La crise du «subprime» a aussi fait des heureux.

La crise du «subprime» a aussi fait des heureux.

En 2007, les courtiers les mieux payés au monde ont encaissé des milliards de dollars en voyant avant tout le monde arriver l'effondrement du marché des titres adossés à des créances hypothécaires à risque.

«Pour les gens qui parient sur une crise, pire est la crise, plus ils gagnent», souligne John Challenger, du cabinet Challenger, Gray & Christmas.

Début 2006. L'emballement du secteur immobilier aux États-Unis aveugle le monde financier, mais John Paulson est persuadé qu'une crise va finir par arriver.

Depuis ses bureaux de Manhattan, ce patron du fonds d'investissement Paulson & Co mise, via des instruments financiers complexes, sur un effondrement à venir des produits financiers adossés aux crédits immobiliers «subprime». Il commence par y perdre, mais persévère.

«La plupart des gens nous disaient que les prix de l'immobilier ne chutent jamais à l'échelle nationale. Les spécialistes de l'hypothécaire étaient trop emballés» par le boom de l'immobilier, racontait récemment M. Paulson au quotidien économique Wall Street Journal.

2007, la bulle explose. À 52 ans, cet ancien étudiant de Harvard, sans lien de parenté avec le secrétaire au Trésor Henry Paulson, empoche le jackpot, pendant que son employeur dans les années 80, la banque Bear Stearns, tente en vain de limiter la casse et doit être sauvée par les pouvoirs publics.

Selon le magazine Trader Monthly, qui publie dimannche son classement annuel des 100 courtiers et gérants de fonds les mieux rémunérés, John Paulson arrive loin en tête, avec des commissions estimées à 3 milliards de dollars sur l'année dernière pour lui et son équipe.

Cela serait la plus gros chèque annuel jamais vu à Wall Street.

«C'était l'année où le cran, l'instinct et la détermination à se maintenir sur des positions contraires aux autres ont payé avec une grande ampleur», commente Rich Blake, rédacteur en chef adjoint de Trader Monthly.

La débâcle des secteurs immobiliers et bancaires, qui pourrait coûter 400 milliards de dollars aux banques d'après le Fonds monétaire international (FMI), a également été une aubaine pour le deuxième ex-aequo du classement, Phil Falcone, 45 ans, également de New York.

Les revenus de cet ancien de Barclays Capital, qui dirige désormais le fonds Harbinger Capital Partners, sont estimés à 1,75 milliard de dollars.

Et la crise du «subprime» aurait été un pari gagnant pour plusieurs autres courtiers stars, comme Richard Perry, 27e du classement avec 325 M$, ou John Burbank, de San Francisco, 31ème avec 275 M$.

«On a un système où les gérants de fonds peuvent miser de grosses sommes d'argent sur des événements défavorables. Plus la volatilité est grande, plus on voit des gains extraordinaires pour ceux qui sont du bon côté», commente M. Challenger, les courtiers se faisant payer généreusement le fort retour sur investissement apporté à leurs clients.

Toutefois, il faut non seulement voir juste, mais aussi investir au bon moment, précise-t-il.

Quelle que soit leur stratégie gagnante, en 2007, les 100 courtiers les plus payés au monde, travaillant pour la plupart dans des «hedge funds», un type de fonds très spéculatifs, ont gagné en moyenne 303,6 M$. Cinq d'entre eux ont vu leur rémunération dépasser le milliard.

Et John Paulson, qui a depuis attiré dans son équipe le très médiatique ancien président de la Réserve fédérale, Alan Greenspan, continue de jouer la carte de la crise.

Le régulateur boursier américain (SEC) a, selon la presse, ouvert une enquête sur les fortes plus-values réalisées début mars par plusieurs fonds, dont ceux de M. Paulson et de Phil Falcone, grâce à des options de vente pariant sur un effondrement de l'action de Bear Stearns prises juste avant son rachat en catastrophe par JPMorgan.