Oubliez le succès monstre de Spider Man 3 au box-office, ou encore le dernier tube de la chanteuse Rihanna ou du groupe Maroon 5. La véritable vedette de l'été 2007 au Canada a plutôt été une pièce de monnaie.

Oubliez le succès monstre de Spider Man 3 au box-office, ou encore le dernier tube de la chanteuse Rihanna ou du groupe Maroon 5. La véritable vedette de l'été 2007 au Canada a plutôt été une pièce de monnaie.

L'été dernier, le dollar canadien voguait vers la parité avec le billet vert américain. Son ascension galvanisait la fierté des Canadiens, qui n'avaient pas vu leur devise être aussi forte contre celle de leurs voisins du Sud depuis 30 ans.

C'était l'été dernier - aussi bien dire une éternité sur le marché des devises. Présentement, le dollar canadien est évalué à 98 cents US, en baisse de 10 cents US depuis son sommet de novembre dernier. Malgré tout, Harvinder Kalirai ne désespère pas. Le vice-président de la gestion de devises chez Gestion d'actifs CIBC croit que l'été sera à nouveau bénéfique au huard - et que ce dernier vaudra davantage que le billet vert américain d'ici un an.

«Deux facteurs ont empêché le dollar canadien de continuer sa progression au cours des six derniers mois: il avait besoin d'une période d'accalmie après les hausses de l'été dernier et le fait que la Banque du Canada a été très agressive dans sa gestion des taux d'intérêts», explique Harvinder Kalirai.

Sans les interventions de la Banque du Canada, le huard pourrait valoir actuellement 1,10$US, selon l'analyste de Gestion d'actifs CIBC. Mais les Canadiens déçus de l'essoufflement de leur monnaie ne devraient pas accuser trop rapidement la Banque du Canada. «La Banque du Canada croyait que l'économie canadienne serait affectée par la crise aux États-Unis, dit-il. Or, l'économie canadienne a très bien réagi: le taux de chômage est le moins élevé au pays depuis 30 ans et les gouvernements continuent d'accumuler des surplus.»

Tous les analystes du marché des devises ne sont pas aussi optimistes que Harvinder Kalirai à l'égard du huard. Au cours de la prochaine année, le Mouvement Desjardins estime que le dollar canadien restera à 98 cents US, sa valeur actuelle. La Banque Laurentienne du Canada, elle, ne croit pas au statu quo. Selon elle, le huard subira des fluctuations. «Si ça doit bouger, ce sera vers le bas», dit François Barrière, vice-président des marchés internationaux à la Banque Laurentienne.

Deux scénarios contradictoires

Cet été, François Barrière passera ses vacances aux États-Unis, profitant ainsi du taux de change actuel de 98 cents US. Selon lui, le taux de change passera à 93 cents US en juin 2009. «Le huard est victime de deux scénarios contradictoires, dit-il. Si le prix des matières premières demeure élevé, ça créera de l'inflation et ça poussera les États-Unis en récession. C'est tout simplement impossible de garder le prix des matières premières élevées et d'avoir une économie nord-américaine en santé.»

Même si les Canadiens sont fiers des succès du huard, l'économie du pays devra s'adapter à une devise forte. «Présentement, nous n'avons pas l'économie qu'il faut pour avoir un dollar fort, dit François Barrière. Pour avoir un huard fort, il faudra de grands changements politiques. Je ne veux pas faire de politique, mais la volonté des gouvernements n'y est pas. Pour soutenir une devise forte, il faudrait créer de nouveaux emplois dans les secteurs d'avenir et accepter des pertes d'emploi dans le secteur manufacturier.»

S'il ne gagne pas sa bataille contre le billet vert américain au cours de la prochaine année, le huard devrait au moins s'apprécier contre l'euro. «L'euro est surévalué, même si c'est une économie qui est capable de vivre avec une devise forte, dit François Barrière. Les fluctuations de devises ont moins d'impact car les pays européens exportent beaucoup entre eux. Mais l'euro est proche de son plafond, surtout qu'on sent un début de ralentissement économique là-bas.»

Depuis un an, le huard s'est déprécié de 9,4% contre l'euro. Selon la Banque Laurentienne, le dollar canadien devrait rattraper la moitié de cet écart au cours de la prochaine année.