Le procès pour fraude de Conrad Black, l'ex-magnat de presse canadien, a débuté mercredi à Chicago avec le processus de sélection des jurés.

Le procès pour fraude de Conrad Black, l'ex-magnat de presse canadien, a débuté mercredi à Chicago avec le processus de sélection des jurés.

Ils seront 12 en tout, choisis d'ici ce soir, tous résidants de la région de Chicago où était établie Hollinger International, l'entreprise à la source des accusations contre M. Black.

Ses 12 jurés devront siéger durant un procès qui s'annonce complexe mais aussi très long, «de 12 à 16 semaines», a suggéré la juge Amy St Eve, de la Cour fédérale du district nord de l'Illinois.

Une trentaine de candidats au jury ont défilé devant le tribunal hier, et une vingtaine d'autres sont attendus aujourd'hui.

Il s'agit d'hommes et de femmes âgés de 30 à 60 ans environ, provenant de divers milieux familiaux et professionnels, mais aussi d'origines ethniques variées.

«Les longs procès peuvent provoquer de gros problèmes pour des jurés, surtout ceux qui ont un emploi un peu précaire, qu'ils risquent de perdre au bout de quelques semaines. C'est pourquoi les jurés lors de longs procès sont souvent des gens en fin de carrière ou à la retraite, ou encore des jeunes sans emploi», a commenté Rick Halprin, avocat criminaliste d'expérience à Chicago.

Dans ses questions aux jurés potentiels, la juge St Eve sonde notamment leur opinion envers les crimes reprochés à des dirigeants d'entreprises.

«Vous n'entendrez rien lors de ce procès qui implique des cas très médiatisés comme ceux d'Enron ou de WorldCom, qui étaient des causes tout à fait séparées. Pouvez-vous m'assurer que vous pourrez évaluer les faits et les témoignages sans opinion préconçue?» a demandé la juge St Eve, à quelques candidats jurés.

Par ailleurs, elle vérifie aussi tout parti pris préalable envers «ceux qui reçoivent de grosses sommes d'argent pour leur travail, et qui sont fortunés».

«Je tiens à vous rappeler que ce n'est pas un crime de faire beaucoup d'argent, en autant bien sûr que ces gains soient légitimes selon les lois», a indiqué la juge St Eve.

Ces délibérations du choix des jurés ont lieu dans la même salle d'audience, au 12e étage d'un édifice fédéral du centre-ville de Chicago, qui entendra les avocats des parties.

Cette étape du procès est prévue à compter de lundi prochain.

Mais déjà, mercredi, le début du procès de Conrad Black était très médiatisé au palais de justice de Chicago, avec l'ajout au contingent local de nombreux journalistes du Canada et de Londres.

Et malgré tout, l'ex-magnat de presse, son épouse Barbara Amiel et leur entourage juridique ont réussi à se faufiler à l'insu des caméras, par une porte sur la façade opposée à celle où ils étaient attendus.

C'est rendu au 12e étage, en s'approchant de la salle d'audience, qu'ils ont dû se faufiler parmi une vingtaine de journalistes de presse écrite, dont celui de La Presse Affaires, qui venaient d'obtenir l'un des rares laissez-passer pour assister directement aux délibérations.

«Je me sens bien. Et oui, j'ai bien dormi la nuit dernière», a répondu furtivement M. Black à quelques questions.

En cour, il se trouvait avec ses avocats à une table de travail qui est directement en face du long pupitre surélevé derrière lequel s'assoit la juge St Eve, flanquée du drapeau américain et d'un gros emblème du district judiciaire du Nord de l'Illinois.

Quant à l'épouse de M. Black et leur fille, dans la jeune vingtaine, elles étaient assises dans les premiers bancs publics, à quelques pas de l'accusé.

Aussi, installés du côté gauche de la salle d'audience, on voyait trois ex-associés de Conrad Black, dont Jack Boultbee et Peter Atkinson, et leurs avocats. Ils sont aussi co-accusés dans ce procès.

Pour l'essentiel, la justice américaine reproche à M. Black et ses associés d'avoir dérobé près de 90 millions US en paiements inappropriés, lors des reventes de journaux par Hollinger International, de 1999 à 2001.

Conrad Black est aussi accusé d'avoir abusé à des fins personnelles de certains actifs de Hollinger, dont un jet privé et un appartement luxueux à New York.

S'il est jugé coupable, M. Black, qui est âgé de 62 ans, risque des amendes salées et de rester en prison jusqu'à la fin de ses jours.