Gourmande comme 8000 maisons, l'énorme usine de 850 000 pieds carrés d'IBM à Bromont vient par contre de doubler ses économies d'énergie. Après ce tour de force, la direction a décidé de vendre la recette brevetée qui lui a permis de le réussir.

Gourmande comme 8000 maisons, l'énorme usine de 850 000 pieds carrés d'IBM à Bromont vient par contre de doubler ses économies d'énergie. Après ce tour de force, la direction a décidé de vendre la recette brevetée qui lui a permis de le réussir.

Les autres usines -qui représentent un total de huit millions de pieds carrés - du géant de l'informatique dans le monde devraient acheter sa nouvelle technologie énergétique, de même que plusieurs de leurs clients, petits et grands, pour leurs salles d'ordinateurs, croit le directeur d'IBM-Bromont, Raymond Leduc.

Dans un virage vert, «tout part souvent d'un employé visionnaire», et c'est une belle histoire que raconte Raymond Leduc à La Presse Affaires. Les acheteurs de cette technologie verte pourront récupérer en trois ans leur investissement. C'est du moins ce qu'IBM-Bromont a réussi à faire.

Du même coup, Raymond Leduc a constaté la mobilisation générale de toute son équipe dans la chasse au gaspillage énergétique.

Participant du colloque d'IBM sur les technologies vertes, la semaine dernière, Raymond Leduc a déballé son sac à des participants avides de solutions pour sabrer leur consommation. Son système vert a déjà été primé plusieurs fois et vient même de gagner, à Dallas, le premier prix de l'association américaine des ingénieurs en réfrigération et climatisation (ASHRE).

L'industrie énergivore des technologies de l'information fait face à une crise de l'énergie, particulièrement aux États-Unis. En deux mots, un ordinateur de 1000$ consomme 500$ d'électricité et la facture doit passer à 750$ d'ici quatre ans. Pour renverser la vapeur, IBM vient d'ailleurs d'allouer un milliard de dollars par année à l'efficacité énergétique dans son réseau.

La recette d'IBM-Bromont fait partie de ce programme milliardaire, mais comment l'a-t-on trouvé?

La recette secrète

Le siège social d'IBM, à New York, avait déjà décrété un virage vert, exigeant de ses usines des économies d'énergie à 4% par année.

Raymond Leduc avait atteint cette cible de 4%, en 2004, et s'attaquait à ses 22 autres priorités de l'année quand Daniel Paré, un de ses ingénieurs, lui a affirmé pouvoir sabrer 8% dans la consommation d'énergie.

La lecture d'un article avait donné une bonne idée à Daniel Paré, mais il lui fallait un million pour réaliser son projet. L'ingénieur a fini par convaincre Raymond Leduc, malgré tout. Des partenaires, dont Hydro-Québec, ont contribué.

Pour son projet Énerstat, Daniel Paré a installé deux gros cylindres remplis de matériaux en polymère, à l'extérieur de l'usine, pour aller chercher le froid de la nuit afin de refroidir les ordinateurs et 500 000 pieds carrés de salles blanches.

Cette nouvelle technologie s'inspire du bloc réfrigéré qu'on glisse dans une petite glacière avant d'aller en pique-nique, mais elle mise sur des matériaux beaucoup plus efficaces pour réaliser son stockage thermique. Même l'informatique médicale pourra en profiter.

De 4%, IBM-Bromont a ainsi fait grimper ses économies d'énergie à 6% en 2005 et à 8,5% en 2006. Daniel Paré a sabré à lui seul 350 000$ de coûts et d'autres projets, comme des ventilateurs à vitesse variable et de l'éclairage avec minuterie, ont fait grimper le total des économies à 500 000$.

La facture énergétique de IBM-Bromont s'élève à 6 millions et l'investissement de un million sera complètement récupéré en 2008. Raymond Leduc a décidé de maintenir sa cible à 8% par an, encouragé par la contribution des 2800 employés.

Le projet de Daniel Paré a démontré que le développement durable, c'est rentable en plus de mobiliser les employés et d'attirer les meilleurs talents, fiers de trouver le bon employeur.

IBM-Bromont va hausser sa rentabilité car ses ventes pourront augmenter sans ajout de dépenses énergétiques, déclare Raymond Leduc. Le directeur ne dévoile pas ses ventes, mais ses exportations atteignent à elles seules 750 millions par année.

IBM-Bromont a le mandat mondial de l'assemblage des microprocesseurs des trois grandes consoles de jeux vidéo: XBox 360, PlayStation 3 et Nintendo Wii.

«Je suis ainsi très populaire auprès de mes fils», dit Raymond Leduc. L'usine de Bromont est également l'un des cinq principaux fournisseurs mondiaux dans l'emballage de semiconducteurs et se spécialise, en outre, dans les tests de composantes des ordinateurs IBM. Le géant Cisco est devenu son deuxième client.

Depuis 35 ans, IBM a investi 1,4 milliard à l'usine de Bromont qui maintient son leadership malgré la forte concurrence de l'Asie.