L'exploitation du gaz naturel des shales est une technique récente dans le monde et ses impacts à long terme sur l'environnement sont peu documentés. Au Québec, tout est à bâtir.

L'exploitation du gaz naturel des shales est une technique récente dans le monde et ses impacts à long terme sur l'environnement sont peu documentés. Au Québec, tout est à bâtir.

Les citoyens doivent-ils s'inquiéter des conséquences ?

D'abord, soulignons que l'impact visuel et sonore de ce type d'exploitation est minime et temporaire. Une fois chaque forage terminé, après une vingtaine de jours, il ne restera sur place qu'une tête de puits.

Cette structure de métal assez petite est branchée à un système de collecte souterrain la reliant au pipeline de Gaz Métro.

Comme les emplacements seraient pour la plupart situés en milieu rural ou semi-rural, ces forages risquent peu de déranger la population comme c'est le cas à Fort Worth, au Texas, où bon nombre de puits sont forés en zone urbaine.

Par ailleurs, le gaz naturel est moins polluant que le pétrole et produit moins de gaz à effet de serre (GES). Son utilisation donne droit à des crédits dans le cadre du protocole de Kyoto.

«Au Québec, le plus grand concurrent du gaz n'est pas l'hydro-électricité. C'est le mazout, qui pollue énormément», dit David Vincent, directeur des relations avec les investisseurs chez Gastem.

Selon lui, l'exploitation du gaz naturel au Québec permettrait de l'offrir à un prix plus bas, ce qui inciterait une partie de l'industrie lourde consommant du mazout à se convertir au gaz.

Mais cette thèse ne fait pas l'unanimité chez les experts consultés par La Presse.

Marie-Noëlle Cano, porte-parole de Gaz Métro, confirme qu'une saine concurrence jumelée à la proximité des ressources et du marché pourrait exercer une pression à la baisse sur les prix.

Mais Pierre-Olivier Pineau, professeur à HEC Montréal et spécialiste des politiques énergétiques, demeure sceptique.

«Je ne crois pas que ce projet aura un impact significatif sur le prix du gaz naturel nord-américain, dit-il. Certains frais de transport pourraient être économisés, mais ce n'est pas la plus grande composante du prix du gaz. Je n'envisage pas de passage majeur du mazout au gaz.»

Une question d'eau

Sur tous les sites d'exploitation de gaz naturel provenant des shales en Amérique du Nord, la question problématique est celle de l'eau.

Pour extraire le gaz présent dans la roche, il faut la fragmenter avec un mélange d'eau et de sable sous pression, auquel on ajoute des produits chimiques. Aux États-Unis, les entreprises ne sont pas tenues de révéler quels sont ces produits.

Chaque forage nécessite l'emploi d'environ 11 millions de litres d'eau. Pour mettre ces chiffres en perspectives, mentionnons qu'un Québécois consomme en moyenne 145 000 litres d'eau dans une année.

Au Texas, où l'eau est une ressource plus rare qu'au Québec, des citoyens s'inquiètent de son utilisation massive dans l'exploitation des shales de Barnett. À sa défense, l'industrie rétorque qu'elle n'emploie en fait que 1% de l'eau disponible.

Mais c'est surtout la disposition de l'eau usée qui complique l'exploitation. Une fois que l'eau est entrée dans la terre pour fragmenter la roche, une partie en ressort.

Elle contient alors des polluants et une plus forte concentration en sel. Il faut la transporter par camions pour la recycler ou en disposer.

L'industrie texane a opté pour la solution la moins coûteuse et la plus facile: on enfouit l'eau très profondément sous terre dans ce qu'on appelle des «puits d'injection».

Une pratique contestée par les environnementalistes, qui craignent que des fuites contaminent l'eau potable ou que des accidents pendant le transport causent des déversements.

Au Québec, les entreprises envisagent plutôt de recycler l'eau dans les infrastructures municipales pour la remettre dans la nature.

Cependant, à mesure que le volume augmentera, la capacité d'épuration des usines québécoises risque d'être débordée, mentionne Geraint Lloyd, vice-président à l'exploration chez Gastem.

Les solutions à long terme restent donc à trouver.