La téléphonie par Internet, en popularité croissante, demeure vulnérable à un acheminent erroné des appels d'urgence au 911, avertissent des experts en télécommunications.

La téléphonie par Internet, en popularité croissante, demeure vulnérable à un acheminent erroné des appels d'urgence au 911, avertissent des experts en télécommunications.

Et cette vulnérabilité serait l'une des causes du décès d'un bébé d'une famille de Calgary il y a quelques jours, une triste affaire qui entache la téléphonie par l'internet dans les médias anglophones depuis le week-end.

Rappel de la situation: inquiète des convulsions d'un bébé, sa tante et gardienne a appelé le 911 avec le téléphone internet au domicile des parents. Mais l'appel n'est pas parvenu aux services d'urgence proches, en raison d'une erreur d'acheminement chez le fournisseur de téléphonie internet.

Il a fallu un deuxième appel au 911 par la gardienne, avec le téléphone traditionnel d'un voisin, pour alerter les ambulanciers de Calgary. Mais ils sont arrivés à la résidence presque 30 minutes après le premier appel par téléphone internet, trop tard pour sauver le bambin.

«C'est une triste histoire que ramène au premier plan les lacunes de la téléphonie par l'internet par rapport au téléphone traditionnel», constate Iain Grant, directeur de Seabord, firme de Montréal d'analyse en télécommunications.

«La téléphonie par l'internet coûte moins cher que les lignes de Bell ou de Telus, mais elle implique plus de manoeuvres de la part de l'usager, en particulier pour les appels 911», souligne-t-il.

«Avec la téléphonie Internet, les abonnés doivent tenir à jour ou fournir sur demande leur lieu d'appel, surtout pour le 911. Avec la téléphonie traditionnelle, cette information s'affiche automatiquement à la centrale 911 la plus proche, lors d'un appel d'urgence», a résumé M. Grant.

Vidéotron se fait rassurant

Cette différence de traitement des appels 911 entre les deux types de téléphonie, encore méconnue des usagers admet M. Grant, pourrait être à l'origine de l'incident de Calgary.

Mais comme technologie émergente, la téléphonie par Internet n'en est pas à sa première méprise de perception.

D'ailleurs, chez Vidéotron, qui est devenu un important concurrent de téléphonie de Bell au Québec avec près de 700 000 abonnés résidentiels en trois ans à peine, on avait fort à faire lundi pour calmer les appréhensions découlant de l'incident de Calgary.

«Nos abonnés de téléphonie par câble ne doivent avoir aucune crainte envers leurs appels au 911, qui sont aussi fiables sur notre réseau câblé que sur celui de Bell», a soutenu Marc Labelle, porte-parole de Vidéotron.

«Ce qui peut confondre, c'est que nous utilisons une technologie téléphonique qui découle d'internet, le VOIP, mais qui transite sur notre propre réseau câblé, sans passer par Internet. Donc, comme le téléphone de Bell, les appels d'urgence vont automatiquement à la centrale 911 la plus proche, avec les informations de localisation.»

Mais chez le principal arbitre des télécommunications, le CRTC, on admet que l'incident de Calgary pourrait "réchauffer un peu les pieds des fournisseurs de téléphonie par l'internet" pour qu'ils vérifient leur procédé des appels au 911.

«Aussi, ça pourrait accélérer leur adhésion au protocole de 911 amélioré de meilleur gestion des appels d'urgence qui prévaut déjà chez les Bell et Telus, ainsi que les câblos comme Vidéotron, Rogers et Shaw», a expliqué Paul Gaudin, directeur divisionnaire au CRTC.

Ces fournisseurs de téléphonie par l'internet sont surtout les Vonage, Uniserve et Babytel, par exemple, qui ont ajouté cette technologie pour bonifier leurs services d'accès à Internet.

Vidéotron est aussi dans ce créneau avec son «téléphone-logiciel», offert en option à son accès à l'internet.

Normes spécifiques

Aussi, dit-on au CRTC, la téléphonie internet de type «nomade» est la plus en cause envers les appels 911. D'autant plus que l'accès par un site internet peut s'effectuer de tout ordinateur adéquat, et de tout endroit autre que l'adresse principale de l'abonné.

Entre-temps, les fournisseurs de téléphonie par l'internet ont des normes spécifiques du CRTC pour les appels 911, dont celui d'exploiter leur centre d'identification et d'aiguillage.

Aussi, au moment de la vente d'un abonnement, le fournisseur doit conserver une preuve que son client a été informé des précautions avec les appels 911, et qu'il en est informé au moins une fois l'an.