La hausse du prix de l'or donne en général plusieurs signaux aux investisseurs: elle annonce la reprise de pressions inflationnistes, elle témoigne de l'affaiblissement du dollar américain et des monnaies qui y sont arrimées et, surtout, elle présage d'une crise financière.

La hausse du prix de l'or donne en général plusieurs signaux aux investisseurs: elle annonce la reprise de pressions inflationnistes, elle témoigne de l'affaiblissement du dollar américain et des monnaies qui y sont arrimées et, surtout, elle présage d'une crise financière.

Bref, ça ressemble aux temps qui courent.

«L'or est un actif pur. En s'en procurant, les gens se protègent», martèle Donald Coxe, stratège global chez BMO Groupe financier qui l'oppose à tous les produits structurés qui polluent à ses yeux ces jours-ci le système financier.

Pour sa visite annuelle à Montréal, le coloré prévisionniste des tendances de l'économie mondiale prévoit que les indices boursiers vont continuer de glisser. La crise financière qui va encore éprouver les institutions financières et les golden boys de Wall Street ne sera pas résorbée de sitôt, ni celle de l'habitation qui lui a servi d'assise.

Dans ses 12 recommandations d'investissements pour la présente année, M. Coxe signale d'ailleurs qu'une récession américaine est une bonne nouvelle «seulement pour l'or».

Il est d'avis que le présent cycle haussier du métal jaune pourra durer encore longtemps. Les investisseurs en veulent, le consommateur aussi.

Les banques centrales occidentales ont beau diminuer leurs réserves, elles ne comblent plus la demande croissante des ménages des économies émergentes, celle de l'Inde en particulier.

La tradition veut encore là-bas qu'une fille doive apporter sa dot en mariage. L'enrichissement des citoyens a pour effet de grossir la dot exigée par les prétendants. La coutume veut qu'elle soit sous forme de bijoux.

Dans ces conditions, l'or pourrait bien franchir la barre des 1000 $US l'once prochainement et s'y maintenir un moment. «On sait que le marché baissier en Bourse est terminé quand le prix de l'or arrête de monter», fait remarquer M. Coxe.

Il a accueilli avec beaucoup d'inquiétude la décision de la Réserve fédérale d'abaisser de manière impromptue de 75 centièmes ses taux directeurs, le 22 janvier. «Forcer Ben Bernanke et cie de ranimer le Greenspan Put, et propulser l'or à des sommets, pourrait bien propager la peste économique«, déplore-t-il.

M. Coxe n'est d'ailleurs pas tendre à l'égard du prédécesseur de M. Bernanke. «Alan Greenspan est l'économiste le plus surévalué de tous les temps», résume-t-il dans une des formules chocs qui rendent ses causeries si savoureuses.

M. Coxe craint en particulier le retour de l'inflation. Elle est nourrie simultanément par la hausse des prix des aliments qui va s'accélérant et par le choc démographique qui raréfiera la main-d'oeuvre au cours des 25 prochaines années et poussera les salaires à la hausse.

«Nous recommandons depuis avril d'investir dans l'or pour se prémunir contre l'inflation au cours des cinq prochaines années», écrit-il dans la dernière édition de sa revue Basic Points qui sert de canevas à sa tournée de causeries.

S'il est tout d'un coup devenu chic de parler de l'or comme de la «nouvelle devise mondiale», ajoute-t-il, alors les classes d'actifs qui ont profité de la vaste expansion du papier monnaie comme les actions, les obligations et les produits dérivés courent le risque d'être dévalués substantiellement.

M. Coxe croit que le prix des commodités subira une correction moins grande que les actifs de papiers parce que la demande reste au rendez-vous et le niveau des stocks très faible.

Il ajoute que les actions des grands producteurs subiront moins le choc d'un marché boursier baissier en bonne partie parce que les grands producteurs mondiaux ne sont pas des compagnies américaines scrutées par Wall Street. Leurs prix sont moins soufflés.

Par-dessus tout, il craint une pénurie mondiale de céréales, de lait et de viande. Les réserves mondiales de blé équivalent à sept semaines de consommation seulement, dit-il, alors que la classe moyenne grossit chaque année de quelque 50 millions d'individus friands d'une diète plus riche en protéines, grâce au boom des économies indienne et chinoise.

Si ces pays ralentissent, ça signifie seulement que les rangs de la classe moyenne vont grossir moins vite.

Le prix des céréales et des oléagineuses n'a pas fini de grimper en chandelle. Il encourage fortement le Québec à cesser sa gestion de l'offre en agriculture pour s'ouvrir aux marchés mondiaux.

«Coupez les forêts et semez du maïs, recommande-t-il. De toute façon avec la crise américaine de l'habitation, qui veut encore du bois?»