Les Anglais ont l'habitude de ne rien faire comme tout le monde. Ils conduisent à gauche. Leurs pubs ferment de bonne heure. Et en matière de politique monétaire, ils sont insensibles à la crise du crédit.

Les Anglais ont l'habitude de ne rien faire comme tout le monde. Ils conduisent à gauche. Leurs pubs ferment de bonne heure. Et en matière de politique monétaire, ils sont insensibles à la crise du crédit.

La semaine dernière, les banques centrales européennes et nord-américaines ont injecté des milliards de dollars dans les marchés financiers. Seule la Banque d'Angleterre est restée de marbre, refusant de pallier le manque de liquidités causé par la crise du crédit.

«La Banque d'Angleterre n'était certainement pas désolée des soubresauts des derniers jours sur les marchés financiers. Elle était même contente de voir une correction. Elle veut maintenant que le marché règle ses problèmes lui-même», a dit Brian Hilliard, économiste et directeur de la recherche au bureau londonien de la Société Générale, en entrevue à La Presse Affaires.

M. Hilliard admet que la décision de la Banque d'Angleterre est «surprenante». Mais les victimes de la crise du crédit en Angleterre peuvent difficilement blâmer leur banque centrale d'avoir caché ses intentions.

Pas plus tard que quelques jours avant le début de la crise, le gouverneur Mervyn King avait prévenu - une fois de plus - les marchés financiers de ne pas compter sur sa générosité.

«Les taux d'intérêt ne sont pas un outil afin de protéger les investisseurs imprudents des conséquences de leurs décisions», a-t-il dit.

Mervyn King a tenu parole. Quand la crise du crédit a éclaté, il n'a pas bronché, au contraire des autres banques centrales qui ont consenti des milliards de dollars en liquidités aux institutions financières exposées à la crise.

«Les Anglais ne prennent pas la crise à la légère, mais peut-être de façon un peu hautaine», dit François Barrière, vice-président du marché des devises à la Banque Laurentienne.

«Il faut dire que leurs banques sont parmi les meilleures au monde et que leur pays est moins affecté par la crise. L'immobilier va bien en Angleterre et les banques anglaises gèrent beaucoup d'hypothèques. Comme elles n'ont pas autant besoin de se diversifier à l'étranger que les autres banques européennes, elles ont été moins exposées à la crise du crédit aux États-Unis.»

À son insu, la Banque d'Angleterre a commencé à intervenir dans la crise du crédit cette semaine. Mardi, elle a prêté 628 millions US (314 millions de livres sterling) à la banque Barclays au taux de 6,75% - soit 1% de plus que son taux habituel.

Selon l'agence Bloomberg, Barclays aurait été forcé d'agir ainsi après avoir restructuré un prêt effectué à HSBC, une banque londonienne qui serait aux prises avec des problèmes de liquidités.

«La Banque d'Angleterre n'a pas changé sa politique de non-intervention, dit Brian Hilliard, de la Société Générale. Il s'agit d'une option disponible en tout temps aux institutions financières, peu importe la raison. Mais cette option n'est pas très intéressante en raison du taux d'intérêt élevé.»

Soit, les Anglais ne font rien comme tout le monde. Mais ça ne veut pas dire qu'ils ont tort.

«Il y a toujours deux facettes à une décision, dit Hilliard. C'est réconfortant que la Banque centrale européenne ait décidé de se soucier du marché en injectant des fonds de façon illimitée, mais on peut aussi penser qu'elle a peur d'une crise encore plus grave. En privé, la Banque d'Angleterre suit la situation d'aussi près que toutes les autres banques centrales. Elle a conclu qu'il valait mieux ne pas intervenir pour le moment.»