Les présidents de plusieurs pétrolières, réunis lundi à Madrid, se sont alignés sur les pays consommateurs en affirmant que la spéculation n'était pas la principale cause de l'envolée du baril à plus de 143 $ US.

Les présidents de plusieurs pétrolières, réunis lundi à Madrid, se sont alignés sur les pays consommateurs en affirmant que la spéculation n'était pas la principale cause de l'envolée du baril à plus de 143 $ US.

«Je ne pense pas que nous puissions accuser les spéculateurs», a déclaré le président de l'anglo-néerlandais Royal Dutch Shell, Jeroen van der Veer, lors de la première journée du XIXe Congrès mondial du pétrole.

Le président du britannique BP, Tony Hayward, a qualifié de «mythe» la responsabilité des spéculateurs.

Les grandes pétrolières rejoignent donc le camp des pays consommateurs dans le débat qui les oppose aux producteurs.

À l'occasion de la réunion de Jeddah, organisée le 22 juin par le royaume d'Arabie saoudite pour rechercher des solutions à l'envolée des prix, cette opposition avait éclaté au grand jour.

Les spéculateurs «perturbent le marché pour servir leurs intérêts égoïstes», a dénoncé le roi Abdallah d'Arabie saoudite, premier exportateur mondial d'or noir.

Le secrétaire américain à l'Énergie, Samuel Bodman, a estimé que «le capital (suivait) la montée du marché du pétrole, ce n'est pas lui qui la conduit».

«L'augmentation des prix n'est pas liée à une bulle spéculative», a déclaré lundi Tony Hayward.

Le président du groupe hispano-argentin Repsol YPF, Antoni Brufau a abondé, affirmant que «les marchés financiers recherchent avant tout des occasionss».

Pour les présidents de ces compagnies pétrolières, toutes domiciliées chez des pays consommateurs, l'envolée s'explique avant tout par l'essor sans précédent de la demande, notamment chez les géants émergents, la Chine et l'Inde, qui a réduit comme peau de chagrin l'écart entre offre et demande.

Jeroen van der Veer a estimé que la flambée des prix avait des racines «psychologiques» liées à «des anticipations de tensions entre l'offre à la demande dans le futur». Mais, «il n'y a pas actuellement de pénurie», a-t-il insisté.

Les patrons de ces géants de l'énergie ont démenti l'idée que la hausse des prix aurait des causes géologiques liées à l'épuisement de la ressource, tout en reconnaissant que l'époque du «pétrole facile est terminée».

«Les problèmes se situent au-dessus du sol, pas en-dessous», a soutenu M. Hayward. «Le monde a 40 ans de réserves prouvées de pétrole, 60 de gaz naturel et 130 de charbon», a-t-il déclaré.

Les patrons des pétrolières, pour qui la solution passe par des investissements massifs, ont appelé les gouvernements à alléger la pression fiscale sur les revenus pétroliers pour leur permettre d'engager ces dépenses.

«Une fiscalité élevée signifie moins d'argent à investir dans de nouvelles productions», a déclaré M. Hayward.

Ils ont aussi sonné l'alarme sur le manque critique de personnel qualifié dans l'industrie. «Il nous faut plus de matière grise par baril», a souligné M. van der Veer.

«Être géologue n'est peut être pas aussi attirant qu'être trader», a regretté Jean-Marie Masset, directeur de l'exploration et de la production du pétrolier français Total.