Le secteur de la construction industrielle va mal. Et il n'a même pas encore subi le contrecoup de la hausse du dollar.

Le secteur de la construction industrielle va mal. Et il n'a même pas encore subi le contrecoup de la hausse du dollar.

Du côté commercial, la force du huard pourrait également avoir un impact négatif. Tout dépend des exportations. Malgré tout, l'industrie n'est pas arrêtée pour autant, de nombreux projets de construction sont échafaudés et les grues continent de s'activer.

La région de Montréal compte déjà «plus de 100 immeubles industriels vides de plus de 50 000 pieds carrés», et cela avant même l'impact du huard à parité avec le dollar américain.

Tel est le décompte fait à La Presse Affaires par le vice-président industriel du courtier Cushman & Wakefield LePage (l'ex-Royal LePage), Stéphane Tessier.

Les pancartes «À louer» et «À vendre» pourraient donc se multiplier dans les parcs industriels et la construction ralentir par la suite.

Malgré tout, l'activité sur les chantiers demeure vigoureuse dans les autres secteurs, explique le président de la Commission de la construction du Québec (CCQ), André Ménard.

Au total, les heures travaillées dans la construction ont augmenté de 4% (août 2007), précise l'économiste principal de la CCQ, Louis Delagrave.

Le volume de travail a grimpé de 7% dans la construction résidentielle (par rapport à août 2006), soit autant que dans les travaux de génie civil, comparativement à une hausse de 4% dans le commercial. L'industriel a chuté de 7%.

«La construction va bien, car après un début d'année lent, l'activité s'est raffermie depuis quelques mois», ajoute Louis Delagrave.

«L'impact de la remontée en flèche du dollar canadien, on s'y attend, mais on ne le voit pas encore», enchaîne Brett Miller, directeur du courtier CB Richard Ellis pour l'est du Canada.

Le dollar fort commence à peine à faire sentir son impact, enchaîne Robert Mercier, directeur au Québec du courtier DTZ Barnicke. Il y aura encore des fermetures d'usines avec un dollar à ce niveau, dit-il.

«La construction industrielle est déjà mal en point depuis longtemps», déclare Louis Delagrave.

«Depuis cinq ans, il y a eu mutation de l'activité manufacturière vers les technologies et, depuis deux ou trois ans, ce secteur a été frappé par les importations d'Asie, explique Brett Miller. Dans l'immédiat, c'est étonnant, mais on ne voit pas encore l'impact du dollar fort», ajoute-t-il.

Par contre, des entreprises ont déjà dû se restructurer et devenir des importateurs, pour améliorer leur rentabilité. Shermag confie déjà la moitié de ses travaux en sous-traitance en Asie et voit ses profits pâtir.

Elle vient en outre d'annoncer devoir encore revoir ses activités, à cause de la nouvelle vigueur du dollar. Et le président de Shermag, Jeff Casselman, vient même de démissionner.

Quant au concepteur et manufacturier de vêtements pour femmes Claudel Lingerie, il a dû se transformer en designer et importateur de ces produits.

Stéphane Tessier s'attend à «un impact du dollar fort sur les manufacturiers, d'autant plus qu'ils sont déjà en difficulté. À cause des importations de la Chine notamment, des manufacturiers doivent déjà gérer la décroissance et se réorienter vers les services. On déplore ainsi beaucoup de vacances dans les locaux industriels».

Louis Delagrave souligne le lancement de plusieurs projets industriels, dans les secteurs minier, pétrolier et de l'aluminerie.

«L'industriel n'est déjà pas très dynamique. Les pâtes et papiers (et le bois) ne lancent à peu près plus de projets de construction. On vit déjà un creux industriel. C'est donc plus difficile de détecter l'impact du dollar dans ce contexte. Des projets profitent de la grande demande pour le pétrole et les métaux, qui semble d'ailleurs peu touchée par la vigueur du dollar», note-t-il.

C'est difficile pour l'instant de prévoir dans combien de mois le dollar fort accentuera encore les problèmes des manufacturiers, renchérit Louis Delagrave.

L'influence du dollar n'est pas très visible encore sur la construction, mais ça pourrait venir plus tard, après la multiplication des pancartes des courtiers, dit-il.

«Comme toutefois l'industriel ne représente que de 15% à 20% de l'activité, l'impact du dollar pourrait être restreint sur la construction en général», explique l'économiste principal de la CCQ.

En Ontario et au Québec, des manufacturiers sont en difficultés et il y a du mouvement dans le marché, mais ce n'est pas alarmant, selon le directeur de DTZ Barnicke.

Par contre, après des fermetures et des faillites, ce ne sera pas évident à Laval pour six mois ou plus, conclut Robert Mercier.