Cette saison, les contribuables accorderont au Canadien un cadeau équivalant au moins au salaire du gardien de but Cristobal Huet.

Cette saison, les contribuables accorderont au Canadien un cadeau équivalant au moins au salaire du gardien de but Cristobal Huet.

Le fisc ne s'acquittera évidemment pas du salaire du gardien numéro un du Canadien.

Il permettra plutôt aux entreprises qui achètent des billets et des loges au Centre Bell de déduire la moitié de ces dépenses dans leur déclaration de revenus, ce qui diminuera ses revenus.

En comptant uniquement les déductions accordées sur le prix des 134 loges corporatives du Centre Bell, Ottawa et Québec se priveront d'environ 3,5 millions par année, selon les calculs de La Presse Affaires.

Le salaire de Huel

Sixième salarié en importance de l'équipe, Cristobal Huet gagnera 2,75 millionsUS cette saison.

Comme les loges corporatives, les billets achetés par les entreprises sont aussi déductibles d'impôts.

Si le quart des billets du Canadien étaient vendus à des entreprises qui les déduisent sur leur déclaration de revenus, deux gouvernements se priveraient de deux millions supplémentaires. S'il s'agissait de la moitié des billets, le fisc se priverait de quatre millions supplémentaires.

«Le Canadien ne dévoile pas la proportion de ses détenteurs de billets qui sont des entreprises, mais je ne connais personne dans mon entourage qui a des billets en son nom personnel, dit Martin Boyer, professeur à HEC Montréal. Mes amis ont tous des billets par l'entremise de leur entreprise. Les contribuables paient donc une partie du prix des billets.»

Déduction fiscale

Selon Martin Boyer, le Canadien n'aurait d'autre choix que de diminuer le prix de ses billets en l'absence de la déduction fiscale octroyée par Québec et Ottawa.

«Si la déduction fiscale était abolie demain matin, les entreprises paieraient plus cher en réalité pour leurs billets et elles feraient des pressions pour que le Canadien baisse ses prix», dit-il.

«C'est l'une des raisons qui ont mené au départ des Nordiques. La plupart des détenteurs de billets à Québec n'étaient pas des entreprises. Les partisans des Nordiques devaient payer le plein prix, eux.»

Le Canada n'est pas le seul pays qui permet à ses entreprises de déduire ses billets de sport professionnel.

«Tous les pays qui ont un système fiscal similaire au Canada ont une déduction sur les frais de représentation dépensés afin de gagner un revenu. Quand elle a été introduite au Canada, la déduction était de 80%. Les Américains ont réduit leur déduction à 50% en 1993, et le Canada les a imités l'année suivante», dit Me Guy Masson, associé et responsable du groupe de fiscalité au cabinet d'avocats Stikeman Elliott à Montréal.

À la décharge du Canadien, l'industrie du hockey professionnel est loin d'être la seule bénéficiaire de cette mesure fiscale.

«Quand vient le temps de maintenir sa clientèle et d'attirer de nouveaux clients, ce genre de dépenses fait partie des affaires, dit Gilles Larin, directeur de la Chaire de recherche en fiscalité et en finances publiques de l'Université de Sherbrooke. Les entreprises qui ne le font pas se font regarder de travers. L'industrie du hockey n'est pas la seule à en bénéficier. Cette déduction permet aussi un plus grand achalandage dans les grands restaurants.»

Selon Revenu Québec, les entreprises québécoises ont déduit 1,6 milliard en dépenses de représentation et de divertissement en 2005. Le coût fiscal a été de 95 millions pour Revenu Québec en 2005.

Précisions sur nos calculsAfin d'évaluer l'impact fiscal des déductions des 134 loges corporatives du Canadien, nous avons considéré que 20% des revenus de l'équipe provenaient des loges corporatives, comme l'a déclaré le président Pierre Boivin au magazine Les Affaires en 2001.

Nous avons aussi utilisé les chiffres de Forbes, qui estime les revenus annuels du Canadien à 90 millions US, le taux de change de la Banque du Canada jeudi à la fermeture (1,0684US pour 1,00CAN) et le taux d'imposition fédéral et provincial combiné de 32% pour les entreprises.

Afin d'évaluer l'impact fiscal des déductions des 19 775 sièges du Centre Bell offerts au public, nous avons utilisé le prix moyen de 57$US estimé par Forbes, après ajustement du taux de change de Banque du Canada jeudi dernier à la fermeture.

Nos estimations comprennent seulement l'impact fiscal des 41 matchs de saison régulière disputés au Centre Bell.