Le Mouvement Desjardins y va d'un vigoureux plaidoyer contre l'idée d'instaurer un organisme pancanadien de réglementation des valeurs mobilières dans un mémoire déposé auprès d'un comité chargé d'étudier la question.

Le Mouvement Desjardins y va d'un vigoureux plaidoyer contre l'idée d'instaurer un organisme pancanadien de réglementation des valeurs mobilières dans un mémoire déposé auprès d'un comité chargé d'étudier la question.

Les critiques du régime actuel, composé d'entités réglementaires distinctes dans chacun des 13 provinces et territoires, sont fondées sur des «mythes» et des «perceptions» qui ne résistent pas à l'analyse, fait valoir la coopérative financière dans un document d'une vingtaine de pages, rendu public jeudi.

«Il fut un temps où l'on était en droit de déplorer la balkanisation du marché canadien, où l'absence de règles communes et de mécanismes de coordination imposait des limites sérieuses et réelles au bon fonctionnement et à l'intégrité de nos marchés des capitaux», convient Desjardins.

Cependant, «les progrès réalisés au cours des dernières années ont été réels et font aujourd'hui en sorte que ces critiques ne sont plus pertinentes et ne font que dévier les débats vers d'hypothétiques réformes de structures», poursuit-on.

Passer à un système centralisé de réglementation serait «inutile au mieux, contre-productif au pire», à cause notamment des importants coûts que la transition et le maintien de bureaux régionaux imposeraient, estime le Mouvement Desjardins.

C'est sans compter qu'il faudrait s'attendre à une contestation constitutionnelle d'une centralisation imposée par Ottawa, souligne Desjardins. Dans un tel cas, l'institution entrevoit que le Québec ferait bande à part, peut-être avec d'autres provinces, ce qui reproduirait «une balkanisation que l'on voulait au départ éliminer».

Pire encore, la plus importante institution financière québécoise craint qu'un organisme pancanadien n'ait pour conséquence de reproduire le système américain, avec ses qualités mais aussi ses défauts, notamment sa lourdeur bureaucratique et juridique.

Les tribunaux canadiens doivent continuer de resserrer les peines qu'ils imposent aux fraudeurs, reconnaît Desjardins, en avançant toutefois qu'il n'est pas nécessaire, pour y arriver, de centraliser la réglementation des valeurs mobilières au pays.

La GRC et les cours dans la mire

Au passage, la coopérative ne manque pas d'égratigner le système judiciaire et la Gendarmerie royale du Canada (GRC).

«La centralisation est loin de garantir les résultats, comme a récemment pu le constater le gouvernement fédéral dans la mise sur pied d'équipes de la GRC dédiées aux enquêtes sur les marchés financiers (les équipes intégrées)», écrit Desjardins, en faisant remarquer qu'Ottawa réévaluait actuellement cette initiative.

«Mais surtout, les services policiers et les commissions de valeurs mobilières doivent composer avec un système judiciaire qui, au Canada, ne semble pas s'être adapté à des réalités économiques et financières de plus en plus sophistiquées», renchérit l'institution.

Desjardins rappelle que dans deux autres pays occidentaux, les États-Unis et l'Allemagne, les États fédérés jouissent de pouvoirs étendus en matière de valeurs mobilières. Qui plus est, relève-t-on, l'OCDE a classé le Canada au deuxième rang mondial pour ce qui est de la qualité de l'encadrement du commerce des valeurs mobilières.

Au lieu de consacrer des énergies à la centralisation, le Canada devrait moderniser davantage ses lois et renforcer l'application de ces dernières, soutient Desjardins, en pressant également l'Ontario de rentrer dans le rang (la province s'est dissociée du système pancanadien de passeport l'année dernière).

Comme on pouvait s'y attendre, la totalité des mémoires déposés par des représentants de la communauté financière torontoise prônent la création d'un organisme unique.

La Banque Nationale [[|ticker sym='T.NA'|]] n'a pas déposé de mémoire au comité. Elle ne prend pas position fermement pour ou contre une entité pancanadienne, a indiqué un porte-parole, Denis Dubé

«Avant de parler de structures, il faut parler d'efficience de la réglementation», a déclaré M. Dubé au cours d'un entretien téléphonique. «On est prêts à regarder différentes options pour améliorer l'efficacité et on est ouverts aux discussions.»

C'est le ministre fédéral des Finances, Jim Flaherty, qui a instauré, plus tôt cette année, le Groupe d'experts chargé d'examiner la réglementation des valeurs mobilières. Le comité a pour mandat de rédiger une loi modèle établissant une commission pancanadienne d'encadrement du secteur financier. Il doit publier ses conclusions d'ici la fin de l'année.