C'est sans illusions, mais avec une dose d'optimisme prudent que la délégation canadienne se présente ce week-end au sommet du Groupe des 20 (G20) pour y plaider la nécessité d'un réalignement monétaire plus équitable.

C'est sans illusions, mais avec une dose d'optimisme prudent que la délégation canadienne se présente ce week-end au sommet du Groupe des 20 (G20) pour y plaider la nécessité d'un réalignement monétaire plus équitable.

Tant le ministre des Finances Jim Flaherty que la haute direction de la Banque du Canada martèlent le même clou depuis plusieurs jours.

La dépréciation du billet vert américain ne doit pas se faire uniquement au détriment des économies qui laissent flotter leur monnaie, comme les membres de la zone euro et le Canada.

Certes bienvenue, la correction que subit le huard depuis son sommet de plus de 110 cents US du 7 novembre ne doit pas faire oublier aux autres nations que la monnaie canadienne s'est ballonnée de 20% face au billet vert, cette année seulement. Il y a quatre ans à peine, elle n'achetait que 62 cents américains.

Au Cap, le ministre Flaherty et le gouverneur de la Banque du Canada David Dodge feront valoir l'importance que chacun fasse sa part pour résoudre de manière ordonnée les grands déséquilibres mondiaux.

Le Canada a absorbé à lui seul le tiers de la dépréciation du billet vert, soit autant que toute la zone euro.

Pourtant, les Canadiens sont 10 fois moins nombreux que les Eurolandais. En outre, ces derniers commercent surtout entre eux et les autres membres de l'Union européenne et assez peu avec les États-Unis.

Le Canada, au contraire, expédie les trois quarts de ses exportations aux États-Unis dont il est aussi le premier client. Voilà pourquoi, la chute du billet vert nous touche plus que toute autre nation, plaideront MM. Flaherty et Dodge.

Le bras-de-fer

Les grands déséquilibres peuvent se résumer de la façon suivante: les États-Unis accumulent depuis 2001 un double déficit commercial et budgétaire alors que des économies émergentes comme la Chine, l'Inde ou les membres de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) regorgent de surplus qu'ils ne recyclent pas de la manière la plus efficace.

Les Américains, locomotive de l'économie mondiale durant les premières années de la décennie, laissent dériver leur monnaie. Ils espèrent améliorer à court terme leur bilan commercial.

Une monnaie faible est une arme à deux tranchants qui favorise les exportations, mais stimule l'inflation en érodant le pouvoir d'achat des ménages et des entreprises.

Les économies émergentes préfèrent jusqu'ici financer la dette américaine à partir de leurs surplus colossaux plutôt que de réévaluer leurs monnaies.

Une réévaluation ferait grimper le prix de leurs exportations qui trouveraient moins facilement preneur. En revanche, cela stimulerait aussi la demande intérieure. À terme (mais quand au juste? telle est la grande question?), l'expansion de leurs économies serait moins dépendante du commerce extérieur.

En laissant aller le dollar, les États-Unis créent sciemment beaucoup de tension. Le Canada en absorbe plus que sa part, mais les pays à monnaie non flottante en subissent aussi insidieusement les effets. La Chine détient plus de 1400 milliards de devises étrangères dont 70% en dollars américains.

S'il s'est déprécié de 15% environ face aux autres grandes monnaies à taux flottant, c'est dire que la valeur marchande des avoirs chinois en dollars américains a fondu d'autant. Jusqu'où l'érosion reste-t-elle acceptable pour Pékin?

L'Europe, l'Australie, le Japon et le Canada sont d'une certaine manière les alliés des États-Unis dans cette foire d'empoigne monétaire. Tous acceptent les règles du marché, celles qui prévalent en principe au sein de l'Organisation mondiale du commerce.

Un accord surprise fixant un mécanisme ordonné de réalignement monétaire paraît improbable ce week-end.

Le Canada est plutôt à la recherche d'une reconnaissance et d'une compréhension communes des déséquilibres actuels, qui vont s'aggravant.