Après des semaines de débats et des centaines de milliers de dollars dépensés en frais juridiques, le tribunal annoncera aujourd'hui s'il approuve - ou pas - la vente de BCE (T.BCE).

Après des semaines de débats et des centaines de milliers de dollars dépensés en frais juridiques, le tribunal annoncera aujourd'hui s'il approuve - ou pas - la vente de BCE [[|ticker sym='T.BCE'|]].

La décision du juge Joel Silcoff, de la Cour supérieure du Québec, sera rendue publique à 19h. Elle viendra sceller le sort de la transaction de 51,7 G$ annoncée l'été dernier entre Bell Canada Entreprises et un consortium dirigé par la caisse de retraite Teachers'.

Le magistrat doit se prononcer sur deux points centraux. Il doit d'abord régler la poursuite intentée par certains porteurs d'obligations, qui affirment avoir perdu plus d'un milliard de dollars.

Le juge Silcoff doit aussi approuver le «plan d'arrangement pour la transformation de l'entreprise en société fermée», a indiqué jeudi BCE. Au total, le magistrat rendra cinq jugements distincts dans cette cause, a-t-on appris.

Les analystes sont confiants de voir la transaction sanctionnée par la cour. «Il semble que Bell avait beaucoup de jurisprudences pour appuyer sa cause, ce qui nous laisse croire à une décision favorable du juge», a indiqué Troy Crandall, de la firme MacDougall, MacDougall & MacTier.

«Je crois que Bell a une bonne chance de gagner, et peu importe quelle partie perdra, elle ira en appel», a pour sa part fait valoir Joseph MacKay, de Desjardins Valeurs Mobilières, joint à Toronto.

Les détenteurs d'obligations sont dans l'expectative. «Mon état d'esprit? Je dirais: ardente curiosité et impatience. Les deux parties ont donné leur meilleur, et c'est impossible de prédire le jugement», a indiqué à La Presse Affaires Markus Koehnen, procureur du Comité informel des porteurs de débentures en vertu de l'acte de fiducie de 1997.

Me Koehnen espère que la cour penchera en faveur de ses clients, mais il rappelle que les obligataires sont prêts à négocier un règlement avec Bell et Teachers'. "Nous les avons approchés à plusieurs reprises en leur proposant des solutions possibles, et ces opportunités demeurent ouvertes."

Les titres de dette de Bell Canada sont aujourd'hui considérés comme de la «pacotille», à cause du fort niveau d'endettement - environ 40 G$ - qu'aura la société lorsqu'elle aura été rachetée par des fonds privés. Ils ont subi de nombreuses décotes depuis juin.

Selon l'analyste Troy Crandall, le tribunal pourrait obliger BCE à payer une certaine pénalité à ses porteurs d'obligations. «Dans le pire des scénarios, ils seraient forcés de rembourser les obligataires, ce qui représenterait des milliards et pourrait faire dérailler la transaction. Mais il y a selon nous une faible probabilité que ça se produise.»

Crise du crédit

Ce qui inquiète le plus les investisseurs, c'est encore la question du financement. La crise du crédit perdure et l'accès aux capitaux est beaucoup plus restreint qu'en juin dernier, quand la transaction a été annoncée.

À preuve, l'action de Bell continue de naviguer ces jours-ci à mi-chemin entre sa valeur moyenne des dernières années (environ 30 $) et le prix de rachat de 42,75 $ proposé par Teachers'. Elle a terminé la journée à 36,07 $ hier à Toronto, en baisse de 1,4%.

La nervosité demeure palpable, mais Troy Crandall est un peu plus optimiste que ces dernières semaines en raison de l'amélioration de certains paramètres du marché. Il estime maintenant à 70% les chances que la transaction soit conclue au prix convenu, lui qui plaçait la barre à 65% il n'y a pas si longtemps.

Outre la question du financement et le jugement à paraître aujourd'hui, BCE devra aussi convaincre le CRTC que le contrôle de la nouvelle entreprise sera majoritairement canadien. Rappelons que Teachers' s'est alliée avec les fonds d'investissement américains Providence Equity Partners et Madison Dearborn.

Le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes a déjà tenu deux jours d'audience la semaine dernière à Gatineau. Le président de l'organisme a ensuite demandé quelques modifications, touchant notamment la composition du conseil d'administration.

Les dirigeants de Bell se présenteront de nouveau devant le CRTC mardi prochain pour une ultime audience. L'analyste Dvai Ghose, de la firme Genuity Capital Markets, n'entrevoit toutefois pas de problèmes réglementaires. «Je crois que Bell a fait les changements nécessaires», a-t-il indiqué.

BCE espère toujours finaliser la transaction avec Teachers' au plus tard à la mi-mai.