L'ex-président de Cinar, Ron Weinberg, multiplie les mises en demeure concernant la diffusion d'un documentaire sur son épouse feu Micheline Charest et sur lui-même, qui doit prendre l'affiche du Cinéma du Parc à partir du 28 mars.

L'ex-président de Cinar, Ron Weinberg, multiplie les mises en demeure concernant la diffusion d'un documentaire sur son épouse feu Micheline Charest et sur lui-même, qui doit prendre l'affiche du Cinéma du Parc à partir du 28 mars.

Le documentaire, La femme qui ne se voyait plus aller, de la journaliste Francine Pelletier, relate l'ascension, puis la chute dans le déshonneur du couple Charest-Weinberg à la tête de Cinar, leur maison de production d'émissions pour enfants. Le film s'intéresse surtout à la perspective de la flamboyante Mme Charest.

Le 18 février dernier, l'avocat de Ron Weinberg et de la succession de Mme Charest, Me Jean Lozeau, a envoyé une mise en demeure aux Rendez-vous du cinéma québécois, deux jours avant la projection du documentaire lors de ce festival cinématographique de Montréal.

La mise en demeure exprime l'opposition de M. Weinberg à ce que le film soit diffusé et tient les Rendez-vous du cinéma québécois «responsables de tous les dommages que vous pourriez causer à nos clients».

Les organisateurs de l'évènement annuel ont quand même présenté le film le 20 février.

La directrice générale des Rendez-vous du cinéma québécois, Ségolène Roederer, n'a pas rappelé La Presse jeudi.

Il s'agit de la troisième mise en demeure concernant ce film. M. Weinberg a aussi mis en demeure Les Productions Virage, la maison qui a financé le documentaire, ainsi que la Société Radio-Canada, qui détient les droits de télédiffision du documentaire, après sa vie en salle.

Le film doit prendre l'affiche pour au moins deux semaines au Cinéma du Parc. Le propriétaire de ce cinéma répertoire, Roland Smith, a dit jeudi à La Presse qu'il n'a pas reçu de mise en demeure à ce sujet.

Les mises en demeure envoyées aux Productions Virage et à Radio-Canada en août 2007 font valoir que la diffusion du film pourrait avoir des conséquences pour M. Weinberg, la succession de Mme Charest et quatre firmes appartenant au couple, dans le contexte de poursuites devant les tribunaux.

«Compte tenu de l'impact que le reportage pourrait avoir sur les procédures judiciaires pendantes, vous êtes par les présentes formellement mis en demeure de ne pas diffuser le reportage, à défaut de quoi nos clients vous tiendront entièrement responsables de tous les dommages qui pourraient leur être causés, d'autant plus que vous n'avez pas la version de nos clients quant aux faits faisant l'objet du reportage», écrit l'avocat de M. Weinberg.

L'avocat de M. Weinberg, Me Lozeau, n'a pas voulu commenter sa démarche, mais il a accepté de faire parvenir une copie de ses lettres à La Presse.

M. Weinberg n'a pas rappelé La Presse.

Protégés en cas de poursuite

L'auteure du documentaire, Francine Pelletier, n'a pas voulu faire de déclaration à ce sujet, référant toutes les questions de La Presse aux Productions Virage, où la productrice Monique Simard a confirmé avoir reçu une mise en demeure.

«M. Weinberg n'avait jamais voulu nous accorder d'entrevue durant le tournage du film, a expliqué jeudi Mme Simard. Mais l'été dernier, il a voulu voir le film avant sa diffusion.»

Les Productions Virage ont refusé. «Nous sommes protégés par une assurance erreur et omission en cas de poursuite», a ajouté Mme Simard.

La plus récente mise en demeure de M. Weinberg, le 18 février, est survenue cinq jours après que M. Weinberg eut réglé à l'amiable une poursuite au civil de 110 millions de dollars intentée contre lui par Cinar, qui reprochait au couple Charest-Weinberg des fraudes, des malversations et le détournement de 59 M$ dans des comptes offshore aux Bahamas. M. Weinberg avait répondu par une poursuite contre Cinar.

Après des succès financiers, boursiers et commerciaux durant les années 90. Cinar a été secouée par une série de scandales et d'allégations de fraudes.

Le couple fondateur a dû quitter la direction de Cinar en mars 2000 après qu'il eut été révélé que 122 millions de dollars avaient été transférés aux Bahamas sans l'autorisation du conseil d'administration.

L'action de Cinar a chuté, la firme a cessé ses activités et ses restes ont été vendus.

Le documentaire n'apporte aucune révélation nouvelle au cas très médiatisé de Cinar, mais il fait une narration cohérente et bien ficelée d'un scandale complexe qui n'a jamais été scruté par la tenue d'un procès.

Au terme d'une enquête de la Gendarmerie royale du Canada, aucune accusation au criminel n'a été portée contre Mme Charest et M. Weinberg.

Une enquête de la Commission des valeurs mobilières du Québec s'est terminée par une entente administrative à l'amiable et un versement sans admission de faute de 2 M$.