Une frite, un hot-dog et une eau gazeuse; la petite commande rapide au-dessus du comptoir n'échappera plus jamais à l'oeil vigilant du ministre du Revenu.

Une frite, un hot-dog et une eau gazeuse; la petite commande rapide au-dessus du comptoir n'échappera plus jamais à l'oeil vigilant du ministre du Revenu.

D'ici un an, les Québécois commenceront à voir apparaître l'empreinte digitale du fisc québécois sur les factures de restaurant.

Un sentiment d'urgence s'est emparé du gouvernement Charest dans ce domaine.

Il y a deux ans, on estimait que l'évasion fiscale dans le secteur de la restauration atteignait 300 M$ par an, soit 16% des ventes.

On a dû revoir ces chiffres à la hausse: une augmentation de 40%, à pas moins de 425 millions. On s'approche du demi-milliard chaque année, dont 140 millions en taxe de vente du Québec.

Une telle somme représente l'équivalent des soins de santé pour les résidants d'une ville comme Laval. Ou encore les budgets additionnés de l'Institut de cardiologie et de l'hôpital Sainte-Justine!

Facture obligatoire

Actuellement, rien n'oblige votre restaurateur à vous donner une facture.

Dans un proche avenir, cela va changer. Et la facture «Revenu Québec» n'aura pas l'allure du papier gribouillé que vous remet, parfois, le propriétaire de votre restaurant vietnamien préféré; un code-barres se trouvera en évidence sur ces documents désormais standardisés.

Ces changements et quelques autres doivent être annoncés lundi par le ministre du Revenu, Jean-Marc Fournier, dans un point de presse organisé à la réputée Taverne Magnan, à Montréal.

Des sources indiquaient hier à La Presse que le ministre aura, pour les 18 000 restaurateurs, un plat de résistance: Québec va payer la facture d'environ 20 millions que nécessitera l'installation de «mouchards», le «module d'enregistrement des ventes», un dispositif électronique relié à la caisse enregistreuse qui permettra d'enregistrer toutes les transactions.

Ces appareils ne seront pas reliés en ligne avec le Ministère, mais les inspecteurs du revenu pourront seuls, en se rendant dans l'établissement, avoir accès aux données qu'il contient.

Ce processus était déjà promis dans le budget du Québec en 2006.

Projet pilote

Pour l'heure, le ministre Fournier annoncera un projet pilote: dans les grandes régions de Montréal et Québec, les restaurateurs seront invités à adhérer volontairement à ces nouveaux processus de contrôle, histoire de vérifier si ce qui a été conçu au ministère du Revenu tient la route une fois transposé derrière le comptoir.

À partir de cette expérience, un projet de loi sera déposé à l'Assemblée nationale pour remettre au goût du jour les mesures fiscales dans le domaine de la restauration.

Dans les prochains mois, le projet pilote devrait être en marche. On vise l'automne 2009 pour mettre en vigueur l'obligation pour tous les nouveaux établissements de brancher les caisses sur les «mouchards».

Au même moment, on demandera aussi aux restaurants qui ont déjà été trouvés coupables d'évasion fiscale de se plier aux nouvelles règles.

À compter du 1er janvier 2011, tous les restaurants devront avoir leur «module» branché sur leur caisse et se servir des factures à «code-barres» du Ministère.

Il y a plusieurs années, le ministère du Revenu du Québec distribuait largement des tablettes de factures, mais celles-ci n'étaient pas obligatoires.

C'était en fait un service que rendait gratuitement le Ministère pour aider les commerces à standardiser leur comptabilité. La future facture à signature électronique sera, elle, obligatoire.

La possibilité pour un restaurateur de tricher avec l'impôt lui procure un avantage déloyal sur ses compétiteurs.

Ces Houdini de la facturation sont souvent aussi des spécialistes du travail au noir, un engrenage qui prive les serveurs et les employés de cuisine des protections minimales quant à leurs conditions de travail.