«Si ça ne semble pas clair, c'est que ce n'est pas clair!» lance Luc de la Durantaye.

«Si ça ne semble pas clair, c'est que ce n'est pas clair!» lance Luc de la Durantaye.

Le stratège boursier a bien fait rire la dizaine de journalistes venus discuter de l'état des marchés boursiers dans les quartiers généraux de Gestion d'actifs CIBC, lundi, au centre-ville de Montréal.

Luc de la Durantaye trouve les marchés boursiers bien difficiles à prédire ces temps-ci, ce qui est pour le moins ennuyeux quand on est stratège boursier.

«Ce qui caractérise le marché présentement, c'est qu'il n'y a pas de grandes tendances, dit le premier vice-président, répartition de l'actif et gestion quantitative de Gestion d'actifs CIBC. Entre 2002 et 2004, notre stratégie était très ancrée. On tapait fort sur la table afin de convaincre nos clients d'investir à la Bourse. Présentement, nous sommes dans une période beaucoup plus nébuleuse.»

En ces temps incertains, Luc de la Durantaye, un grand sportif, ne se tourne pas vers la philosophie d'un grand financier mais bien vers celle du joueur de tennis Björn Borg. Vainqueur de 11 tournois du Grand Chelem, le Suédois était réputé pour sa patience sur le terrain.

«Il retournait toujours la balle de l'autre côté du filet, se rappelle Luc de la Durantaye. Il ne faisait jamais d'erreurs. Dans les conditions actuelles, l'objectif est de ne pas faire d'erreurs à la Bourse.»

Si l'incertitude règne sur les marchés boursiers, Luc de la Durantaye refuse de céder à la panique. «Les taux d'intérêt réels sont assez bas, ce qui ne laisse pas croire à un ralentissement économique, dit-il. Si c'est le cas, la correction boursière que tout le monde attend pourrait venir plus tard que prévu.»

Gestion d'actifs CIBC préfère encore les actions -surtout celles des pays émergents- aux obligations.

«Depuis la crise du crédit l'été dernier, les gens se sont rués vers les obligations, ce qui a poussé leur évaluation vers des niveaux très élevés, dit Luc de la Durantaye. Les actions restent encore la catégorie d'actifs la moins chère. Nous avons une surpondération d'actions de pays émergents dans nos portefeuilles, mais avec une certaine anxiété. Les menaces d'inflation en Asie pourraient provoquer une correction boursière.»

Et le pétrole, enfant chéri des investisseurs canadiens au cours des derniers mois? À court terme, la société de gestion de portefeuilles croit à la montée de l'or noir -même si la demande est maintenue artificiellement dans plusieurs pays par des subventions gouvernementales. Des subventions qui ne risquent pas de disparaître de sitôt, selon Luc de la Durantaye.

«Des 13 pays où le prix du pétrole est moins élevé qu'aux États-Unis, huit sont des pays de l'OPEP (Organisation des pays exportateurs de pétrole), dit-il. Ils ont intérêt à ne pas faire diminuer la demande afin de garder le prix du baril élevé. Pour ces pays, les subventions sont aussi une façon de faire bénéficier leurs citoyens de leur richesse pétrolière.»

«Seule la Chine peut réduire les subventions et elle ne le fera pas avant les Jeux olympiques, continue-t-il. De toute façon, le pétrole ne constitue que 0,6% de son PIB (produit intérieur brut). La Chine peut se permettre de continuer à subventionner le prix du pétrole.»

À long terme, par contre, l'industrie pétrolière pourrait devenir moins attrayante pour les investisseurs. «Si le prix du pétrole augmente trop, la demande va diminuer, dit Luc de la Durantaye. À 240$US le baril, il y aura d'autres sources d'énergie. Le problème va se régler par lui-même.»