Sylvie n'est pas au bureau ce matin. Elle a mal au dos. C'est la troisième fois qu'elle s'absente du travail ce mois-ci. La semaine dernière, c'était une indigestion. Et il y a deux semaines, son petit dernier avait une grosse fièvre.

Sylvie n'est pas au bureau ce matin. Elle a mal au dos. C'est la troisième fois qu'elle s'absente du travail ce mois-ci. La semaine dernière, c'était une indigestion. Et il y a deux semaines, son petit dernier avait une grosse fièvre.

Cette histoire vous est familière? Vous n'êtes pas seul. Au Canada, l'absentéisme coûte en moyenne 17 milliards de dollars par an aux entreprises. Et il semblerait que la situation soit pire au Québec que dans les autres provinces.

Les taux d'absentéisme global sont de 5 à 10% plus élevés au Québec qu'ailleurs au Canada, selon Brigitte Marcoux, conseillère en relations industrielles agréée, et conseillère en gestion de la présence au travail et santé mieux-être pour SSQ Groupe financier.

«Cela peut s'expliquer par des conditions de travail plus avantageuses en ce qui concerne les congés mobiles et les congés de maladie prévus dans les conventions collectives, dit Mme Marcoux. Plusieurs études démontrent que plus les milieux sont syndiqués depuis longtemps, plus il y a un effet sur les taux d'absentéisme.»

Le fait d'avoir une banque de congés de maladie est un avantage, mais aussi une tentation pour les travailleurs. «Celui qui a des congés autorisés ne craint pas d'être sanctionné s'il s'absente, dit Carl Laflamme, VP ventes et marketing, assurances collectives, SSQ Groupe financier. Celui qui n'a pas de congés court le risque d'être réprimandé. Et si le congé est à ses frais, il faut qu'il soit vraiment malade pour le prendre.»

Les causes et les remèdes

Selon les chiffres de la SSQ, les principaux facteurs d'invalidité à court terme sont les maladies musculo-squelettiques comme les maux de dos, suivies des troubles psychologiques et des maladies.

Si les maladies musculo-squelettiques sont le lot des employés de l'industrie manufacturière, du côté des services, la dépression et l'épuisement professionnel guettent les travailleurs. Ce véritable fléau, en augmentation depuis 10 ans, s'explique en partie parce qu'il est moins tabou de nos jours d'admettre que l'on est au bout du rouleau.

«Il y a 20 ans, c'était très mal vu de dire que l'on souffrait d'épuisement, dit Carl Laflamme. Par contre, il y avait des gens qui allaient au travail épuisés, surtout chez les hommes.»

Bien des employeurs manquent de connaissances et d'outils pour faire face à cette nouvelle réalité. Comment gérer les absences, et surtout les absences répétitives et douteuses? «Il y aura toujours des cas déviants qui nécessitent des mesures disciplinaires, dit Carl Laflamme. Mais il faut être prudent avant de parler d'abus sans connaître la situation des personnes. En réalité, seulement 2% des cas sont des cas d'abus clairs.»

Le motif raisonnable

Pour débusquer ces abus, les mesures permises vont loin. "L'employeur a le droit de faire filer un individu et de filmer ses activités à son insu, mais à condition d'avoir un motif raisonnable, explique Me Rhéaume Perreault, conseiller en relations industrielles agréé et avocat spécialisé en droit de l'emploi chez Heenan Blaikie. Par exemple, si le médecin de la compagnie a de sérieux doutes sur la maladie de l'employé."

Avant tout, il faut distinguer deux types d'absents: le non-fautif, qui a des motifs légitimes, et le fautif.

"Dans le cas des gens qui n'appellent pas pour se justifier, ou de ceux à qui on refuse un vendredi de congé et qui ne se présentent pas au travail, dit l'avocat, l'entreprise doit faire une gestion rigoureuse, avec des avertissements écrits et des suspensions qui peuvent aller jusqu'au congédiement."

Par ailleurs, le fait d'établir et d'afficher une politique de l'absentéisme est avantageux, mais il faut éviter qu'elle soit trop détaillée.

"Une politique trop lourde met des bâtons dans les roues, dit Me Perreault. Si vous faites une politique de 20 pages, vous risquez que des parties de celle-ci soient illégales et puissent être contestées. Mieux vaut afficher une politique courte qui fait connaître la position de l'entreprise et les règles du jeu."

De plus, mieux vaut prévenir que guérir. "Il faut mettre en place des processus pour promouvoir la santé dans l'entreprise, dit Brigitte Marcoux. Nous recommandons à nos assurés d'implanter un programme de santé et de mieux-être, avec des campagnes de promotion de la santé, et de réviser la gestion de la présence au travail avec l'équipe des ressources humaines."

Avec la pénurie d'employés grandissante, les entreprises ne peuvent plus se permettre de laisser leur taux d'absentéisme augmenter sans réagir.

"Une chose est sûre: il ne faut pas penser que les problèmes d'absentéisme vont se régler tout seuls, dit Carl Laflamme. Les entreprises doivent investir financièrement pour régler ces questions.