Après trois longues années d'attente, une demande de recours collectif a finalement été déposée dans l'affaire Mount Real, un scandale financier qui a frappé 1600 investisseurs. Outre le PDG, Lino Matteo, et le chef des finances, Paul D'Andrea, le recours cible les vérificateurs comptables de l'entreprise et les gardiens de valeur.

Après trois longues années d'attente, une demande de recours collectif a finalement été déposée dans l'affaire Mount Real, un scandale financier qui a frappé 1600 investisseurs. Outre le PDG, Lino Matteo, et le chef des finances, Paul D'Andrea, le recours cible les vérificateurs comptables de l'entreprise et les gardiens de valeur.

L'une des principales firmes comptables visées est Deloitte & Touche, ayant agi comme vérificateur des livres de la Corporation Mount Real durant six ans, entre 1997 et 2002. Suivent BDO Dunwoody (2003) et Schwartz Levitsky Feldman (2004).

«Je suis très satisfait, dit l'investisseur Alan Brown. Je réalise que l'enquête a été difficile parce qu'il y avait plusieurs entreprises impliquées dans diverses juridictions.»

L'homme de 68 ans a perdu 294 000$ avec Mount Real, soit une grande partie de ses économies. «Je mène désormais une vie simple», dit-il.

Selon la requête, Mount Real, inscrite en Bourse, présentait année après année une situation financière enviable et des profits en forte hausse. Or, «les états financiers reluisants masquaient toutefois une situation financière catastrophique», est-il écrit dans la requête.

Le chef des finances, Paul D'Andrea, a d'ailleurs reconnu que les états financiers étaient trafiqués pour doper la valeur des actifs. Cet aveu a été fait devant l'Ordre des comptables en management accrédités (CMA), ce qui a mené à la radiation de Lino Matteo et de Paul D'Andrea pour avoir arnaqué les investisseurs.

«Les vérificateurs ont été des rouages essentiels de cette vaste fraude. En signant des rapports de vérification à l'appui d'états financiers truffés de mensonges et d'omissions, les vérificateurs ont commis des fautes qui les rendent solidairement responsables avec les autres intimés pour les préjudices subis par les membres du groupe», est-il écrit dans la requête.

Entre autres, les vérificateurs ont omis de mentionner, aux états financiers, que les entreprises qui devaient de l'argent à Mount Real étaient principalement sous l'influence ou liées aux dirigeants de Mount Real.

La requête déposée en Cour supérieure, à Montréal, est dirigée par l'investisseur Andrée Ménard, qui a perdu 132 000$ dans cette affaire. Elle vise toutes les personnes qui étaient, le 9 novembre 2005, propriétaires de billets à ordre émis par Mount Real ou ses affiliées (MRACS, Real Vest, Real Assurance). La date réfère au moment où l'organisation a été bloquée par l'Autorité des marchés financiers (AMF).

Il y a un mois, rappelons-le, l'AMF a poursuivi Lino Matteo et quatre autres dirigeants, réclamant des dizaines de millions d'amendes et des peines d'emprisonnement.

La requête en recours collectif rappelle que les activités de Mount Real se limitaient essentiellement à vendre des abonnements à des magazines, contrairement à ce que l'entreprise déclarait dans ses rapports annuels. Le sceau des vérificateurs et des gardiens de valeur lui permettait de jouir d'une bonne crédibilité.

En réalité, selon la requête, l'organisation a monté une arnaque classique appelée «Ponzi Scheme», du nom du premier fraudeur (Charles Ponzi) à avoir utilisé un tel stratagème aux États-Unis, dans les années 1920. Essentiellement, «les fraudeurs exploitent la bonne foi des investisseurs en offrant des rendements élevés afin de les attirer, mais les sommes investies sont utilisées pour enrichir les fraudeurs et payer les rendements promis afin d'attirer de nouvelles victimes», est-il écrit dans la requête.

B2B et Penson

La requête tient également pour responsable les gardiens de valeurs B2B Trust, filiale de la Banque Laurentienne, et Services financiers Penson. Ces deux firmes devaient détenir les billets à ordre des investisseurs et attester des valeurs détenues, attestation qui conférait une crédibilité à l'organisation. Or, cette attestation était sans fondement, selon la requête.

La poursuite a été préparée par les firmes d'avocat Trudel&Johnston, Lauzon Bélanger et Belleau Lapointe. Avant d'être débattue sur le fonds, la demande d'intenter un recours collectif doit d'abord être accordée par la Cour, qui se basera sur l'homogénéité du groupe et la similarité des dommages subis.

Nous n'avons pu joindre Lino Matteo et Paul D'Andrea. Les firmes Deloitte&Touche, de même que BDO Dunwoody et B2B Trust n'ont pas voulu commenter, tandis que Schwartz Levitsky Feldman n'a pas rappelé. Pour sa part, Penson affirme qu'elle contestera vigoureusement les allégations à son endroit, qu'elle dit sans fondement.