Même si Bombardier (T.BBD.B) a injustement invoqué les attentats terroristes du 11 septembre pour se soustraire à certaines obligations contractuelles, cela ne veut pas dire qu'elle a causé la faillite de son sous-traitant Techni-Paint, de Trois-Rivières.

Même si Bombardier [[|ticker sym='T.BBD.B'|]] a injustement invoqué les attentats terroristes du 11 septembre pour se soustraire à certaines obligations contractuelles, cela ne veut pas dire qu'elle a causé la faillite de son sous-traitant Techni-Paint, de Trois-Rivières.

Un juge de la Cour supérieure a blanchi hier Bombardier Aéronautique de toute responsabilité dans la faillite de Techni-Paint, qui était spécialisée dans la peinture des fuselages d'avion et avait Bombardier comme seul client.

Techni-Paint, qui peignait des avions à réaction régionaux CRJ-200 et des avions de lutte contre les incendies de forêt CL-415, a déclaré faillite en 2002, quelques mois après l'annulation sans compensation des contrats par Bombardier.

Le syndic réclamait 3,9 millions en dommages, accusant notamment Bombardier d'avoir caché des informations à Techni-Paint et de l'avoir privé de toute chance de se trouver d'autres clients.

Le juge Marc-André Blanchard a jugé que c'est la fragilité financière, le lourd endettement et la surspécialisation de Techni-Paint qui ont causé sa fermeture, et non pas une «théorie du complot» attribuée à Bombardier par le syndic Belhumeur-Pronovost, de Trois-Rivières.

La caisse Desjardins de l'Ouest de la Mauricie, créancière de Techni-Paint, a eu gain de cause. Elle poursuivait aussi Bombardier pour 1,5 million, et le juge Blanchard lui a accordé 1,2 million.

Peu de temps avant l'ouverture de ses propres ateliers de peinture à Dorval et Mirabel, Bombardier a exercé son droit d'annulation des contrats à Techni-Paint. Bombardier a aussi refusé de payer les pénalités d'annulation prévues au contrat, invoquant la «force majeure» découlant des attentats terroristes du 11 septembre 2001.

Dans sa poursuite, le syndic de la faillite accusait Bombardier d'abus de droit et d'avoir caché à Techni-Paint la construction et l'ouverture imminente de ses propres ateliers, prévue pour le 22 octobre 2001.

Dans son jugement, le juge Marc-André Blanchard démolit ce qu'il appelle «la théorie du complot du silence» du syndic. Bombardier avait révélé d'avance, dans deux documents distincts, la construction et l'ouverture imminente de ses propres ateliers de peinture, note le juge.

Bombardier avait parfaitement le droit d'annuler les contrats: «faire valoir ses droits de façon égoïste ne constitue pas un abus de droit», écrit le juge Blanchard

Il rappelle que Techni-Paint avait des finances fragiles et avait évité la faillite dès 1998, uniquement grâce à une proposition concordataire à ses créanciers d'alors.

Mais le jugement est un oeil au beurre noir pour Bombardier: l'avionneur a utilisé les attentats terroristes du 11 septembre 2001 pour invoquer sans fondement la clause de force majeure.

Dans sa défense, Bombardier affirmait que le 11 septembre a amené panique et incertitude dans l'industrie aéronautique, ce qui fait stagner le programme des CRJ-200. D'où la justification d'invoquer la force majeure.

Mais le juge n'a pas cru Bombardier. En fait, l'avionneur a très bien géré le ralentissement momentané des commandes causées par le 11 septembre et «a évité toute annulation de commande d'avions». Au plus, quelques commandes sont reportées légèrement.

En réalité, après le 11 septembre, «Bombardier prend la décision purement économique de tout peinturer sa flotte d'avions à l'interne car elle a dorénavant la capacité de le faire et cela est plus avantageux pour elle», écrit le juge.

Il note aussi que les communications officielles de Bombardier montrent que la décision prise après le 11 septembre découle de plusieurs éléments purement conjoncturels et non seulement aux attentats terroristes.

La décision d'annuler le contrat est parfaitement légitime. Mais pas invoquer le pire attentat terroriste de l'histoire pour ne pas payer 1,2 million de dollars. Il n'y a jamais eu de force majeure, conclut le juge Blanchard, qui condamne Bombardier à payer les pénalités.

Les avocats de Techni-Paint et de Bombardier n'ont fait aucune déclaration hier.