Des rumeurs sur la gestion privée de 200 M$ à 300 M$ en Suisse ont contribué à faire croire aux employés de Norbourg que le groupe de Vincent Lacroix avait les revenus nécessaires pour financer son expansion accélérée.

Des rumeurs sur la gestion privée de 200 M$ à 300 M$ en Suisse ont contribué à faire croire aux employés de Norbourg que le groupe de Vincent Lacroix avait les revenus nécessaires pour financer son expansion accélérée.

C'est ce qui ressort du témoignage de jeudi fait par Mario Lavallée au procès pénal du PDG déchu. M. Lavallée a oeuvré comme consultant pour Norbourg pendant des années et à titre de président de trois filiales en 2002 et 2003 (voir notre texte publié mercredi).

Selon ce témoin, des informations circulaient en 2001 et 2002 à l'effet que la filiale Eurobourg gérait de 200 M$ à 300 M$ pour des clients en Suisse, générant des revenus annuels allant jusqu'à 4 M$.

De tels revenus faisaient croire notamment que Norbourg avait des entrées d'argent importantes alors qu'elle croissait, malgré l'inconfort engendré par la rapidité des acquisitions.

Pour le reste, le contre-interrogatoire de Mario Lavallée par Vincent Lacroix a été chaotique en matinée. Et cette image de chaos est exactement celle dépeinte par le témoin en réponse aux questions de l'ancien PDG.

Quand Vincent Lacroix a demandé à son ancien mentor quelle image il avait laissé à titre d'élève et collègue à l'Université de Sherbrooke et à la Caisse de dépôt et placement du Québec, M. Lavallée l'a qualifié de «pas particulièrement structuré».

Selon lui, Norbourg fonctionnait de façon très informelle, avec des membres du conseil d'administration se réunissant par exemple au restaurant. Aussi, il juge que les organigrammes à l'interne «ne voulaient pas dire grand-chose» et que les décisions se prenaient en très grande partie dans le bureau de M. Lacroix.

M. Lavallée affirme avoir manqué de pouvoir malgré ses fonctions officielles et avoir été inconfortable avec la provenance du financement alors que Norbourg connaissant un essor fulgurant.

Pour ces raisons, a-t-il dit, il a démissionné après un an de service. Toutefois, cet inconfort ne l'a pas empêché de reprendre son rôle de consultant clé de Norbourg, raflant d'autres contrats...

Des mots plus durs ont été employés pour décrire la qualité de gestion quand le groupe amorçait sa croissance en 2000. M. Lavallée trouvait l'équipe de back-office «faible» et la gestion des fonds «très faible».

De son côté, M. Lacroix a ressorti des rapports du service de recherche Morningstar, soulignant que des signaux négatifs étaient émis quant au rendement des fonds gérés par Norbourg comparativement à ses pairs de l'industrie.

Avec le témoin, l'ex-PDG a rappelé que dans le contexte boursier difficile de 2002 et 2003, les fonds de Norbourg étaient très défensifs, affichant une sous-performance comparativement au reste de l'industrie.

Questionné sur les chefs d'accusation visant la manipulation par Vincent Lacroix et ses entreprises des rendements des fonds, M. Lavallée a dit que normalement, un tripotage de chiffres se ferait à la hausse et non à la baisse.

Chose certaine, ce témoin a goûté au sort des investisseurs dans cette affaire, car les contributions REER versées par lui et sa femme dans Norbourg sont tombées à zéro avec le scandale.

Alors que le contre-interrogatoire passait rapidement du coq à l'âne, le juge Claude Leblond semblait se demander dans quelle direction l'accusé s'en allait.

Il a cependant fait preuve de patience alors qu'Eric Downs, procureur de l'Autorité des marchés financiers, affichait une mine amusée.