L'Autorité des marchés financiers (AMF) fera tout ce qui est possible pour garder secrète son enquête sur la Corporation Cinar.

L'Autorité des marchés financiers (AMF) fera tout ce qui est possible pour garder secrète son enquête sur la Corporation Cinar.

L'organisme vient en effet de recourir aux tribunaux pour contester un récent jugement qui lui ordonne de rendre publique son enquête.

Plus précisément, l'AMF demande à la Cour l'autorisation de porter en appel le jugement de Jean-Yves Lalonde, soumettant que ce dernier a erré en droit.

L'AMF soutient que la confidentialité de ses enquêtes est essentielle. Cette confidentialité permet aux témoins d'aller plus loin dans leur témoignage, une liberté essentielle à la recherche de la vérité. Rendre publique une telle enquête aurait «une portée sans précédent» sur le système judiciaire, tant en matière administrative que pénale ou criminelle.

C'est le 21 septembre que Jean-Yves Lalonde a exigé de l'AMF qu'elle transmette à diverses parties la preuve documentaire de son enquête sur Cinar et, en particulier, les témoignages des cofondateurs de Cinar, soit Ronald Weinberg et feu Micheline Charest.

Pour comprendre, il faut savoir que le couple Charest-Weinberg impute à d'autres la responsabilité des détournements de fonds pour lesquels ils sont poursuivis. À cet égard, ils poursuivent la firme comptable Ernst & Young et l'ancien vice-président finances de Cinar, Hasanain Panju.

Or, ces deux défendeurs croient que les éléments de l'enquête de l'AMF les disculperont des allégations du couple Charest-Weinberg portées contre eux.

D'ailleurs, certains des éléments de l'enquête de l'AMF rendus publics en mars 2002 «divergent considérablement» des allégations de Ronald Weinberg contre M. Panju et Ernst & Young, dit le juge.

La portion de l'enquête rendue publique est liée à une entente survenue en mars 2002 entre l'AMF et le couple. En résumé, dit le juge, l'exposé des faits dans cette entente est compromettant pour le couple Charest-Weinberg.

«Weinberg y reconnaît avoir autorisé des transferts de fonds aux Bahamas. Il admet aussi avoir reçu en novembre 1999, pour son propre bénéfice, une avance de 12 millions US. Il avoue que plusieurs transactions du genre ont été faites sans l'autorisation du conseil d'administration de Cinar, à même des fonds provenant d'un appel public à l'épargne», écrit le juge.

Jean-Yves Lalonde estime que l'accès à l'enquête permettra à M. Panju et Ernst & Young de bénéficier d'une défense pleine et entière. Il estime que la «recherche ultime de la vérité» doit surpasser les restrictions d'accès à l'enquête de l'AMF, tel que prévu dans la loi constitutive de l'organisme.

L'AMF ne voit pas les choses du même oeil. Selon elle, cette «recherche de la vérité» passe par la confidentialité de ses enquêtes.

«La confidentialité est essentielle pour permettre aux enquêteurs de colliger un ensemble de faits et d'information. (Ces informations sont principalement issues de témoignages dans lesquels se mêlent informations et faits souvent inadmissibles devant les tribunaux mais essentiels aux enquêtes.)

L'AMF poursuit son exposé en expliquant que «la personne appelée à être interrogée par l'enquêteur avec des attentes légitimes de confidentialité ne le ferait plus aussi librement en sachant que ces propos pourront devenir publics», explique l'AMF

Cette requête pour permission d'en appeler de l'AMF sera entendue le 31 octobre.