Au cours des deux dernières années, le prix moyen de l'électricité sur le marché de l'Ontario n'a pas dépassé 5,74 cents le kilowattheure, ce qui est inférieur au coût de l'électricité facturé à ses clients du Québec, qui est supérieur à 6 cents.

Au cours des deux dernières années, le prix moyen de l'électricité sur le marché de l'Ontario n'a pas dépassé 5,74 cents le kilowattheure, ce qui est inférieur au coût de l'électricité facturé à ses clients du Québec, qui est supérieur à 6 cents.

C'est une preuve que les ventes d'électricité dans les marchés hors Québec ne sont pas aussi rentables qu'on veut nous le faire croire, estime Luc Boulanger, le porte-parole de l'Association québécoise des consommateurs d'électricité, qui regroupe les entreprises grandes consommatrices d'électricité comme les alumineries et les entreprises forestières.

En examinant de près les prix de l'électricité sur les marchés déréglementés de nos voisins, M. Boulanger a constaté que les prix de l'électricité ont été supérieurs à 8 cents le kilowattheure pendant seulement 17,1 % du temps en Ontario depuis deux ans.

Dans les États de la Nouvelle-Angleterre et celui de New York, les prix dépassent 8 cents le kilowattheure entre 15 et 25 % du temps seulement.

Le Québec ne peut pas compter sur les exportations pour s'enrichir comme l'Alberta l'a fait avec le pétrole, en conclut Luc Boulanger, qui déplore l'insistance du premier ministre Jean Charest à affirmer le contraire.

Encore la semaine dernière, dans son discours inaugural, le premier ministre a évoqué l'exemple de la riche Alberta.

«Nous créerons de la richesse avec notre énergie renouvelable, notre hydroélectricité, notre pétrole à nous», a dit M. Charest.

Les entreprises grandes consommatrices d'électricité estiment qu'il faut arrêter de comparer l'électricité du Québec au pétrole de l'Alberta.

«Le prix du pétrole est fixé au niveau mondial et la production de l'Alberta ne compte que pour 3 % du marché», explique-t-il.

Le Québec, au contraire, est un gros joueur dans le marché de l'électricité et plus il exporte, plus il contribue à faire baisser les prix.

Dans ce marché régional, où les centrales nucléaires, les centrales au charbon et les centrales au gaz naturel ne peuvent arrêter de produire quand la demande baisse, elles réduisent leur prix pour écouler leur électricité. Résultat, les prix sont parfois négatifs, et en tout temps, ils sont impossibles à prévoir.

«Le Québec ne peut pas baser sa stratégie économique sur les exportations, dit Luc Boulanger. Si les prix s'effondrent, on se retrouverait gros-jean comme devant.»

Le gouvernement du Québec devrait plutôt rechercher un équilibre entre les exportations et l'utilisation de l'électricité dans la province, qui rapporte l'équivalent 14 cents le kilowattheure en salaires, en matières premières et en biens et services, a calculé l'Association.

M. Boulanger défendra cette position demain au congrès annuel de la Société canadienne de sciences économique, qui a lieu à Québec. Il aura comme vis-à-vis les professeurs Jean-Thomas Bernard, de l'Université Laval, et Marcel Boyer, de l'Université de Montréal, qui prônent tous deux la fin des ventes massives d'électricité aux alumineries et aux autres entreprises énergivores pour pouvoir exporter davantage à des prix plus élevés.

Le problème avec ces économistes «académiques», estime Luc Boulanger, c'est qu'ils tiennent pour acquis que les emplois des alumineries seraient remplacés facilement par d'autres emplois équivalents.

«C'est peut-être vrai à Montréal, mais certainement pas dans les régions», dit-il.

Se servir des bas tarifs d'électricité pour attirer et maintenir au Québec des entreprises comme les alumineries est une bonne stratégie, croit Luc Boulanger, même si c'est apparenté à des subventions.

«Tout le monde fait ça», dit-il, en donnant l'exemple des subventions du gouvernement américain à Boeing, qui ont coûté plus de 4 milliards US, mais qui rapportent beaucoup plus que ça.