Faudra-t-il organiser des visionnements du film Flashdance dans les polyvalentes? Dans les années 80, le film-culte avait incité nombre de jeunes filles à apprendre à danser.

Faudra-t-il organiser des visionnements du film Flashdance dans les polyvalentes? Dans les années 80, le film-culte avait incité nombre de jeunes filles à apprendre à danser.

Deux décennies plus tard, les dirigeants des entreprises métallurgiques de la province regrettent une chose: que l'héroïne, qui travaillait de jour dans une usine de métal, n'ait pas propagé davantage sa passion... de la soudure.

Les Rio Tinto, Alcoa, Arcelor Mittal et autres Aluminerie Alouette de ce monde se réveillent aujourd'hui avec une pénurie de main-d'oeuvre sur les bras. Et un constat: «on se prive de 50% de la population», a lancé hier Jean-François Turgeon, président de QIT-Fer et Titane, au cours d'un panel organisé dans les cadre des États généraux de la métallurgie.

Il n'y avait qu'à regarder la composition du panel en question pour comprendre: neuf dirigeants d'entreprise et leaders syndicaux... tous masculins, à l'image d'une industrie encore largement dominée par les gars.

Les données les plus récentes, dévoilées hier, sont implacables: les femmes représentent à peine 9,7% de la main-d'oeuvre en métallurgie. Et dans certaines tâches comme la production (3,7% de femmes) et l'entretien de machines (à peine 0,6%), elles sont pratiquement invisibles.

Il y a de quoi réfléchir. Parce que les problèmes de main-d'oeuvre dont on parle depuis longtemps en métallurgie ne représentent que la pointe de l'iceberg. Plus de la moitié des travailleurs de cette industrie sont âgés de 45 ans et plus, une proportion beaucoup plus élevée que dans l'ensemble des secteurs avec 39%.

Mais avant pour que les femmes ne viennent régler le problème, les dirigeants d'industrie avouent qu'ils ont un bout de chemin à faire.

«Il faut vraiment faire un effort. Notre industrie, malgré les nouvelles technologies, est encore parfois très physique», a dit Jean-Pierre Gilardeau, président d'Alcoa pour le Canada et l'Islande.

«Nos entreprises n'ont pas été construites pour accueillir les femmes, tranche quant à lui Jean-François Turgeon, de QIT-Fer et Titane. Dans certains postes, on aime ça montrer nos muscles et notre virilité. Mais je pense qu'on doit adapter nos postes de travail.»

Une adaptation, souligne-t-il, qui ne servirait pas qu'aux femmes: les travailleurs qui vieillissent en bénéficieraient aussi.

Signe des temps, le Comité sectoriel de main-d'oeuvre de la métallurgie remettait hier soir pour la première fois le prix Hélène Vandal, qui vise à souligner les efforts pour rendre l'industrie accessible aux femmes. Et c'est QIT-Fer et Titane, propriété de Rio Tinto, qui l'a raflé.

Les femmes sont l'une des solutions évoquées hier par les dirigeants pour résorber les problèmes de main-d'oeuvre. Plusieurs ont aussi dit souhaiter négocier des arrangements pour que les travailleurs âgés puissent demeurer à l'emploi au moins à temps partiel, question de ne pas perdre d'un coup un vaste bassin de main-d'oeuvre d'expérience.

L'Aluminerie Alouette a quant à elle embauché 40 autochtones pour faire tourner son aluminerie. Des initiatives qu'a salué Jean Charest - pas le premier ministre, mais le chercheur du Centre de recherche interuniversitaire sur la mondialisation et le travail de l'Université de Montréal qui avait été invité hier pour commenter les débats.

«Depuis trop longtemps, on parle de la pénurie de main-d'oeuvre de manière quantitative - tant de départs, tant de places à combler. On voit que la problématique est beaucoup plus complexe et je trouve la réflexion très riche», a-t-il dit.