

La hausse du prix du carburant affecte aussi Air Canada et WestJet, mais la force du dollar canadien en atténue l'impact.

«L'industrie canadienne est plus en santé, dit Greg Pau. Il y a un boom dans l'ouest du pays, les vols intérieurs sont lucratifs, et le trafic passagers est élevé.»

La forte demande, jumelée à la plus faible concurrence permet d'augmenter plus facilement les tarifs en cas de besoin, selon Cameron Doerksen, analyste chez Partenaires Versant.

«Le marché canadien est un duopole confortable», dit Karl Moore, professeur de marketing à l'Université McGill.

Tous les analystes s'accordent à dire que si le Canada n'est pas totalement à l'abri des difficultés américaines, les compagnies canadiennes sont bien protégées.

Il faut dire que le Canada a vécu des épreuves semblables il y a quelques années.

«Nous avons déjà passé l'étape des restructurations majeures, dit Rick Erickson. Aux États-Unis, ce n'était pas arrivé encore parce que le gouvernement a fourni beaucoup d'argent et de garanties de prêt aux transporteurs après le 11 septembre 2001.»

Depuis qu'elle est sortie de la banqueroute, en 2004, Air Canada s'est employée à renouveler sa flotte, et elle profite maintenant de quelques années d'avance sur plusieurs transporteurs américains.

«Le fait qu'Air Canada vole sur des appareils plus modernes et plus efficaces lui donne un léger avantage», note Greg Pau.

M. Moore résume bien la situation globale: «En ce moment, il vaut mieux être un transporteur aérien au Canada plutôt qu'aux États-Unis.»

Il n'a pas été possible de joindre un porte-parole de WestJet hier. Du côté d'Air Canada, on nous a renvoyé aux propos du président Montie Brewer sur d'éventuelles fusions aux États-Unis, propos tenus lors de la dernière divulgation des résultats, en février.

«À court terme, ces transactions ont pour effet de distraire ces entreprises, avait-il déclaré. Pour être passés par là, nous savons qu'en temps de consolidation, on a tendance à regarder à l'intérieur plutôt qu'à l'extérieur. Nous allons tirer avantage de cette distraction.»