Les années successives de croissance économique ont amené certains décideurs à minimiser l'importance de la gestion des risques, un phénomène qu'il faut combattre, a soutenu mercredi le chef de l'exploitation de la Banque Nationale, Louis Vachon.

Les années successives de croissance économique ont amené certains décideurs à minimiser l'importance de la gestion des risques, un phénomène qu'il faut combattre, a soutenu mercredi le chef de l'exploitation de la Banque Nationale, Louis Vachon.

«Psychologiquement, les gens ne perçoivent plus les risques aussi clairement qu'avant», a déclaré M. Vachon devant l'Association des MBA du Québec.

«Chez nous, les conséquences d'une récession, d'une reprise de l'inflation ou d'un choc économique externe pourraient être amplifiées par ce phénomène», a ajouté celui qui deviendra président et chef de la direction de la Banque en juin.

Ce relâchement relatif s'explique par la longue période d'expansion économique que le monde connaît depuis le milieu des année 1990, a noté Louis Vachon.

«Il existe une perception largement partagée que les risques économiques et financiers ont diminué à l'échelle mondiale», a fait remarquer M. Vachon.

Plusieurs jeunes gestionnaires n'ont «jamais connu les affres d'une récession», tandis que d'autres «en ont un souvenir assez vague», a-t-il rappelé. «Les effets d'une récession sur l'emploi, sur l'investissement ou même sur la confiance des gens d'affaires leur paraissent lointains.»

Aux yeux de Louis Vachon, les jeunes décideurs sont très compétents dans des domaines comme la gestion des risques de marché. «D'un autre côté, ils seront peut-être moins aptes à gérer une entreprise dans le contexte d'une rencontre bien involontaire avec leur premier recul prolongé du produit intérieur brut», a-t-il prévenu.

Se défendant bien de vouloir semer la crainte, Louis Vachon s'est tout de même permis de souligner que les économistes de la Banque Nationale plaçaient à 40 % la probabilité d'une récession aux Etats-Unis.

«Notre économie et les marchés financiers font montre d'une robustesse certaine, a-t-il estimé. Ils ne feraient que gagner d'une attitude renforcée face au risque.»

Mieux équipés

Le dirigeant a mentionné que ces dernières années, les entreprises et le secteur financier avaient innové en adoptant des outils permettant de mieux gérer les risques.

La réglementation américaine Sarbanes-Oxley, adoptée en 2002, a hérissé le monde des affaires à cause des coûts qu'elle a entraînés, mais elle a au moins forcé les sociétés à améliorer leur gestion des risques, selon lui.

La stabilité de la dernière décennie, tant au plan de l'inflation que du taux de croissance, a facilité la tâche des sociétés, qui profitent actuellement de «l'un des plus grands mouvements de création de richesse de l'histoire», a relevé Louis Vachon.

«Au cours des 20 dernières années, la valeur des actifs financiers a été multipliée, au profit de l'ensemble de la société», a-t-il affirmé.

La mondialisation des échanges a permis aux entreprises «de mieux répartir leurs ressources productives» et aux consommateurs «de bénéficier de baisses de prix importantes», a dit M. Vachon.

Le hic, bien sûr, c'est que certains secteurs aux prises avec la vive concurrence asiatique, notamment celui de la fabrication, accusent durement le coup.

Louis Vachon a aussi encensé l'émergence des fonds de couverture, qui ont aidé les institutions financières à amoindrir leur exposition aux risques.

«Dans les dossiers plus difficiles de PME qui, il y a quelques années, nous auraient probablement amenés à prendre des provisions de pertes sur des prêts, aujourd'hui on voit des sociétés spécialisées dans l'investissement d'entreprises qui rachètent des entreprises, a-t-il expliqué. Et nous, on se retrouve à être remboursés très rapidement. Même au niveau des PME, il y a beaucoup de liquidités dans le marché financier.»