La crise du crédit aux États-Unis, qui secoue les marchés financiers depuis des semaines, menace désormais de freiner la plus grande économie du monde.

La crise du crédit aux États-Unis, qui secoue les marchés financiers depuis des semaines, menace désormais de freiner la plus grande économie du monde.

Un tel coup de frein sur les dépenses des ménages américains, provoqué par l'atrophie de leur capacité d'emprunt, pourrait affecter l'économie mondiale, à commencer par les exportations canadiennes.

Car après des groupes financiers et bancaires, frappés de plein fouet par les pertes croissantes des prêts à risque, voilà que de gros détaillants avertissent d'un ralentissement de leurs ventes. Deux colosses d'origine américaine, Wal-Mart [[|ticker sym='WMT'|]] et Home Depot [[|ticker sym='HD'|]], ont ouvert cette boîte de pandore, mardi, en annonçant des résultats moins bons qu'attendus.

Ils ont aussi abaissé leurs attentes concernant leurs prochains résultats, citant l'incertitude financière croissante des ménages américains.

«Les signaux négatifs se multiplient envers une prochaine récession aux États-Unis qui serait provoquée par un soudain repli de la consommation, ce qu'on n'a pas vu depuis 17 ans», avertit l'économiste en chef de Merril Lynch à New York, David Rosenberg, dans une note distribuée à ses clients-investisseurs, mardi.

À Montréal, l'économiste en chef de la Financière Banque Nationale, Clément Gignac, vient de rehausser de 35% à 50% son évaluation de la probabilité d'une récession aux États-Unis, l'an prochain.

En Bourse, les investisseurs déjà échaudés après la crise du crédit ont vite réagi aux résultats mitigés de Wal-Mart et de Home Depot.

La valeur boursière de ces deux géants du commerce de détail a basculé d'un peu plus de 5% en quelques heures.

C'était leur pire séance depuis le repli boursier qui avait suivi les attentats de septembre 2001 à New York et Washington.

Les principaux indices calent

Ailleurs, cette soudaine inquiétude envers la tenue de l'économie américaine, combinée à d'autres informations sur les pertes des prêts à risque aux États-Unis, a encore calé les principaux indices boursiers du monde industrialisé.

Ces autres reculs ont varié de 0,5% pour les principaux indices asiatiques à 1,5% environ pour les principales Bourses européennes. Sur la Bourse américaine, l'important indice S&P 500 a encore reculé de 1,8% à 1426 points. Son vis-à-vis des grandes entreprises, l'indice Dow Jones, a reculé de 207 points, ou 1,5%, pour terminer à 13 028 points.

Au Canada, l'indice S&P/TSX de la Bourse de Toronto a encore reculé de 1,3% en une seule séance pour terminer à 13 242 points.

Avec cette autre journée négative, les principaux indices boursiers nord-américains ont maintenant régressé à leur niveau du début d'avril dernier.

Aussi, leurs gains à ce jour pour l'année 2007 ont encore fondu: seulement 0,5% pour l'indice S&P 500 et 4,5% pour le Dow Jones.

À Toronto, l'indice S&P/TSX n'est maintenant qu'en avance de 2,6% depuis le début de l'année.

Mardi, c'est encore le recul du secteur des services financiers qui a marqué le pas de cette quatrième séance négative de suite sur Bay Street.

En particulier les actions du groupe financier Coventree, un important prêteur non-bancaire, qui ont chuté de 72% au lendemain de sa divulgation de l'échec d'une vente de 250 millions en titres de dette.

Les actions de grandes banques, dont BMO et la Royale, ont aussi écopé de ce sursaut d'inquiétude envers l'impact au Canada des pertes sur prêts à risque aux États-Unis.

Par ailleurs, une influente firme de notation de crédit de Toronto, DBRS, a révélé mardi qu'au moins 17 firmes canadiennes impliquées dans le marché des titres de dette s'étaient fait refuser des fonds dépannage par les banques, au cours des derniers jours.

Leurs demandes totalisaient plus d'un milliard de dollars, selon DBRS. Mais nombre d'investisseurs craignent qu'il ne s'agisse que d'une partie des pertes de ce marché pour plusieurs entreprises financières au Canada.

Le dollar à la baisse

Au point où le dollar canadien, largué temporairement par les cambistes, a subi mardi sa pire glissade en 14 mois, jusqu'aux environs de 93,70 ¢ US.

Quant au risque d'une crise du crédit au Canada, qui émulerait de ce qui se passe aux États-Unis, des analystes et des économistes d'ici s'en tiennent encore à des commentaires apaisants.

D'abord, les prêts à risque dans le secteur hypothécaire, qui ont provoqué la crise américaine, sont bien moins fréquents au Canada.

«Moins de 3% de l'encours du crédit hypothécaire et 5% des nouveaux prêts l'an dernier au Canada, comparativement à 13% de l'encours aux États-Unis et 22% des nouveaux prêts accordés l'an dernier», soulignent les économistes du Mouvement Desjardins, dirigés par François Dupuis, dans une note distribuée mardi.

Par ailleurs, estiment-ils, le marché de l'immobilier résidentiel au Canada est demeuré «nettement en meilleure posture» que son voisin américain, où l'offre excédentaire et la baisse des valeurs font rage après des années de forte croissance.