Revenus à la hausse, profits faramineux, dividendes des plus généreux: les banques canadiennes ont choyé les investisseurs au cours des dernières années.

Revenus à la hausse, profits faramineux, dividendes des plus généreux: les banques canadiennes ont choyé les investisseurs au cours des dernières années.

Si bien qu'elles sont devenues à leurs yeux des titres invincibles, des superbanques aux pouvoirs surnaturels.

Mais tous les héros finissent par connaître des jours sombres et les superbanques ne font pas exception à la règle: elles accusent un retard de 15,3% sur l'indice de la Bourse de Toronto depuis le début de l'année.

En 2007, le sous-indice des banques canadiennes a perdu 5,8% de sa valeur tandis que l'indice TSX est en hausse de 9,5% (en date de jeudi à la fermeture).

Il s'agit de la première fois depuis 1999 que les banques perdent plus de 1% par rapport à l'indice de la Bourse de Toronto (en excluant les dividendes versés aux actionnaires).

Depuis huit ans, soit elles dépassaient l'indice TSX, soit leur recul était inférieur à 1%.

Le déclin des superbanques pourrait se poursuivre au cours des prochaines semaines alors qu'elles devront dévoiler combien elles ont perdu dans l'aventure du papier commercial adossé.

«Les marchés boursiers vont demeurer nerveux», dit Martin Roberge, stratège de portefeuilles chez Valeurs mobilières Dundee.

Selon Martin Roberge, les banques devraient revenir à une stratégie d'affaires plus traditionnelle.

«Au cours des dernières années, elles ont géré leurs risques en revendant leurs prêts et leurs hypothèques à risque, dit-il. Elles vont maintenant redevenir des banques traditionnelles.»

Au lieu du secteur bancaire, Martin Roberge suggère plutôt de regarder du côté des compagnies d'assurances. L'analyste Michael Goldberg, de Valeurs mobilières Desjardins, acquiesce.

Il prévoit d'ailleurs une croissance de seulement 4% pour le secteur bancaire canadien en 2008, comparativement à 13% cette année.

«Au cours des cinq dernières années, les banques ont profité de la hausse des transactions sur les marchés boursiers et de la hausse du volume de leurs activités traditionnelles de prêts, dit-il. Ces deux secteurs d'activités devraient ralentir en 2008.»

Malgré le ralentissement anticipé sur les marchés boursiers, Michel Goldberg ne conseille pas aux investisseurs de se départir de leurs actions des six grandes banques canadiennes.

L'analyste de Valeurs mobilières Desjardins recommande même l'achat des titres de la Banque Scotia et de la Banque TD. "

«Le Canada est un marché bancaire presque saturé, dit-il. Les banques canadiennes doivent aller chercher leur croissance en Amérique latine et dans les Caraïbes. Scotia et TD sont les deux banques qui ont le meilleur réseau à l'extérieur du Canada.»

Parmi les banques régionales du pays, Michael Goldberg conseille le titre de Canadian Western, une banque inconnue au Québec.

«Elle est très bien gérée et elle profite de la croissance économique de l'ouest du pays», dit-il.

Une occasion d'achat?

Pendant que d'autres s'inquiètent du repli boursier dans le secteur bancaire, le stratège Vincent Delisle voit plutôt une occasion d'achat pour les investisseurs qui n'ont pas déjà fait le plein de titres financiers.

Il suggère entre 10% et 18% de titres bancaires au sein d'un portefeuille.

«C'est très rare qu'on voie les titres bancaires se faire punir de la sorte, surtout que les banques canadiennes n'ont pas l'habitude d'avoir des véhicules de placement aussi risqués qu'aux États-Unis, dit le stratège en chef de Scotia Capitaux. Quand un secteur traverse des difficultés, il constitue parfois une belle occasion d'achat.»

Vincent Delisle admet que la croissance des profits bancaires ralentira en 2008. Mais selon lui, les investisseurs risquent d'avoir plusieurs surprises à la Bourse de Toronto l'an prochain.

«La Bourse devrait ralentir en raison de la décroissance économique mondiale et de la vigueur du huard, mais ce ralentissement fera encore plus mal à d'autres secteurs, dit-il. Dans ce contexte, une hausse des profits de 3% à 5% des banques pourrait être suffisante afin d'attirer l'attention des investisseurs.»

Avant de penser à 2008, les banques doivent terminer l'année en cours - ce qui signifie dévoiler leurs pertes reliées à la crise du crédit dans le cadre de leurs résultats du quatrième trimestre.

«Nous allons enfin avoir l'heure juste», dit le stratège Vincent Delisle.

Selon l'analyste Michael Goldberg, quatre des six grandes banques canadiennes pourraient faire oublier rapidement leurs déboires en matière de papier commercial adossé grâce à des gains résultant de la démutualisation de VISA.

«Ces gains devraient compenser pour une bonne partie sinon la totalité des pertes résultant de la crise du crédit», dit-il.

Le bal a commencé vendredi quand CIBC a annoncé des gains exceptionnels de 456 millions avant impôts sur la restructuration de VISA.

Comble de malheur, la Banque Nationale - la plus exposée aux risques du papier commercial adossé - ne profitera pas de la manne. Elle est au nombre des deux banques canadiennes qui ne font pas affaire avec VISA.

La Nationale a déjà encaissé 9 millions US, soit cinq cents par action, avec la restructuration de Mastercard l'an dernier.

«Le prochain trimestre sera très difficile pour la Banque Nationale», prévient Michael Goldberg.