À la boutique Le Futur, en plein coeur de Moscou, on trouve tout ce dont l'être humain moyen n'a pas besoin: un mini-rodéo mécanique à 5400$, un tapis de souris en cuir avec calculatrice intégrée ou encore un épluche-pomme «de luxe».

À la boutique Le Futur, en plein coeur de Moscou, on trouve tout ce dont l'être humain moyen n'a pas besoin: un mini-rodéo mécanique à 5400$, un tapis de souris en cuir avec calculatrice intégrée ou encore un épluche-pomme «de luxe».

Autant de gadgets qui contrastent avec les tablettes vides du début des années 90, dont bien des Russes parlent encore.

La Russie d'aujourd'hui a de l'argent. Les Lada sont encore nombreuses sur les routes et les édifices de l'ère soviétique, toujours aussi laids. Mais les Bentley, Ferrari et Mercedes se multiplient à une vitesse folle, tout comme les chantiers de construction et les centres commerciaux haut de gamme.

Avec un taux de croissance de 6,7% l'an dernier, dopé par les cours élevés des hydrocarbures, la Russie vit un boom économique sans précédent. «La vie est bonne», dit en souriant Rustam Topchieva, un jeune cadre du secteur de l'immobilier, quelques minutes après être descendu de sa rutilante BMW noire.

Le Moscovite de 27 ans présente toutes les caractéristiques du «nouveau Russe». Il travaille fort –douze heures par jour–, gagne un bon salaire, voyage et sort beaucoup. Il a connu les misères du régime communiste pendant son enfance, mais navigue aujourd'hui dans la Russie capitaliste comme un poisson dans l'eau.

Le jeune homme nous rencontre dans un café branché du centre de Moscou, qu'il a lui-même vendu à l'actuel propriétaire en 2003 alors qu'il était agent pour une petite société immobilière.

«On a vendu cette propriété pour 5000$ le mètre carré. À l'époque, les gens disaient: vous êtes fous. Aujourd'hui, elle vaut 25 000$ le mètre carré»

L'an dernier, c'est à Moscou qu'il s'est bâti le plus d'espaces à bureaux sur toute la planète, devant Shanghai et Dubaï.

Les compagnies russes comme étrangères se bousculent pour s'installer dans la capitale, où l'inventaire de bureaux de catégorie A et B est presque nul. Les grues qui s'activent aux quatre coins de la ville ne suffisent pas à remplir la demande.

La capitale russe comptera bientôt le plus haut gratte-ciel de toute l'Europe. Avec ses 93 étages, la Federation Tower s'élèvera dans Moscow City, le nouveau quartier des affaires en train d'être construit sur un ancien parc industriel, à quatre kilomètres du Kremlin.

«Ça va devenir le nouveau symbole de Moscou», assure Adikaev Alexey, membre du comité de direction de Mirax, un des principaux promoteurs du projet.

L'homme d'affaires ne doute pas une seule seconde du potentiel économique de la Russie. Bien assis dans son luxueux bureau, en plein coeur de Moscow City, il affirme que le nouveau quartier des affaires deviendra une réplique à Manhattan. Rien de moins.

Adikaev Alexey n'est pas le seul à avoir de grandes ambitions pour la Russie. Les entreprises canadiennes débarquent –ou reviennent— en masse depuis quelques années au pays de Vladimir Poutine. La crise financière de 1998, qui a entraîné le pays au bord de la faillite, est chose du passé.

Et malgré le fort taux de corruption et la bureaucratie écrasante, qui en effraient encore plusieurs, de plus en plus de sociétés jugent le potentiel de croissance trop important pour passer à côté.

«C'est un marché à haut risque et à haut potentiel», résume Daniel Klein, avocat américain qui a fondé son propre cabinet de droit des affaires à Moscou.

Exportation et développement Canada vient tout juste d'inaugurer une représentation permanente à Moscou, presque cinq ans après en avoir une... en Pologne! Prudente, la société d'État fédérale voulait être sûre et certaine du potentiel du marché russe avant de s'y installer pour de bon. Eric Siegel, le président d'EDC, est maintenant convaincu.

«On voit le système bancaire émerger, beaucoup plus sain, la situation macroéconomique de la Russie s'est beaucoup améliorée depuis les cinq dernières années, ce qui s'est traduit en des investissements plus grands», dit M. Siegel, attablé au chic Swisshotel, où EDC a inauguré sa représentation moscovite.

L'industrie des ressources naturelles constitue un débouché évident pour les entreprises canadiennes. Mais il y a beaucoup plus.

Les besoins en machinerie et en expertise sont criants dans une foule de secteurs, comme la construction, la foresterie, les ressources naturelles et l'aéronautique.

Plusieurs fleurons québécois brassent de grosses affaires en ex-URSS. Bombardier y est, SNC Lavalin aussi. Et de nombreuses autres entreprises, petites et grandes, cherchent à leur tour à conquérir ce marché de 143 millions d'habitants, où le revenu disponible moyen a augmenté de 15,5%... en un an!

Les affaires sont bonnes ces jours-ci en Russie, ont répété, sourire aux lèvres, les nombreux entrepreneurs rencontrés par La Presse Affaires.

La classe moyenne se développe à vive allure, le gouvernement a des milliards de surplus à dépenser en infrastructures, le boom de la construction semble loin de s'essouffler.

Pour les gens d'affaires déjà présents dans le pays, les compagnies occidentales doivent impérativement se défaire de leurs préjugés et voir la Russie pour ce qu'elle est: un marché en pleine croissance, où il y a beaucoup d'argent à faire. Malgré les nombreux risques et les complications, loin d'être négligeables.

À lire demain, la suite de notre dossier:

Corruption sévère et bonnes pratiques d'affaires se côtoient aujourd'hui en Russie.

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Le retour du géant russe