Un autre détour est imposé à la crise du papier commercial non bancaire, cette affaire de 32 milliards de dollars dans laquelle la Caisse de dépôt et la Banque Nationale courent de grands risques.

Un autre détour est imposé à la crise du papier commercial non bancaire, cette affaire de 32 milliards de dollars dans laquelle la Caisse de dépôt et la Banque Nationale courent de grands risques.

Cette fois, après le passage d'une autre date de tombée pour une entente, vendredi dernier, le «comité Crawford» de restructuration du papier commercial a dû demander la protection de la justice pour mener à terme ses tractations, d'ici la fin d'avril.

Cette protection à l'égard des 20 fiducies émettrices de papier commercial a été obtenue en cour hier à Toronto, selon la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies. (LACC).

Cette protection juridique est consentie pour une première période de 30 jours, jusqu'au 16 avril, et pouvant être prolongée avec une autre requête en cour.

Elle est l'équivalent d'une protection de faillite pour une entreprise commerciale en péril financier qui veut se prémunir contre des recours de créanciers mécontents.

Dans ce cas-ci, il s'agit des détenteurs de papier commercial non bancaire et adossé à des actifs (PCAA), qui pourraient s'en prendre aux fiducies émettrices pour réclamer leurs fonds gelés depuis huit mois.

Selon le comité Crawford, dirigé par l'avocat d'affaires torontois Purdy Crawford, la protection des fiducies selon la LACC succède «comme prévu» à l'entente de statu quo qui prévalait entre les intervenants du PCAA.

Et avec cette protection juridique, le comité s'affirme plus en mesure de terminer sa proposition de règlement aux détenteurs de PCAA. Ces derniers devaient obtenir les documents d'information requis «au cours des prochains jours», selon M. Crawford.

Suivra l'invitation à des assemblées extraordinaires de vote qui sont prévues à la fin d'avril dans les cinq principales villes d'affaires, dont Montréal et Toronto.

La proposition du comité cible la conversion du PCAA en titre de dette à échéance jusqu'à sept ans. Elle requerra l'approbation d'une majorité double (en nombre et à 66% de la valeur) des détenteurs de PCAA.

Mais encore lundi, M. Crawford a insisté sur l'importance d'obtenir cet accord. Car l'autre solution, a-t-il averti, pourrait être une «liquidation forcée» du PCAA et des fiducies émettrices, menant à des «pertes significatives» chez ses détenteurs.

Parmi eux, on remarque des institutions financières québécoises comme la Caisse de dépôt et placement, la Banque Nationale et le Mouvement Desjardins (voir tableau).

Aussi, plusieurs entreprises avaient investi des millions en liquidités dans le PCAA, comme le voyagiste Transat AT et le détaillant Jean Coutu. Chez ce dernier, le vice-président aux finances, André Belzile, se disait résigné à attendre la proposition du Comité Crawford, malgré le délai.

«Nous avons pas mal d'argent dans le PCAA (environ 31,8 millions) et nous tenons à le récupérer», a-t-il souligné.

«Entre-temps, nous demeurons confiants d'avoir une solution à la crise dans le meilleur intérêt de tous. Et s'il devait y avoir des pertes, et faute d'entente satisfaisante, la protection des fiducies (selon la LACC) ne nous priverait pas de recours possible contre ceux (Banque Nationale) qui nous ont vendu ce papier commercial.»

Ce lot de 32 milliards en PCAA non bancaire, faut-il rappeler, est constitué de titres de placement à très court terme qui regroupent divers titres de dettes d'affaires et hypothécaires.

Ce PCAA était utilisé par des institutions financières, des investisseurs et des entreprises pour rehausser le rendement de leurs liquidités à court terme.

Ce marché du PCAA non bancaire est gelé au Canada depuis la mi-août, après l'éclatement sur les marchés financiers de la crise du crédit à risque aux États-Unis.

Cette crise du crédit, et les pertes énormes qu'elle engendre dans le milieu financier, continue de sévir sur les marchés.

Lundi encore, à la Bourse de Toronto, l'indice sectoriel des services financiers a encore reculé de 2,5%, ce qui gonfle à 24% sa perte de valeur depuis la mi-août 2007.