L'économie de la zone euro paraît s'engager dans une phase marquée par un ralentissement sur fond d'inflation élevée, un dilemme que la Banque centrale européenne espère en partie résoudre avec une hausse de taux directeurs controversée.

L'économie de la zone euro paraît s'engager dans une phase marquée par un ralentissement sur fond d'inflation élevée, un dilemme que la Banque centrale européenne espère en partie résoudre avec une hausse de taux directeurs controversée.

Plusieurs statistiques ont récemment jeté un voile sur la conjoncture des Quinze jusqu'ici étonnement résistante à la crise financière mondiale, la force de l'euro face au dollar -qui défavorise les exportateurs- et la folle ascension des prix du pétrole.

Mardi, l'annonce d'un baromètre de la consommation allemand GfK en fort recul a enterré les espoirs d'une reprise des dépenses des ménages cette année tant espérée par le gouvernement d'Angela Merkel.

«Les consommateurs allemands ont vraiment jeté l'éponge maintenant», a réagi Andreas Rees, économiste chez Unicredit. Une tendance généralisée en zone euro.

Certes, la hausse mensuelle inattendue de 2% en mai de la consommation de biens manufacturés en France, annoncée mardi par l'Insee, détonne. Mais «au-delà de la volatilité mensuelle, les dépenses des ménages stagnent», estime Gilles Moec, analyste à la Bank of America.

Le yoyo des dépenses, en baisse en mars et en avril, semble notamment lié à des changements d'habitude dans les achats de vêtements, liées aux conditions climatiques inhabituelles depuis le début de cette année.

Les Européens rechignent à débourser face à l'envolée des prix de l'énergie et du carburant -mal ressentie à la veille des départs en vacances d'été-, et à la valse des étiquettes sur les denrées alimentaires, responsables des tensions inflationnistes actuelles.

Côté industrie et services, la situation se dégrade. L'activité -mesurée par l'indice PMI Composite très suivi par les experts économiques- s'est contractée contre toute attente en zone euro en juin, pour la première fois depuis cinq ans, selon l'étude de la société Markit parue lundi.

Si les grand pays comme la France et surtout l'Allemagne sont restés relativement solides, «il en va autrement de l'Espagne, de l'Italie ou encore de l'Irlande et du Portugal», soulignent les économistes de la DekaBank dans une étude. Et le pire reste à venir pour les Quinze, prédit l'établissement.

L'Espagne, confrontée à une crise immobilière, a récemment revu sa prévision et mise désormais sur une croissance inférieure à 2%. Le coup de frein est violent, après la hausse de 3,8% de 2007.

Dans ce contexte morose, certains responsables politiques en Espagne ou en France ont émis des doutes sur la pertinence d'une hausse de taux directeurs en zone euro. La BCE a clairement ouvert la voie à un tel geste dès le 3 juillet, prétextant de risques inflationnistes sur le moyen terme.

Fait plus rare, les économistes commencent aussi à s'interroger. «Le geste est risqué», considère Gilles Moec, et la BCE pourrait être désignée comme responsable d'une grande partie du ralentissement économique appelé à s'amplifier.

Mais l'institut monétaire donne la priorité à la lutte contre l'inflation, comme le lui assigne le Traité de Maastricht. Le taux, qui a atteint un pic de 3,7% en mai sur un an, s'avère préjudiciable à la consommation, et donc à la croissance.

La BCE sait qu'elle ne peut rien contre la hausse actuelle des prix, mais veut, en remontant légèrement son principal taux à 4,25%, affirmer sa crédibilité en démontrant sa détermination à accomplir son devoir de stabilité des prix.

C'est pour cette raison aussi qu'après avoir clairement annoncé la couleur début juin, elle ne peut à présent plus faire marche arrière et devrait bien resserrer la vis du crédit dans une semaine, selon les économistes.