La force du dollar canadien et le ralentissement américain rattraperont l'économie québécoise en 2008, mais la baisse des impôts et les investissements massifs du gouvernement dans les infrastructures permettront à la province de limiter les dégâts.

La force du dollar canadien et le ralentissement américain rattraperont l'économie québécoise en 2008, mais la baisse des impôts et les investissements massifs du gouvernement dans les infrastructures permettront à la province de limiter les dégâts.

C'est ce que prévoit l'économiste Hélène Bégin, du Mouvement Desjardins. Elle calcule que le plan d'infrastructures du gouvernement du Québec, 30 G$ au cours des cinq prochaines années, fera bondir à lui seul de 0,25% la croissance du produit intérieur brut (PIB) en 2008. Le plan prévoit la réfection d'écoles, de routes, d'hôpitaux et d'infrastructures municipales.

À cela s'ajouteront les réductions d'impôts de plusieurs milliards de dollars annoncées par Québec et Ottawa pour 2008, de même que la baisse d'un autre point de pourcentage de la TPS, qui est entrée en vigueur le 1er janvier.

Ces injections gouvernementales majeures ne réussiront toutefois pas à faire faire des miracles à l'économie québécoise en 2008.

Desjardins prévoit une croissance du PIB québécois de tout juste 1,7%, alors que la Banque Nationale table sur un maigre 1,6%.

À l'instar de l'Ontario et du Nouveau-Brunswick, le Québec continuera de tirer de l'arrière par rapport à l'ensemble du Canada, qui devrait progresser d'au moins 2% en 2008, toujours propulsé par l'Ouest canadien.

La force du dollar canadien, qui s'est apprécié de plus de 17% en 2007 pour atteindre la parité avec la devise américaine, continuera de donner du fil à retordre aux manufacturiers exportateurs québécois les moins productifs, qui font déjà face à une profonde restructuration en raison de la vive concurrence asiatique.

Les manufacturiers vont souffrir

«Le déficit commercial se creuse vraiment et mine la croissance de l'économie québécoise», note Mme Bégin. Pour les neuf premiers mois de l'année 2007, le solde des échanges du Québec avec l'extérieur a affiché un déficit de 7,4 G$, et ce, malgré l'excellente performance de l'industrie aéronautique.

Carlos Leitao, économiste en chef de la Banque Laurentienne, souligne dans ses prévisions que le Québec et l'Ontario trouveront l'année 2008 plus difficile que les deux précédentes, à cause notamment de la hausse des prix de l'énergie, de l'appréciation du dollar canadien, de la faiblesse de la demande intérieure américaine et de la volatilité «préoccupante» des marchés financiers.

Les études indiquent que l'économie n'accuse la pleine incidence des variations de taux de change qu'un an à un an et demi après le fait, mentionne M. Leitao dans ses prévisions annuelles. Par conséquent, les exportateurs n'ont pas encore pleinement «digéré» la hausse du dollar canadien, selon lui.

Le Mouvement Desjardins prévoit que le secteur manufacturier québécois éliminera 40 000 emplois de plus en 2008, soit davantage en une année que les 34 000 postes perdus en 2006 et les 35 000 prévus en 2007. Depuis novembre 2002, les fabricants ont supprimé pas moins de 145 000 postes au Québec.

Tous les économistes s'entendent pour dire que le dollar canadien se maintiendra près de la parité avec la devise américaine en 2008, ce qui devrait permettre aux exportateurs de reprendre leur souffle, du moins ceux qui ont su s'ajuster à la nouvelle donne.

L'économiste en chef de la Banque Scotia, Warren Jestin, prévoit que la valeur moyenne du dollar canadien sera de 1,05 $ US en 2008, alors que Carlos Leitao s'attend à ce qu'il termine l'année dans les alentours de 97,5 ¢ US.

Immobilier et placememnts

Du côté de l'immobilier, Hélène Bégin ne s'attend pas à une répétition du rebond surprise des mises en chantier enregistré en 2007. Elle s'inquiète du risque de surconstruction, notamment dans le secteur des résidences pour personnes âgées.

«Dès l'an prochain, on devrait assister à une accalmie des mises en chantier parce qu'à mesure que les surplus vont poindre à plusieurs endroits, la construction devrait s'estomper», affirme Mme Bégin.

Pour ce qui est des placements, face au ralentissement anticipé de la progression des bénéfices des sociétés, les stratèges recommandent un retour aux titres d'entreprises de grande capitalisation, notamment dans les secteurs dits «défensifs» (consommation courante, services publics, soins de santé).

Vincent Delisle, directeur des stratégies de portefeuille à la Scotia, suggère de profiter de l'appréciation du huard pour faire le plein d'actions américaines dans des secteurs sous-représentés à la Bourse de Toronto. De façon générale, pour 2008, la Scotia table sur des rendements totaux de 8% pour les actions, de 4% pour les liquidités et de deux pour cent pour les obligations.