On pensait que le litige entre Cinar et le fondateur Ronald Weinberg était terminé. Or, on apprend que le récent règlement à l'amiable est en péril parce qu'entre-temps, une partie de l'argent en jeu a été investie dans... du papier commercial contaminé.

On pensait que le litige entre Cinar et le fondateur Ronald Weinberg était terminé. Or, on apprend que le récent règlement à l'amiable est en péril parce qu'entre-temps, une partie de l'argent en jeu a été investie dans... du papier commercial contaminé.

La Presse Affaires a mis la main sur une requête en Cour supérieure qui fait état de l'énième rebondissement de l'affaire Cinar. Rappelons que les deux parties ont conclu un règlement à l'amiable le 13 février dernier, après s'être affrontées en Cour pendant sept ans.

L'entente est demeurée confidentielle, mais tout indique que Ronald Weinberg a accepté de verser quelques millions de dollars en échange de la levée des procédures contre lui. Cinar lui réclamait plus de 100 M$.

Maison de Westmount

Dès le 18 février, les procureurs de Cinar ont commencé à récolter l'argent obtenu dans l'entente, est-il indiqué dans la requête.

Entre autres, on a réclamé le produit net de la vente de la maison de Westmount et du chalet de Magog, vendus à la fin de 2006.

L'argent -une somme de 3,4 millions de dollars- avait été confié à l'huissier de justice Paquette et associés, est-il indiqué dans la requête datée du 26 mars.

Le hic, c'est que cet argent n'est plus disponible parce qu'il a été investi dans du papier commercial contaminé. Il s'agit du fameux papier qui fait l'objet d'un gel de transactions depuis la mi-août 2007, le même que celui que détient la Caisse de dépôt et placement.

Le papier pourrait être dégelé, éventuellement, mais hier, le comité de restructuration a une fois de plus reporté l'échéance au 31 mai.

Si la restructuration est acceptée par les détenteurs, le papier ne pourrait cependant être vendu à court terme, mais dans seulement sept ans, en moyenne. Bref, les ex-actionnaires en Bourse de Cinar risquent de devoir être patients avant de recouvrer cet argent.

Cinar n'a appris que le 26 février 2008 la nature de l'investissement du huissier Paquette. L'argent avait d'abord été placé en fidéicommis dans un compte de la Banque Nationale.

Il a par la suite été transféré au courtier Financière Banque Nationale (FBN), qui l'a investi dans du papier commercial.

Dans sa requête, Cinar affirme que cet investissement compromet l'entente à l'amiable avec Ronald Weinberg.

«Cinar n'aurait jamais accepté l'entente si elle avait su que le produit de la vente des immeubles avait été investi» dans du papier commercial contaminé.

Paquette blâmé

La maison de production soutient que Paquette n'aurait jamais dû investir cet argent dans du papier commercial.

Selon la requête, ce placement est contraire aux règles de la Chambre des huissiers de justice du Québec, selon lesquelles «l'huissier doit déposer dans une institution financière autorisée à recevoir des dépôts toute somme d'argent ou effet de commerce perçu...».

Cinar soutient que le courtier FBN n'est pas une «institution financière autorisée à recevoir des dépôts».

Elle réclame donc que Paquette et associés, de même que Ronald Weinberg, transfèrent 3,4 millions de dollars dans le compte in trust de ses avocats (Davies Ward Philips&Vineberg).

«Si les fonds ne sont pas transférés, Cinar n'aura d'autres choix que de prendre les procédures pour annuler l'entente (avec Ronald Weinberg)», est-il écrit dans la requête.

La Banque Nationale pointée

Joint au téléphone, le président de Paquette et associés, Charles Paquette, ne nie pas que l'argent ait été investi dans le papier commercial contaminé.

Cependant, il soutient avoir «fait tout ce qui conforme aux règles de notre profession», contrairement à ce que prétend la requête.

«À nos yeux, c'est la Banque Nationale qui a mal agi», a dit le président de Paquette et associés, en affaires depuis 1973.

De son côté, l'avocat de Ronald Weinberg, Jean Lozeau, affirme que ni lui ni son client n'était au courant de l'investissement dans le papier commercial. L'avocat de Cinar, Mark Schrager, est déçu de ce nouveau rebondissement, mais il n'a pas voulu faire de commentaires.

La cause sera entendue devant le juge Jean-Yves Lalonde demain.