Plus haut, toujours plus haut: le prix de l'or semble partir en orbite par les temps qui courent. Tellement que le bataillon de petites entreprises dont le métier est plutôt de creuser vers les profondeurs peine à suivre le rythme.

Plus haut, toujours plus haut: le prix de l'or semble partir en orbite par les temps qui courent. Tellement que le bataillon de petites entreprises dont le métier est plutôt de creuser vers les profondeurs peine à suivre le rythme.

«On note depuis sept ou huit mois que la valeur des titres aurifères d'exploration ne suit pas le prix de l'or. C'est même l'inverse: le prix des actions a diminué beaucoup, et on a senti un ralentissement au niveau du financement», dit Jean-Pierre Thomassin, directeur général de l'Association de l'exploration minière du Québec.

Inquiétant? Pas tellement. Parce que si les entreprises dont le métier est de découvrir de nouveaux trésors montrent des signes d'essoufflement, c'est en partie parce qu'elles pédalent à plein régime depuis un certain temps déjà.

«Il ne faut pas oublier qu'on a atteint le point de surchauffe l'an dernier, dit M. Thomassin. Quand le Ministère a annoncé à notre congrès annuel qu'on avait 350 millions de dépenses d'exploration (au Québec), j'ai moi-même fait le saut. On n'a pas les infrastructures pour dépenser tout ça.»

Un manque de main-d'oeuvre

«On ne voit pas beaucoup plus d'exploration pour l'or parce qu'on manque de géologues, on manque de foreuses, on manque d'hélicoptères, on manque de géophysiciens, ajoute-t-il. Si on avait du financement pour 500 millions de dollars, on ne serait pas capable de le dépenser.»

Parlez à n'importe qui dans l'industrie minière ces jours-ci, que ce soit dans l'exploration ou l'exploitation, et c'est la première chose qu'il vous dira: «Nous manquons de monde.»

Les inscriptions dans les programmes de formation sont en hausse, mais il faudra encore attendre quelques années avant de voir débarquer les diplômés.

Des foreuses et des hélicoptères, par contre, ça s'achète. Mais l'industrie hésite à enfoncer davantage la pédale de l'accélérateur. Des envolées du prix de l'or, elle en a connu par le passé. Et ça ne s'est pas toujours bien terminé.

«Il y a un peu de peur là-dedans, concède M. Thomassin. Souvenez-vous des années 80: le prix avait grimpé, mais il était retombé. Les gens se souviennent de ça. Les fournisseurs de services, en particulier, ont été très affectés par les cycles économiques. Alors ils ne prennent pas de risque. Ces compagnies préfèrent travailler 365 jours par année plutôt que de faire de la croissance.»

Aujourd'hui, cependant, on admet que la «tendance de fond semble meilleure». Et la confiance, dit M. Thomassin, devrait s'installer graduellement.

«Si les fournisseurs perdent un, deux, cinq, dix contrats, ils vont être obligés de faire des investissements», dit Jean-Marc Lulin, président et chef de la direction d'Azimut Exploration, une entreprise qui creuse aujourd'hui du côté de la baie James pour faire ses découvertes.

«C'est l'un des effets d'une hausse du prix de l'or, dit M. Lulin. Dans une région mature comme l'Abitibi, ça donne du courage aux explorateurs pour aller s'éloigner des gisements connus - soit en profondeur, soit latéralement. Mais ça permet aussi d'aller explorer de nouvelles régions - la Baie-James et, éventuellement, encore plus au nord.»

Quant à ceux qui ont déjà trouvé de l'or, ils voient les prix grimper avec joie. C'est le cas de l'entreprise d'exploration Osisko, qui est assise sur un gisement prometteur à Malartic.

«Ça rend le projet encore plus intéressant d'un point de vue financier», dit Bryan Coates, vice-président et chef des finances de l'entreprise.

Car à 900 dollars l'once, des concentrations qui n'étaient pas intéressantes à exploiter deviennent soudainement pleines d'attrait.

«C'est clair que les stratégies changent», dit Margaret Kent, présidente et chef de la direction de Century.

L'entreprise exploite la mine Lamaque, près de Val-d'Or, un gisement qui avait été abandonné lorsque les prix étaient moins attrayants.

Mme Kent refuse toutefois de céder à l'euphorie. Oui, le prix de l'or a grimpé. Sauf que le prix du pétrole, de la main-d'oeuvre et du dollar canadien sont aussi partis du même côté, souligne-t-elle.

Des facteurs qui ne font pas broncher David Smith, vice-président, relations avec les investisseurs, chez Agnico Eagle.

L'entreprise s'apprête à ouvrir deux nouvelles mines cette année et trouve que la poussée de fièvre qui affecte le prix de l'or tombe décidément très bien.

«La hausse du dollar canadien nous fait mal parce qu'une large partie de nos coûts se fait en dollars canadiens, dit M. Smith. Mais la hausse du prix des métaux, en particulier de l'or, a largement, largement compensé ces effets négatifs.»